La prolifération des "informations fallacieuses", favorisée par la montée en puissance des réseaux sociaux, impose aux journalistes de s'attacher plus que jamais aux principes d'éthique et de professionnalisme, ont souligné, vendredi 19 octobre à Rabat, les participants à un panel sur le “Fact-Checking” organisé dans le cadre du 1er Forum des directeurs de l'information des agences de presse africaines. Intervenant lors de ce panel, la directrice de l'Information de 2M, Samira Sitail, a déconstruit le mythe du journalisme citoyen, regrettant qu'à notre époque, un citoyen, qu'il soit éduqué ou pas, est à même d'indisposer un homme politique ou un décideur économique par une simple vidéo non vérifiée. “Face à ce genre de phénomène, il n'y a qu'une seule réponse, c'est l'éthique et le professionnalisme”, a-t-elle affirmé, rappelant que le fact-checking a été inventé par les médias anglo-saxons pour “crédibiliser leur travail face aux pouvoirs en place”. “Le fact-checking n'est pas un nouveau genre journalistique. C'est une manière d'exercer le journalisme, de prendre les précautions nécessaires pour ceux qui souhaitent faire de la presse sérieuse”, a-t-elle poursuivi, et ce au moment où les réseaux sociaux sont devenus le “miroir déformant” de l'information. Dans cette même veine, la directrice de publication du magazine TelQuel, Aicha Akalay, a fait observer qu'à l'origine, le fact-checking était destiné à vérifier la parole politique. Avec les réseaux sociaux, a-t-elle confié, ce concept a englobé toutes les informations majeures, notamment les fake news. Or, a fait remarquer Mme Akalay, “fact-checker nécessite une vérification instantanée que les médias ne peuvent pas faire de manière aisée”, regrettant le manque de moyens dont disposent les médias traditionnels pour faire face aux fausses informations. “Il y a une proportion beaucoup plus importante de gens qui diffusent de fausses informations que de citoyens honnêtes”, a-t-elle estimé, avouant que “face à ça, nous autres médias, sommes assez démunis”. De son côté, l'expert en médias et contenus des organisations, Mohamed Douyeb, s'est interrogé sur le rôle des journalistes contemporains, se demandant s'ils allaient se transformer en des “vérificateurs plutôt que des rapporteurs d'information”. Les "informations fallacieuses" ou comme certains aiment qualifiées de "fake news" sont un phénomène complexe qui ne concerne pas que les médias et qui engage la responsabilité morale et politique de tous, a fait savoir M. Douyeb, ajoutant que “les médias sont une cible facile”. A cet égard, M. Douyeb a plaidé en faveur de l'éducation aux médias, que ce soit au niveau de l'école, de la politique ou de la société civile. Les directeurs de l'information et Rédacteurs en chef des agences de presse africaines, réunis en conclave vendredi à Rabat, ont décidé la création du Forum des Directeurs de l'Information des Agences africaines de presse (FDIAAP). Créé à l'issue des travaux du 1er Forum des directeurs de l'information des agences de presse africaines (17-19 octobre) sous le thème “Les défis de la gestion d'une Newsroom”, le FDIAAP a pour objectif de promouvoir l'échange d'expériences et de données ainsi que le partage des compétences entre ses membres dans tous les domaines d'intérêt commun, notamment dans les domaines de l'information, la formation et le multimédia. Ce Forum, affilié à la Fédération Atlantique des Agences de Presse Africaines (FAAPA), ambitionne aussi d'organiser des séminaires et symposiums thématiques sous la houlette de la FAAPA et en partenariat avec des organismes et institutions à l'échelle africaine et internationale. Il aspire également à devenir une force de proposition pour contribuer au rayonnement des agences membres de la FAAPA, tout en contribuant au développement de la circulation de l'information. Il s'agit, en outre, de participer aux rencontres, séminaires et conférences organisés aussi bien à l'échelle africaine qu'internationale, et d'élaborer des études dans le domaine de la presse et de l'information à la demande de la FAAPA ou de l'un de ses membres et partenaires. Le FDIAAP exerce son action grâce au concours actif de ses membres qui apportent leur soutien et leurs compétences. Il peut s'assurer, en cas de besoin, le concours d'experts ou d'organismes qui lui sont extérieurs. A cet effet, les membres du Forum ont élu un comité chargé de la coordination et de la communication. L'annonce de la création de FDIAAP a eu lieu à l'issue de trois jours de travaux intenses du 1er Forum du genre organisé par la FAAPA et qui s'est articulé autour de plusieurs sujets, notamment “L'usage des réseaux sociaux”, “La numérisation de la production”, “La programmation éditoriale”, “Le fact checking” et “La motivation et l'évaluation”. Ces sujets ont été débattus dans le cadre de plusieurs panels par une pléiade de journalistes et de responsables, ainsi que de directeurs de l'information de plusieurs agences de presse africaines et internationales et d'autres médias (journaux, journaux électroniques, magazines …).