* A sa nomination, il jouissait dun préjugé défavorable. * Un an après, a-t-il réellement convaincu ? Cela fait maintenant un an quAbbas El Fassi est à la tête du gouvernement marocain. Un premier anniversaire que le locataire de la Primature a choisi de «fêter» à sa manière en dressant le bilan de ses réalisations dans les principaux secteurs économiques du pays. Histoire de mettre bien au fait lopinion publique des actes quil a posés depuis maintenant une année. Ainsi, selon le mini-rapport rendu public, lagriculture dispose dune meilleure visibilité, notamment grâce à la mise en place du Plan Vert élaboré et linitiation dun partenariat public-privé autour des terres de la Sodea-Sogeta. De même, dans le domaine de la pêche, la primature revendique le déploiement du plan de mise à niveau et de modernisation du secteur, «Ibhar», lequel bénéficiera dune enveloppe globale de 5 milliards de dirhams. Tout autant, en tant que secteur stratégique de léconomie nationale, le tourisme «bénéficie du soutien politique du gouvernement», lequel veut porter la capacité daccueil de 150.000 à 265.000 lits à lhorizon 2012, permettant ainsi la création de plus de 80.000 emplois directs tout en portant les recettes du secteur de 60 à 90 milliards de DH. Sur le sillage des actions à mettre à lactif du gouvernement Abbas El Fassi, le rapport note également les grands chantiers dinfrastructures, avec «des investissements jusque-là inégalés de quelque 111 milliards de DH (qui) seront opérés, au titre des engagements de lEtat et de la coopération internationale, dans un ensemble de grands projets structurants ( ) ». Le volet énergétique nest pas en reste, le gouvernement ayant «marqué au rang de ses engagements la mise en uvre dune stratégie visant la garantie de lapprovisionnement en énergie, la diversification de ses sources et le renforcement de lefficacité énergétique». Ce rapport a le mérite dexister, quand bien même il reste discutable à bien des égards. Comme en témoignent dailleurs les propos recueillis auprès de plusieurs fédérations et opérateurs économiques auxquels nous lavons soumis. Lesquels, certainement pour des raisons de convenance, se gardent bien de dire tout haut ce quils pensent réellement, surtout lorsquils sont à la tête de certaines fédérations. Leur analyse objective de la situation économique actuelle, ils ont préféré nous la livrer en «off». Cela pour dire que le bilan dAbbas El Fassi reste très controversé. Cette réserve affichée par les milieux daffaires est-elle pour autant étonnante ? Coup dil dans le rétroviseur. Préjugé défavorable Dès sa nomination à la tête de la Primature, des voix se sont soulevées (officieusement) pour remettre en cause les compétences de lhomme. Les observateurs étaient pour ainsi dire très sceptiques, et jamais un Premier ministre navait été autant controversé au Maroc. A peine nommé, et avant même quil nait eu à exercer officiellement ses nouvelles fonctions, il faisait lobjet de diatribes acerbes; les observateurs, les médias et les leaders dopinion rappelant au passage la rocambolesque affaire Annajat. Cest que lhomme navait pas eu, comme cela se fait dans toutes les démocraties, ne serait-ce quun délai de grâce pour être jugé sur ses actions et non pour ce quil est. Même si sa nomination a suivi la logique démocratique, il na pas eu droit, comme cela est de coutume, aux fameux 100 jours pour être «évalué». Sous ce rapport, Driss Jettou a été mieux loti, quand bien même, dès la formation de son gouvernement, les plus sceptiques fustigeaient son cabinet jugé pléthorique et très masculin où lIstiqlal et lUSFP avaient pignon sur rue et où siégeaient de nombreux rescapés de lancienne équipe dAbderrahmane Youssoufi, plusieurs rappelés et très peu de jeunes. Avec demblée une légitimité sujette à caution, Abbas El Fassi avait donc pour obligation de convoquer sa part de sagesse et de faire preuve de lucidité politique afin de mettre à son avantage toutes ces critiques dont il était la cible. Un an après, a-t-il vraiment pris acte de ce préjugé défavorable pour démontrer à ses détracteurs quil est à la hauteur de ses responsabilités, histoire, simplement, de terminer sa législature avec les honneurs ? Difficile de répondre par laffirmative. Car la plupart des réalisations dont fait état ce bilan sont des chantiers qui avaient déjà été fortement entamés par le gouvernement de son prédécesseur. Mieux, certains programmes, sils avaient suscité beaucoup despoir lors de leur élaboration, de par leur déclinaison actuelle, laissent maints opérateurs sur leur faim. Cest le cas de lagriculture, avec le Plan vert Maroc, et du plan «Ibhar» pour la pêche, secteurs où les opérateurs déplorent encore le manque de visibilité. Au niveau du tourisme, lobjectif des 10 millions de touristes définis dans la Vision 2010 est fortement compromis, voire hors de portée, tandis que le secteur énergétique est victime de sa dépendance de lextérieur, avec un gouvernement contraint de faire des acrobaties budgétaires au travers dune Caisse de compensation décriée. On fera léconomie de parler du système éducatif en déperdition, du chômage endémique, de la hausse du taux dinflation Alors, au final, après un an, le verdict est tombé : Abbas El Fassi na pas convaincu.