L'expérience de la mobilisation médiatique contre la pandémie de la covid-19 constitue un acquis professionnel et une somme d'enseignements et de bonnes pratiques qui pourraient être développés et promus au-delà du contexte particulier de la crise actuelle, souligne un rapport du Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle (CSCA). Cette expérience permettra de renforcer le potentiel et les capacités de l'audiovisuel national à contribuer à la gestion des crises, ce qui nécessite le développement des ressources économiques et logistiques ainsi que la consolidation des aptitudes professionnelles des médias publics et privés, relève le document relatif au traitement médiatique réservé à la crise de la COVID 19 par 24 services radiophoniques et télévisuels, publics et privés. Le document, adopté le 28 juillet lors d'une réunion du CSCA, a fait le constat d'un effort d'ajustement quantitatif inédit dans les grilles de programmes des différentes radios et des chaines de télévision, faisant savoir que le renforcement programmatique orienté vers le traitement de la thématique des contraintes inhérentes à l'état d'urgence sanitaire s'est caractérisé par le fait que 50% de la grille de référence quotidienne de l'ensemble des services radiophoniques et télévisuels ont été consacrés à des contenus en rapport avec la COVID-19, indique jeudi un communiqué de la Haute Autorité de la communication audiovisuelle (HACA) parvenu à 2M.ma. Cette réactivité médiatique est également illustrée par la création de programmes spécifiques traitant des différents aspects de la crise pandémique. Ces nouveaux programmes ont représenté plus de 33% du volume horaire, les 77% restants étant composés des émissions habituelles programmées avant la crise, selon la même source. En outre, le CSCA a relevé que la couverture radiophonique et télévisuelle de la pandémie s'est distinguée par un renforcement de l'interactivité et de l'offre de contenus de proximité, notant que la perspective citoyenne a été reflétée par l'ensemble des radios et télévisions bien qu'à des niveaux différents, dans un moment médiatique resté dominé par un recours massif aux spécialistes dans les domaines médical et académique. Le citoyen a ainsi été sollicité par toutes les rédactions. Il lui a été parfois possible d'envoyer ses propres vidéos. De même qu'il a été en mesure d'exprimer ses interrogations, ses attentes et son ressenti par rapport aux différentes dimensions de la crise pandémique, a poursuivi la même source. Selon le rapport, l'effort de proximité a été très perceptible au niveau de la langue de communication à travers par exemple l'usage de la darija y compris dans les journaux télévisés et parlés ou la présentation de programmes spécifiques en arabe dialectal. L'utilisation par les médecins et les spécialistes sollicités par les radios et télévisions d'un vocabulaire simplifié et d'une narration illustrée d'exemples et de données accessibles au grand public est apparue parfois comme un réel effort de vulgarisation scientifique, a souligné le Conseil, ajoutant que le ciblage des différentes catégories du public a aussi participé au renforcement de l'offre de proximité dans les contenus médiatiques diffusés au cours de la période de confinement notamment. Un intérêt particulier a été aussi accordé par la majorité des radios et télévisions à la situation des Marocains résidant à l'étranger face à la pandémie du covid-19, qui ont pu relater leur expérience du confinement, de l'urgence sanitaire, des conséquences sociales et économiques de la crise sanitaire, etc. Par ailleurs, le suivi de la couverture et du traitement médiatiques consacrés par les radios et télévisions à la question de la pandémie a permis de faire le constat d'une réelle complémentarité entre l'action du service public de l'audiovisuel et l'effort d'information et de sensibilisation déployé par les opérateurs privés dans un contexte d'urgence sanitaire. L'étude réalisée par les équipes de la HACA montre l'effort global (capsules, émissions informatives, programmes interactifs…), de sensibilisation au danger de la pandémie, de préconisation des comportements-barrière et d'explication du phénomène pandémique s'est « équitablement » réparti entre les secteurs public et privé de l'audiovisuel. L'un des faits marquants relevé par le rapport concernant le traitement médiatique de la question de la covid-19 est l'usage significatif fait par les radios et les chaines de télévision, publiques et privées, des possibilités de communication offertes par les plateformes digitales et les réseaux sociaux, a