Climat délétère dans le secteur automobile. A la veille de lorganisation par lAssociation des importateurs de véhicules au Maroc (AIVAM) du Salon de lautomobile, Auto Expo 2010, la tension entre importateurs est montée dun cran. Surtout depuis que le mouvement du nom de GIVET (Groupement des importateurs de véhicules pour léquité tarifaire) sest «radicalisé». Climat délétère dans le secteur automobile. A la veille de lorganisation par lAssociation des importateurs de véhicules au Maroc (AIVAM) du Salon de lautomobile, Auto Expo 2010, la tension entre importateurs est montée dun cran. Surtout depuis que le mouvement du nom de GIVET (Groupement des importateurs de véhicules pour léquité tarifaire) sest «radicalisé». Dabord très discret, se limitant à des sorties ponctuelles pour signifier son existence et, bien évidemment, donner écho favorable à ses revendications, le Givet vient dappuyer sur laccélérateur. Sa principale exigence : plus déquité tarifaire. Par rapport à quoi et à qui ? : coup dil dans le rétroviseur. A la faveur des accords de libre-échange signés par le Maroc avec lUnion européenne, les importateurs de véhicules en provenance dEurope bénéficient, depuis 2003, du processus de démantèlement tarifaire, avec notamment une baisse progressive des taux de droits de douane. En cela, les taux de droits de douane applicables aux importations de véhicules particuliers en provenance dEurope, qui étaient de 32,5% en 2002, suivent depuis lors un trend baissier pour sétablir actuellement à 6,5%. En 2011, ils devraient se situer à 3,2%, avant un démantèlement total en 2012. A linverse, les modèles dits non-européens importés au Maroc ne sont pas soumis au même régime douanier, même sils bénéficient, eux aussi, par la «bienveillance» de lEtat, dun système dégressif. Il leur est ainsi appliqué un taux de droits de douane de 27,5% pour 2009-2010, lequel devrait passer à 25% en 2011, puis 17,5% en 2012. Aujourdhui, le GIVET, principalement par la voix de son porte-drapeau, Adil Bennani, Directeur général de Toyota du Maroc, ne réclame point une égalité tarifaire parfaite, mais que le taux de droits de douane appliqué aux modèles non-européens soit au moins ramené à 10%. Voilà pour les faits. Est-il légitime pour le GIVET de réclamer une certaine équité tarifaire ? Bien évidemment. Cest son droit, sil sestime lésé. Mais lintérêt dun groupement, quel que soit son domaine dactivité, doit-il primer sur lintérêt national ? A lévidence non. Et cest justement à ce niveau quil faut élever le débat. Lequel ne saurait se confiner à une revendication, voire une polémique sectorielle, puisquen toile de fond cest laccord de libre-échange Maroc Union européenne qui est pointé du doigt. Un accord global qui touche plusieurs pans importants de léconomie nationale, dont les avantages ne reviennent guère exclusivement aux seuls importateurs de véhicules en provenance dEurope. Peut-on donc reprocher à ces derniers de profiter de la politique douverture et de dynamisation de léconomie nationale prônée par le gouvernement marocain ? Certainement pas. Sur ce registre dailleurs, les propos de Ahmed Reda Chami, ministre du Commerce, de lIndustrie et des Nouvelles technologies, sont sans équivoques : «Il ny a pas de volonté de favoriser les uns par rapport aux autres. Il y a une logique économique : nous avons signé des ALE avec certaines régions du monde. Ces ALE nous obligent à diminuer nos droits de douane sur certains produits et, en contrepartie, ces pays diminuent aussi leurs droits de douane pour certains de nos produits. Aujourdhui, les véhicules européens pénètrent le territoire marocain avec des droits de douane avantageux, et le Maroc aussi introduit ses produits de textile, dhabillement, déquipements et dagro-industrie avec des droits de douane avantageux. Nous ne sommes donc pas dans la même logique notamment avec les pays asiatiques. Si demain nous sommes avec eux dans la même configuration, je serais heureux de voir appliquer des droits de douane avantageux de part et dautre». Mieux, Chami suggère même une solution : «Jencourage les importateurs marocains de véhicules asiatiques à inciter les constructeurs à créer des sites de production au Maroc, ce qui leur permettra de vendre sur le marché marocain à zéro droits de douane et dexporter vers lEurope et les USA à des prix préférentiels». Des propos clairs pour