Généralisation de l'assurance maladie obligatoire de base, des allocations familiales et de l'indemnité pour perte d'emploi, élargissement de l'assiette des adhérents aux régimes de retraite... Le chantier de généralisation de la protection sociale est "une révolution au niveau social et sociétal au Maroc", et "tous les ingrédients sont là pour le mener à bien", estime l'économiste Taib Aisse. Dans des déclarations accordées à 2M.ma, l'expert explique pourquoi la mise en oeuvre de ce chantier est-elle essentielle et donne des éclaircissements autour de ses différents impacts sur la vie des marocains. "Au Maroc comme dans le monde entier, il existe deux systèmes majeurs, si l'on peut dire, de protection sociale. Le premier est traditionnel, celui de la grande famille ou de la tribu, qui peut assister la personne en cas de besoin, de problèmes de santé, de dettes, etc", explique l'expert à 2M.ma. Au fil du temps, ce "filet de sauvetage" traditionnel, très sollicité par les marocains, a perdu de son efficacité, voire s'est brisé, avec la modernisation. "Les gens se sont installés dans les grandes villes où la logique de tribu et de la grande famille s'est dissipée, laissant place aux filets sociaux modernes comme la sécurité sociale", poursuit M. Aisse. Cependant, Au Maroc, ce filet social moderne a accusé un retard dans sa généralisation, l'accès aux mécanismes de protection sociale (retraite, assurance maladie, etc.) étant resté restreint aux fonctionnaires de l'Etat et à une partie des salariés du secteur privé, "ce qui représente une très faible portion des personnes actives sur le marché du travail", illustre l'analyste. L'avènement de la pandémie de nouveau coronavirus a d'autant plus montré à quel point la mise en oeuvre de ce chantier était pressante, estime l'analyste. "La pandémie a mis à nu cette vulnérabilité des marocains par rapport à la couverture médicale et à la protection sociale. Il était urgent de répondre à cette situation", fait-il ressortir. Parmi les constats également observés durant cette pandémie, M. Aisse cite l'importance du poids du secteur informel. "Le nombre des bénéficiaires des aides financières pour les ménages opérant dans l'informel, estimé à près de 4,3 millions de familles, est révélateur. En plus de sa taille, le secteur informel a été à l'origine de plusieurs drames. Les personnes qu s'y activent travaillent dans l'insécurité et la vulnérabilité absolue, et il fallait apporter des réponses à leur situation et qu'ils aient au moins accès à la couverture sociale et médicale", souligne l'expert. Ainsi, ce projet vient pallier ces manquements mais également soutenir, sur tous ses axes, le pouvoir d'achat des marocains. "Le premier souci financier de la famille marocaine est la santé. Face au coût exorbitant de certaines opérations chirurgicales, toute la famille peut se retrouver au bord de la faillite. Quand on allège ce fardeau, on augmente ipso facto le pouvoir d'achat des ménages", estime M. Aisse. Il y va de même pour les allocations familiales, "un appui au pouvoir d'achat des familles mais aussi un droit des enfants auquel l'Etat doit subvenir", selon l'expert, . Et à M. Aisse de rappeler le rôle important que jouera le régime de la Contribution Professionnelle Unique (CPU), qui a suppléé le régime fiscal forfaitaire, dans ce chantier. "La CPU est un régime fiscal amélioré qui inclut une contribution des professionnels à la couverture sociale et médicale, ce qui jette les bases de la réussite du chantier de la généralisation de la protection sociale en incluant une large frange de professions". En conclusion, l'expert se dit convaincu que la généralisation de la protection sociale est "un chantier qui doit réussir à tout prix et tous les ingrédients sont là pour le mener à bien", et affiche sa confiance dans l'expertise des institutions nationales concernées. "La volonté politique est là, et toutes les institutions sont mobilisées. Les organismes de prévoyance et de protection sociale, pour ne citer que la CNSS ou la CNOPS, sont bien structurés et expérimentés. Nos institutions ont l'expérience, les outils et les mécanismes nécessaires pour ce faire", conclut-il. * Généralisation de la protection sociale: SM le Roi préside à Fès la cérémonie de lancement du projet