Sélectionné pour représenter le Maroc dans plusieurs festivals internationaux, le cinquième long-métrage du cinéaste aux multiples casquettes Hicham Lasri sort aujourd'hui dans les salles de cinéma. Headbang Lullaby est une sorte de comédie absurde qui raconte une période terrible de l'Histoire du Maroc. 2M.ma a assisté à sa projection en avant-première. Pour Hicham Lasri, ce dernier long-métrage est : "un western où il n y a pas d'indiens, pas de méchants mais juste des gens qui attendent ". Un résumé de prime abord pas très engageant mais qui laisse entrevoir toute la place du rêve et de la réflexion laissée intentionnellement par le réalisateur au spectateur. Headbang, Lullaby et le reste ... Dans Headbang Lullaby, il est question de coup sur la tête, de berceuse, pour le reste allez savoir! Car cela se passe dans la tête de Hicham Lasri, ce réalisateur qui incarne la nouvelle vague du cinéma marocain. Le cinquième long-métrage de ce cinéaste pléthorique, est un film qu'il faut regarder comme une toile abstraite qui nous happera le temps qu'on la contemplera. Le film est un voyage dans un Maroc qui ressemble aux Maroc des années 80 sans vraiment l'être. Réinventer des univers et des personnages c'est le jeu auquel s'est adonné le réalisateur dans ce film. Headbang Lullaby est un voyage qui nous fige dans une journée mais pas n'importe laquelle: le jour mémorable de la victoire du Maroc contre le Portugal en cette journée de juin 1986. C'est un voyage fait de bouts d'histoires, tissées au gré d'un Hicham Lasri désinvolte, avec un seul fil conducteur: le policier. Un policier et un pont ... Car dans Headbang Lulluby, il ne s'agit pas que de coup sur la tête et de berceuse mais aussi d'un policier, Daoud , qui a reçu l'ordre d'aller surveiller un pont sous lequel le roi Hassan II pourrait passer dans la journée. En cette journée caniculaire, Daoud pense à sa vie où rien ne va plus avec sa femme. C'est un homme triste au visage figé à coups de malheurs et la tête engourdie de lourds secrets. Le pont, se trouve quelque part au Maroc où il ne fait pas ostensiblement bon vivre. Un pont coupé au milieu par une ligne jaune dont les rambardes sont ornées de bouts de bandes de VHS et de vieilles tongs (oui nous sommes dans l'imaginaire très fertile de Hicham Lasri). La ligne jaune marque la frontière entre deux Douars frères-ennemis, entre lesquels Daoud fera des va-et-vient durant cette longue journée sans fin. Un monde imaginaire entre le tragique et le burlesque Daoud n'est pas seul, il est accompagné de Larbi, un agent de sécurité qui se fera blesser et qui sera évacué à l'un des deux Douars. Sur ce pont poussiéreux niché quelque part dans un Maroc aride, Daoud voit passer le vieil homme au cheval blanc, le jeune garçon qui scande le commentaire du match, l'énorme jeune femme qui lui tape dans l'œil ...etc. Daoud rencontrera aussi quelques-uns des habitants du village, dont la voisine curieuse et indiscrète, la femme aux tresses qui parle amazighe dont l'époux a été enlevé par le Makhzen. Daoud ira voir Larbi qui reçoit les premiers soins (pas n'importe lesquels) dans la maison de Draoui dont le fils Reddad est absent à cause encore du Makhzen. Nous sommes bien dans les années de plomb. Un film pluriel qui se laisse regarder Tous les personnages du film se surpassent dans l'absurde tout en nous attirant dans un monde imaginaire qui oscille entre le tragique et le burlesque. Des personnages portés par des acteurs qui n'ont plus rien à démontrer tels que Aziz Hattab ou encore Latéfa Ahrare pour ne citer qu'eux. Dans Hedbang Lulluby, tout est dit dans le second degré, un langage omniprésent dans le cinéma de Hicham Lasri et cher au cinéaste malgré ses détracteurs. Un film qu'on ne peut pas spoiler El allant regarder ce long-métrage, il ne faut surtout pas s'attendre à regarder une histoire et il ne faut en aucun cas rechercher une intrigue. Impossible de le spoiler même en décrivant tous ses personnages. Le film ne peut pas être réduit à une simple histoire car il est pluriel par ses bouts d'histoires, ses multiples personnages et des pans de mémoire de son réalisateur. Hedbang Lulluby fait partie de ces films qu'ou bien on adore ou bien on déteste ! C'est un long-métrage qui se laisse regarder en nous plongeant doucement, parfois avec le sourire, dans le Maroc des années 80 et son Histoire, et ce, sans jugements ni indignation.