C'est une belle initiative pour faciliter l'intégration des migrants subsahariens qui vient de voir le jour à Rabat, précisément au quartier Yaâcoub El Mansour. L'association interculturelle Kirikou a ouvert les portes d'une crèche qui accueille enfants marocains et migrants. L'accès à cette crèche est gratuit pour les familles en situation de vulnérabilité, "la seule participation des parents sera de préparer le déjeuner pour les enfants", explique Diop Mountaga, président de l'association, dans un entretien accordé à 2M.ma.
Depuis sa création en 2015, laquelle a coincidé avec la mise en place de la Stratégie Nationale d'immigration et d'Asile, l'association Kirikou s'est attelée à aider les migrants subsahariens dans l'inscription de leurs enfants dans des crèches, avant de procéder à l'initiative inédite d'ouvrir la sienne. Cette action intègre l'un des trois volets d'accompagnements sur lesquels l'association s'active : l'assistance aux enfants, aux mineurs et aux femmes. Le premier axe s'oriente vers les enfants dont l'âge est entre 2 et 5 ans, "ceux dont les mamans sont en situation de vulnérabilité", précise M. Mountaga. Ces derniers sont pour la plupart nés au Maroc, et leur parents trouvent difficilement le temps pour jongler entre les exigences du ménage et celles de leur gagne-pain quotidien. "Nous n'avions pas beaucoup de moyens à l'époque pour créer une crèche propre à cet objectif", se rappelle le président de Kirikou. L'association proposait alors aux migrants intéressés d'inscrire leurs enfants dans des crèches de quartiers. "Nous essayons même de placer une maman dans la crèche, pour lui apprendre à être monitrice et qui, par la même occasion, assistera l'établissement en y dispensant des cours en français", poursuit M. Mountaga.
Ce volet est complémentaire avec l'action entreprise par Kirikou pour les femmes. "Nous saisissons l'occasion pour orienter ces mêmes mères, surtout celles au foyer. Nous les incitons à exploiter le temps que passe leurs enfants dans la crèche à bon escient, et les dirigeons vers des établissements comme l'OFPPT ou l'Entraide Nationale, pour qu'elle profite d'une formation structurelle qui leur serve par la suite dans le marché du travail. Et même si elles décident un jour de rentrer à leur pays d'origine, il serait mieux qu'elles soient munie d'une diplomation en pâtisserie, en coiffure, en couture ou autre pour intégrer plus facilement le marché du travail", détaille M. Mountaga.
Le dernier axe de l'action de Kirikou porte sur l'accompagnement des mineurs dits "isolés". "Ce sont les mineurs non accompagnés, et dont la plupart passe, malheureusement, la journée à errer dans les rues et près des feux de signalisation", regrette le président de l'association. Kirikou les accueille et les oriente d'abord vers des structures de santé s'ils ont besoin de soins, puis essaie de les placer dans les foyers communautaires de la capitale, comme celui à Hay Takadoum ou à Youssoufia, au cas où ils sont sans logement. De même, l'association leur propose un programme de retour au pays d'origine, "car nous sommes convaincus à Kirikou que la place des mineurs est au sein de leurs familles", précise M. Mountaga. Mais d'abord, une formation de six mois leur est dispensée dans des disciplines comme la mécanique, l'informatique ou électronique, pour leur permettre d'aborder la vie adulte avec une compétence sous la main. "Nous prenons également contact avec leur famille au pays d'origine, et nous interagissons avec le ministère de l'Intérieur et le bureau de l'Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) pour préparer leur retour", nous explique M. Mountaga. Les efforts de Kirikou ne passent pas inaperçus. En plus des fonds octroyés par l'Etat marocain à travers le département de la Migration, l'association reçoit périodiquement des dons d'entreprises et de particuliers souhaitant appuyer ses initiatives, en atteste son président. "Nous menons notre action dans le cadre d'un partenariat avec l'Etat, car nous sommes convaincus que pour régler la problématique migratoire, il faut que l'Etat et la société civile joignent leurs forces. Nous ne croyons pas à la logique de l'affrontement ou du plaidoyer, mais à l'action pur et simple", conclut M. Mountaga.