Les propriétaires des hammams traditionnels et douches sont décidés. Pas de reprise d'activité tant que leurs doléances ne sont pas prises en considération « Nous n'allons pas ouvrir. Et la reprise ne va se faire que si tout rentre dans l'ordre », lance Rabie Ouaacha, président de la fédération nationale des associations des propriétaires des hammams traditionnels et douches au Maroc. Les opérateurs sont aujourd'hui perplexes, ils ne savent comment gérer cette reprise. «Comment on va gérer le flux et limiter la fréquentation à 50% de la capacité ? Comment on va s'assurer du respect des mesures de distanciation et autres précaution à l'intérieur des locaux ?… , nous sommes dans confusion totale », assure Ouaacha qui ajoute aussi que même sur le plan financier, cela semble difficile puisque les charges seront les mêmes pour 50% ou 100% de la capacité. « Pour démarrer, il faut chaque matin près de 1.000 DH de bois. Et les gens sont déjà en crise financière », note Ouaacha. Ce dernier est catégorique : On ne peut prendre le risque. L'ouverture ne se fera qu'après la levée totale de l'état d'urgence sanitaire et prise en considération des doléances des opérateurs du secteur. Une crise financière Le secteur compte aujourd'hui, près de 12.000 professionnels et emploie plus de 200.000 personnes directement. Il faut dire que la filière a été fortement secouée par le coronavirus. Quatre mois d'arrêt d'activité a privé les propriétaires et employés de leur source de revenus. Les loyers s'accumulent, les dettes aussi. Conséquence : «les gens n'avaient pas de quoi manger. Et pour les soutenir, les associations régionales ont décidé de distribuer de 500 à 600 paniers de produits alimentaires par région. », regrette Rabie Ouaacha qui nous confie avec une boule dans la gorge qu'il a été contacté par certains propriétaires de hammams relevant du secteur privé, qui n'avaient d'autre choix que de lui demander de leur envoyer discrètement des paniers pour faire nourrir leurs enfants. « J'en pleurais chaque soir en rentrant chez moi », raconte Rabie Ouaacha. Pour les masseuses (Tyaba ou Kessala), la situation a été encore plus déplorable. «Elles ne bénéficient d'aucune couverture sociale, n'ont pas de Ramed pour la plupart et vivent le jour au jour. Rares sont celles qui ont bénéficié du soutien de l'Etat prévu pour le secteur informel. Les autres, n'ont pas eu d'autres solutions que de mendier », déplore Ouaacha qui préconise de revoir la situation de ces employés en leur permettant d'accéder au statut d'auto-entrepreneur. Un état lamentable des lieux Au-delà des difficultés financières, aujourd'hui, si les opérateurs ne veulent pas rouvrir c'est que leurs Hammams sont dans état lamentable. Fermés pendant toute la période du confinement, Rabie Ouaacha décrit des lieux où les citernes sont rouillées, les robinets entartrés, les vannes grippées ....bref tout l'équipement est pris en masse par la rouille. «Un Hammam n'est pas un café ou un restaurant. Pour le redémarrer il faut tout changer », nous explique Ouaacha. «C'est un investissement supplémentaire que la majorité des opérateurs e peuvent supporter », complète t-il. Aujourd'hui, les opérateurs interpellent le ministère du commerce et de l'industrie. Une dizaine de courriers ont été envoyés aux différentes parties prenantes. Sans réponse. «Il faut que l'Etat nous écoute et prend en considération notre souffrance », lance Ouaacha. A bon entendeur.