Tawfik Abou Naïm a été blessé vendredi après-midi par l'explosion de sa voiture alors qu'il sortait d'une mosquée. Les lésions semblent légères mais l'affront est cinglant. Tawfik Abou Naïm, chef des services de sécurité intérieure du Hamas dans la bande de Gaza, a été blessé par l'explosion de son véhicule près de la mosquée Abou al-Hussein, en lisière du camp de réfugiés de Nusseirat, vendredi après la prière de la mi-journée. Rapidement évacué vers l'hôpital al-Shifa, il a reçu dans l'après-midi la visite de plusieurs responsables politiques dont le chef du mouvement islamiste, Ismaïl Haniyeh. Sur des photos prises à cette occasion, il semble avoir été atteint par des éclats aux bras, à la tête et au dos. Le ministère de l'Intérieur a dénoncé une «tentative d'assassinat manquée» tandis que le Hamas dénonçait «un acte lâche perpétré par des ennemis du peuple palestinien». L'attaque menée contre ce proche de Yahya Sinwar, nouvel homme fort du Hamas à Gaza, intervient alors que le mouvement traverse un période de forte turbulence. Isolés et affaiblis par le blocus israélo-égyptien, ses dirigeants se sont résignés le 17 septembre dernier à remettre les clés de l'enclave qu'ils contrôlent depuis dix ans à l'Autorité palestinienne (AP) de Mahmoud Abbas. Celle-ci doit en principe reprendre le contrôle des trois points de passage vers Israël et l'Egypte en milieu de semaine prochaine. Les habitants de l'enclave espèrent que ce transfert de compétence sera rapidement suivi d'une amélioration de la situation humanitaire. Mais certaines voix reprochent au Hamas d'avoir capitulé un peu vite alors que le président Abbas reste très évasif sur la levée des restrictions imposées ces derniers mois dans l'espoir de le faire céder. Le Hamas déjà victime de djihadistes Âgé d'une cinquantaine d'années, Tawfik Abou Naïm a longuement séjourné dans les prisons israéliennes avant d'être relâché en 2011 dans le cadre de l'accord sur la libération du soldat israélien Gilad Shalit. De retour à Gaza, il s'est imposé dans l'orbite de Yahya Sinwar et compte parmi les principaux acteurs du récent rapprochement avec l'Egypte. Résolu à tenir la bride courte aux salafistes djihadistes qui prolifèrent dans l'enclave, il a annoncé en mai 2016 le renforcement des contrôles à la frontière avec la péninsule du Sinaï afin d'empêcher la circulation des combattants affiliés à l'Etat islamique. «Nous n'accepterons jamais que notre territoire serve de base arrière à ceux qui attaquent nos frères égyptiens», avait alors prévenu Tawfik Abou Naïm, confiant vouloir écrire «une nouvelle page» dans la relation entre le mouvement islamiste et son puissant voisin. Le fait que le Hamas n'ait pas immédiatement accusé Israël après la tentative d'assassinat perpétrée vendredi midi est, en soi, révélateur. Les dirigeants du mouvement n'ignorent pas que l'arrestation de nombreux salafistes djihadistes au cours des derniers mois a créé un fort ressentiment. Une partie de la population de la bande de Gaza, déçue par l'incapacité du mouvement islamiste à améliorer leur situation matérielle ainsi qu'à vaincre Israël par les armes, se laisse séduire par le discours encore plus radical des djihadistes. Le 17 aôut dernier, un membre de la branche militaire du Hamas a été tué par la ceinture d'explosifs portée par l'un d'entre eux à Rafah, dans le sud de l'enclave, alors que celui-ci tentait de s'infiltrer en Egypte. L'attentat, sans précédent, avait aussitôt été dénoncé par les brigades Ezzeddine al-Qassam comme «le fruit d'une pensée tordue qui n'a rien à voir avec notre idéal de résistance».