indiqué le communiqué, notant que cette ouverture numérique a permis de prolonger l'effet mobilisateur des programmes audiovisuels mis en place par les radios et télévisions notamment à l'attention des jeunes. Lors de la même réunion, le Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle a émis des observations et a recommandé davantage d'efforts et de vigilance en matière de traitement médiatique des différentes dimensions et répercussions de la crise pandémique. Se fondant à la fois sur le principe du respect de la liberté éditoriale des opérateurs audiovisuels et sur le droit du citoyen à l'information, le Conseil Supérieur a ainsi émis un certain nombre de remarques dont notamment un décalage entre le discours de l'expertise médicale et celui de l'action politique, syndicale et associative. L'analyse des différents passages à l'antenne a montré une faible représentation des acteurs politiques, syndicaux et associatifs parmi ces personnalités publiques intervenues sur les ondes des radios ou à l'antenne des télévisions, a signalé le communiqué, faisant savoir que les représentants de l'administration et les intervenants des milieux médical, scientifique, et académique ont représenté un même pourcentage de 27% des intervenants alors que 21% et 13% des interventions ont été respectivement le fait d'acteurs politiques et de représentants des milieux professionnels. Une partie de ces résultats peut se justifier par les exigences de la première phase de la gestion de la pandémie où la communication devait mettre l'accent prioritairement sur les conseils sanitaires, les gestes-barrières et l'observance des règles du confinement. Mais dans un deuxième temps, un traitement médiatique élargi aux effets sociaux, économiques et politiques de la crise de la Covid-19, exigeait une plus grande ouverture des radios et des télévisions sur l'ensemble des acteurs publics, a relevé le Conseil. Une présence féminine inéquitable Le rapport fait, en outre, ressortir que la présence des personnalités féminines parmi l'ensemble des intervenants dans les magazines d'information analysés n'a pas dépassé la barre des 13%, estimant que cette représentation minorée est en déphasage avec la réalité des compétences féminines impliquées dans la chose publique et expertes dans les différents domaines en rapport avec la crise sanitaire. La sous-représentation des femmes parmi les personnalités publiques intervenues dans les programmes d'information ayant traité de la question de la covid-19 est aussi en dissonance avec le cadre référentiel édicté par la HACA en matière de garantie du pluralisme d'expression des courants de pensée et d'opinion dans les radios et les chaines de télévision, explique la même source, faisant observer que ce cadre référentiel prévoit expressément le principe d'équité de genre dans les programmes informatifs et la participation de la femme dans ces programmes quand il s'agit notamment de débats concernant les grandes questions d'intérêt public. Par ailleurs et ayant fait évoluer leur offre de programmes pour accompagner l'effort de mobilisation nationale contre la propagation de la covid-19, les radios et télévisions ont par mégarde omis de tenir compte du caractère anxiogène de la programmation « Covid-19 » sur les enfants et le jeune public en général, avertit la même source, relevant que les médias audiovisuels notamment publics, auraient pu mettre en place davantage de programmes adaptés à des enfants exposés aux effets psychologiques du confinement et surexposés aux médias classiques et numériques. Selon le rapport, les radios et les télévisions ont veillé à traiter les différentes dimensions de la crise sanitaire ainsi que ses nombreuses conséquences mais le rapport réalisé par la HACA a relevé que les perspectives économique et sociale ont été largement privilégiées dans ce traitement, au détriment des perspectives politique et culturelle. L'échantillon analysé par le rapport consiste en 6048 heures de diffusion en plus de 60 éditions de magazines d'information dédiés aux questions d'intérêt général programmés sur les services télévisuels publics généralistes (Al Aoula, 2M et Al Amazighia), entre le 1er mars et le 30 juin 2020. Ce rapport, fondé sur une double approche quantitative et qualitative, présente une série de données et formule des remarques significatives concernant les caractéristiques du traitement médiatique de la pandémie par les radios et les chaines de télévision nationales, tout en relevant certaines lacunes ayant grevé l'effort médiatique de veille et de mobilisation dédié à cette crise sans précédent.