Un sketch joué, en début février dernier, lors de l'émission de télé-réalité “Stand Up” de la chaîne nationale Al Oula, mettant en scène le personnage d'un migrant africain parcourant le Royaume avait déclenché une polémique sur les réseaux sociaux. La prestation de l'humoriste Abdellah Elberkaoui de Côte d'Ivoire a été taxée de "racisme". Devant le tollé, la Haute Autorité de la Communication audiovisuelle (HACA) a été saisie de l'affaire et le Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle (CSCA) a rendu son verdict! Dans un communiqué parvenu ce vendredi 01 mars à 2M.ma, la HACA fait savoir que le Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle "déclare que la SNRT, éditrice du service télévisuel public « AL OULA », a enfreint les dispositions en vigueur, notamment celles relatives à la dignité humaine ; Décide d'adresser un avertissement à la SNRT ; Ordonne la notification de la présente décision à la SNRT, ainsi que sa publication au Bulletin Officiel".
Voici par ailleurs le texte du document: "DECISION DU CSCA N° 13-19 DU 15 JOUMADA II 1440 (21 FEVRIER 2019) RELATIVE A L'EMISSION « STAND'UP » DIFFUSEE PAR LE SERVICE TELEVISUEL PUBLIC «AL OULA» EDITE PAR LA SNRT Le Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle, Vu la loi n° 11-15 portant réorganisation de la Haute Autorité de la communication audiovisuelle, notamment ses articles 3 (alinéa 1), 4 (alinéa 9) et 22 ; Vu la loi n° 77-03 relative à la communication audiovisuelle, telle que modifiée et complétée, notamment son préambule et ses articles 3, 46 et 48 ; Vu le cahier des charges de la SNRT notamment ses articles 183.1, 183.3, 184.1 ; Après avoir pris connaissance du rapport d'instruction effectuée par la Direction Générale de la communication audiovisuelle au sujet de l'édition du 02 février 2019 de l'émission « STAND'UP » diffusée par le service télévisuel public « AL OULA » édité par la SNRT ;
Et après en avoir délibéré : La Haute Autorité de la communication audiovisuelle a relevé, dans le cadre du suivi des programmes audiovisuel que l'édition du 02 février 2019 de l'émission de téléréalité «STAND'UP » diffusée par le service télévisuel public « AL OULA » édité par la SNRT, contenait un sketch d'un candidat, présenté par l'animatrice sous un nom de scène « Kahlouch », comme suit : " ... كيفما كيلقبوه املعجبني بيه يف مواقع التواصل كحلوش إسم الشهرة ديالو...". Attendu qu'il a également été relevé que le candidat a incarné, dans ce sketch, le personnage d'un immigré, d'origine africaine subsaharienne, en se présentant notamment par des termes tels que : " (…) Je vous présente (nom du candidat), de (pays subsaharien d'origine) ... Kahlouch du Maroc ! (…)" ; Attendu qu'il a également été relevé, que les membres du jury ont présenté leurs avis et leurs observations à l'issue de la performance du candidat, que l'une d'entre eux, notamment, a commenté en adoptant un accent se voulant similaire à celui du candidat, par l'utilisation de propos tels que : « (…) Oui je vais commencer ! Je vais te dire mes remarques ! est-ce que tu vas accepter ? (…) » ; Comme également commenté par une autre membre du jury, par des propos tels que : « (…) Je veux l'africain !…où est l'africain !? (…) » ; Attendu que le public scandait le qualificatif « kahlouch » durant le sketch ; 2 Attendu que le préambule de la loi n°77-03 relative à la communication audiovisuelle, telle que modifiée et complétée, dispose que : « (…) Cette loi se fonde, dans sa philosophie générale et ses objectifs, sur, d'une part, les constantes et les référents constitutionnels du Royaume (…) et, d'autre part, les principes universels relatifs aux droits de l'Homme, tels que reconnus au niveau international (…) S'inspirant des Hautes Orientations Royales, cette loi, (…) vise les objectifs suivants : - La consécration de la liberté de communication audiovisuelle et la garantie des libertés d'expression, d'opinion et de communication individuelles et collectives, ainsi que le respect des règles de l'éthique et de la déontologie, le respect des droits de l'homme, notamment le respect de la dignité de la personne humaine (…) » ; Attendu que l'article 3 de la loi n° 77.03 précitée dispose que : « La communication audiovisuelle est libre. Cette liberté