Le soutien américain à une levée des brevets sur les vaccins contre le Covid-19 a suscité de l'intérêt à travers le monde mais certains comme les Européens parlent plutôt de discuter d'une telle mesure que de l'appuyer, tandis que l'industrie pharmaceutique freine des quatre fers. Washington a annoncé mercredi soutenir la levée des protections de propriété intellectuelle sur les vaccins contre le Covid-19, afin d'en accélérer la production et la distribution, et participer "activement" aux négociations menées en ce sens à l'Organisation mondiale du commerce (OMC). La patronne de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) Ngozi Okonjo-Iweala a ainsi « chaleureusement » salué jeudi l'annonce faite la veille à ce sujet par les Etats-Unis. Elle a dans le même temps encouragé l'Inde et l'Afrique du Sud, à l'origine de cette proposition destinée à accélérer la production et la distribution des vaccins, à rapidement présenter un texte révisé, plus acceptable par tous. Emboîtant le pas au chef de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), Tedros Adhanom Ghebreyesus, qui avait parlé mercredi d'une « décision historique », s'est à son tour réjoui de cette initiative, qui « peut augmenter de manière importante l'approvisionnement du système Covax » de partage des vaccins avec les pays pauvres. Tous s'exprimaient après les déclarations la représentante américaine au Commerce Katherine Tai, selon laquelle, « pour mettre fin à cette pandémie, (le gouvernement américain) soutient la levée » provisoire de ces brevets. La Russie, qui vient d'homologuer le Spoutnik Light, son vaccin contre le coronavirus en une seule dose, « soutiendrait une telle approche », a assuré son président, Vladimir Poutine. Jusqu'ici réticent, son homologue français Emmanuel Macron s'y est finalement également dit « tout à fait favorable ». Pour l'Union africaine, « l'histoire se souviendra de la décision prise par le gouvernement américain comme étant la bonne chose au bon moment pour combattre ce défi terrible ». La position américaine pour une levée des brevets sur les vaccins anti-Covid constitue "une remarquable expression de leadership", a déclaré jeudi le directeur du Centre de contrôle et de prévention des maladies du continent (Africa CDC), qui dépend de l'Union africaine (UA). Les réactions étaient toutefois plus nuancées du côté de l'Union européenne, jusqu'ici hostile à pareille initiative, mais qui s'est dite, par la voix de la présidente de la Commission Ursula von der Leyen, « prête à discuter de toute proposition qui s'attaquerait à la crise de façon efficace et pragmatique ». « La protection de la propriété intellectuelle est la source de l'innovation et doit continuer à l'avenir à le rester », a en revanche mis en garde Berlin. Plus tranchante, la Suisse, où l'industrie pharmaceutique pèse lourd, a averti qu'une suspension de brevets ne ferait rien pour « un accès équitable, abordable et rapide aux vaccins, médicaments et produits de diagnostic contre le Covid-19 ». Pour l'heure, les brevets sont essentiellement détenus par des laboratoires américains globalement opposés à leur levée qui les priverait, selon eux, d'un retour sur des investissements coûteux. L'annonce de Washington a d'ailleurs été qualifiée de « décevante » par la Fédération internationale de l'industrie pharmaceutique (IFPMA), qui a déploré une « réponse simple mais fausse à un problème complexe ». Sur l'ensemble de la planète, le Covid-19 a fait plus de 3,2 millions de morts et contaminé plus de 155 millions de personnes depuis fin 2019.