L'interdiction du port du voile islamique intégral dans les lieux publics en Autriche, votée en mai dernier par le parlement dans le cadre d'une loi sur l'intégration, est entrée en vigueur ce dimanche. Toute violation de cette mesure controversée est passible d'une amende fixée à 150 euros. Le texte de loi a été élaboré par le ministre de l'Europe, de l'Intégration et des Affaires étrangères, Sebastian Kurz (ÖVP-conservateur), pressenti comme le prochain chancelier à l'issue des législatives anticipées le 15 octobre, et ce, en collaboration avec la secrétaire d'Etat à la Diversité, aux services publics et au numérique, Muna Duzdar, membre du parti social-démocrate, d'origine palestinienne. M. Kurz, qui avait été le premier à annoncer ce projet de loi début janvier dernier, avait dans un premier temps indiqué que le port du foulard islamique sera interdit uniquement aux fonctionnaires, précisant, en revanche, que les croix chrétiennes dans les établissements scolaires ne seront pas retirées pour des raisons de ''culture historique''. Mais bien avant l'adoption de cette loi, un sit-in contre cette mesure de la communauté musulmane résidant en Autriche a été organisé en février dernier devant les sièges de la Chancellerie et de la Présidence. Un rassemblement d'environ un millier de manifestants, dont un grand nombre de femmes et de filles voilées, et quelques-unes seulement portant le voile intégral, qui avaient dénoncé la prohibition du voile, appelant au respect des droits des minorités. Une interdiction qui risque d'exacerber les tensions entre les nationaux et les musulmans et de favoriser l'islamophobie, selon Tarafa Baghajati, président de l'initiative des musulmans autrichiens et responsable pédagogique au sein de la communauté des musulmans d'Autriche (IGGIÖ), principale association représentant les musulmans en Autriche. ‘'Tout en étant contre le voile islamique intégral (Niqab) dont le port n'est pas une obligation coranique, la communauté des musulmans d'Autriche s'oppose fermement à cette loi liberticide qui interdit cet habit sous peine d'une amende, surtout pour les touristes venant des pays du Golfe car les femmes qui portent le voile ici ne que quelques dizaines'', a-t-il affirmé dans une déclaration à la MAP. Pour ce responsable religieux d'origine syrienne qui réside en Autriche depuis 1986, cette interdiction ne devrait pas avoir lieu car la loi permet déjà aux policiers de pouvoir voir le visage dissimulé des personnes voilées en cas de vérification d'identité. Il proteste aussi au nom de l'IGGIÖ, association dirigée depuis plus d'une année par Ibrahim Olgun, un jeune turc de 30 ans, contre le fait d'inscrire cette interdiction dans le cadre d'une loi d'intégration destinée à assurer une meilleure intégration des demandeurs d'asile dans la société autrichienne, selon le gouvernement autrichien. M. Baghajati note enfin que cette interdiction du voile intégral dans les lieux publics a suscité également l'opposition de nombreux acteurs politiques et associatifs en Autriche, saluant surtout la position du président autrichien, Alexander Van der Bellen qui a jugé que ce texte ‘'n'est pas une bonne loi'' tout en exprimant sa solidarité avec les musulmanes voilées contre toutes les formes de discrimination et de stigmatisation. Cela dit, ce ne sont pas seulement les musulmans qui protestent contre cette interdiction, les professionnels autrichiens du tourisme et de l'hôtellerie s'y opposent également, redoutant une diminution du nombre des touristes en provenance des pays arabes, notamment de la région du Golfe.