préserve l'unité nationale et l'intégrité territoriale, et le maintien de la cohésion et de la diversité des éléments de l'identité nationale, unifiée avec toutes ses composantes, arabo-islamique, amazighe, saharo-hassani et ses affluents africains (…) l'attachement du peuple marocain aux valeurs d'ouverture de modération, de tolérance et de dialogue et la compréhension mutuelle entre toutes les cultures et civilisations (…) » ; Attendu que l'article 183.1 du cahier des charges de la SNRT dispose que : " تقوم الشركة بإعداد براجمها بكل حرية مع مراعاة احرتام املقتضيات القانونية ودفرت التحمالت هذا. وهي تتحمل مسؤولياهتا كاملة يف هذا الشأن. متارس هذه احلرية يف إطار احترام الكرامة اإلنسانية وحرية الغري وملكيته، والتنوع والطابع التعددي للتعبري عن تيارات الفكر والرأي )...("; Attendu que l'article 183.3 du cahier des charges de la SNRT dispose que : "حتتفظ الشركة يف كل الظروف بالتحكم يف ما يذاع أو يبث على خدماهتا. ويتعني عليها المراقبة القبلية للبرامج أو أجزاء البرامج المسجلة قبل بثها )...("; Attendu que l'article 184.1 du cahier des charges de la SNRT dispose que : "تشكل كرامة اإلنسان إحدى مكونات النظام العام. وال ميكن التنازل عن هذا املبدإ بواسطة اتفاقات خاصة، حىت يف حالة التعبري عن املوافقة من طرف الشخص املعين. وهلذا الغرض، تسهر الشركة يف إطار براجمها على احرتام شخص اإلنسان وكرامته )...("; Attendu que la Haute Autorité de la communication audiovisuelle a adressé un courrier en date du 07 février 2019 à la SNRT au sujet des observations enregistrées ; Attendu que la Haute Autorité de la communication audiovisuelle a reçu en date du 14 février 2019 une réponse de la SNRT au regard des observations enregistrées ; Attendu qu'il résulte de la réponse de l'opérateur, que ce sketch a fait l'objet d'une évaluation particulière et qu'il a finalement été considéré que son contenu relevait de l'humour, de l'auto dérision et qu'il n'outrepassait donc pas les règles encadrant la liberté d'expression ; Attendu que le secteur audiovisuel public assure, dans l'intérêt général, des missions de service public tendant à satisfaire les besoins de culture et d'éducation du public et contribue à la promotion de la citoyenneté, des valeurs d'ouverture et de tolérance, des valeurs des Droits de l'homme, et la lutte contre toutes les formes de discrimination, à travers les programmes audiovisuels, notamment à l'égard du jeune public ; Attendu que le Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle considère que l'utilisation du qualificatif « kahlouch » de manière répétitive, bien qu'adopté en tant que nom de scène par le candidat lui-même, constitue un sobriquet, à connotation péjorative, renvoyant à sa couleur de peau ; ce qui, associé d'une part, au personnage incarné d'un immigrant d'Afrique subsaharienne, tel que représenté par la mise en scène, avec un accent caricatural, ainsi que d'autre part, les réactions des membres du jury et les acclamations du public sur le plateau, scandant le dit sobriquet, dépassent le caractère comique et confinent à la moquerie et au mépris, ce qui constitue donc une injure à connotation péjorative et à perception raciale, à l'égard d'une catégorie du public, et met ce contenu précisément en non-conformité avec les dispositions légales et règlementaires ci haut, relatives à la dignité humaine ; Attendu que, en conséquence, il se doit de prendre les mesures appropriées à l'encontre de la SNRT ; PAR CES MOTIFS : 1. Déclare que la SNRT, éditrice du service télévisuel public « AL OULA », a enfreint les dispositions en vigueur, notamment celles relatives à la dignité humaine ; 2. Décide d'adresser un avertissement à la SNRT ; 3. Ordonne la notification de la présente décision à la SNRT, ainsi que sa publication au Bulletin Officiel ; Délibérée par le Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle - CSCA - lors de sa séance du 15 joumada II 1440 (21 février 2019), tenue au siège de la Haute Autorité de la Communication Audiovisuelle à Rabat, où siégeaient Madame Latifa Akharbach, Présidente, Mesdames et Messieurs Narjis Rerhaye, Jaafar Kansoussi, Ali Bakkali Hassani, Abdelkader Chaui Ludie, Fatima Baroudi, Khalil El Alami Idrissi, Badia Erradi et Mohammed El Maazouz, Membres. Pour le Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle, La Présidente Latifa Akharbach".