qui sait lire. Que se refuse manifestement à entendre le GIVET. Démantèlement : qui en profite ? Le débat, tel quil est posé actuellement, peut porter à confusion et induire lopinion publique en erreur. Car, il ne doit pas être posé en terme de marques (européennes ou non-européennes), mais plutôt en terme de zone (ou lieu) de production et de provenance. Cela pour dire quimporte la marque de la voiture, cest bien sa provenance qui déterminera le taux de droits de douane qui lui est applicable. Une voiture asiatique importée dEurope bénéficiera donc du même régime douanier quun véhicule européen à condition de remplir les conditions dorigine prévues par laccord. En clarifiant ce point, cela fait, au bout du compte, une sacrée différence. Simplement parce que les multiples marques asiatiques importées au Maroc ne proviennent pas toutes dAsie. Selon les statistiques disponibles, le marché automobile marocain est constitué denviron 30% de véhicules fabriqués au Maroc, 35% de voitures importées de lUnion européenne et 35% de véhicules importés dautres pays. Des statistiques qui suscitent une interrogation majeure : parmi les 35% de véhicules importés de lUE, quelle est la proportion de marques asiatiques bénéficiant de fait des avantages accordés par laccord de libre-échange Maroc Union européenne ? On ne saurait le dire. Et à la lecture de cette configuration, on ne peut soutenir quune chose : cest un marché assez équilibré dont la structure ne reflète certainement pas lavantage du démantèlement tarifaire quont les importateurs de véhicules en provenance dEurope. Un avantage qui, il faut lavouer, a été quelque peu rogné par lenvolée de lEuro, au moment où ceux qui importaient dAsie bénéficiaient de la baisse du Dollar et du Yen. Pour dire que malgré les droits de douane qui leur sont appliqués, les véhicules en provenance dAsie restent assez compétitifs, quand bien même il faut reconnaître quils peuvent lêtre encore plus. Et, manifestement, la réalité induite par le démantèlement tarifaire naura jamais été un frein à limportation de voitures en provenance dAsie. Bien au contraire, ces dernières années auront été marquées par la multiplication des importateurs proposant différentes marques dorigine asiatique, dont beaucoup ont pu se faire une place dans le paysage automobile marocain. Cela dit, au-delà des droits de douane, cest plutôt lapprovisionnement qui semble être une contrainte de taille pour certains importateurs. Disposent-ils concrètement dune autonomie suffisante dans la définition de leur politique dapprovisionnement ? Cest là toute la question. Enfin, est-il bon de préciser que «lintérêt du consommateur» ne doit guère être utilisé comme bouclier, voire comme faux prétexte pour légitimer un quelconque combat. La diminution des droits de douane (80% depuis 2002) a-t-elle été intégralement répercutée sur les prix de vente des véhicules importés dEurope ? Je ne pense pas. La baisse des droits de douane sur les modèles non-européens importés au Maroc sera-t-elle entièrement répercutée sur les prix de vente ? Je ne pense pas. Quoi quon puisse dire, tous les importateurs sont avant tout des entreprises commerciales. Qui sont mues par une seule chose : le profit. Et lAivam dans tout ça ? LAssociation des importateurs de véhicules au Maroc résistera-t-elle à cette crise naissante ? Difficile de le dire. En tout cas, son mutisme en dit long sur cette situation délicate. Délicate parce que justement tous les importateurs de véhicules, quils proviennent dEurope ou non, sont des membres de lAssociation. Des membres qui, hier, avaient des vues convergentes en ce qui concerne la mobilité des personnes, ont, aujourdhui, des intérêts particuliers foncièrement divergents. Peut-on siéger autour dune même association quand les priorités des uns sont des désavantages concurrentiels pour dautres ? Le co-voiturage Aivam Givet résistera-t-il à cette crise qui sannonce ? Surtout, le combat que mène actuellement le GIVET ne devait-il pas être plutôt porté par lAivam censée défendre les intérêts de toute la profession ? De toute évidence, de la capacité de lAvaim à gérer cette situation incongrue dépendra son avenir. Pour sûr, la place du président de lAssociation, Mohamed Amal Guedira, également DG dAuto Nejma nest pas à envier : il commercialise à la fois des véhicules de marques européennes et non-européennes.