* La procédure d'expropriation peut se révéler quelquefois préjudiciable aux intérêts de l'Etat et des administrés. * Les indemnités varient selon plusieurs critères qui traduisent en fait un marché foncier mouvementé. Nul ne peut être contraint de céder sa propriété si ce n'est pour cause d'utilité publique et moyennant une juste et préalable indemnité». Ce principe fondamental du droit civil marocain a toujours trouvé sa limite chaque fois que la notion «d'utilité publique» apparaît. Une notion très élastique, parfois abusive mais toujours ayant un souci d'intérêt général. Il faut dire que le débat doctrinal sur la question n'a pas été clair. Que ce soit du point de vue de l'Etat où de celui des intérêts privés qu'il faut absolument sauvegarder. Dans le cas de l'expropriation, «l'utilité publique» est perçue comme une opportunité dont toute la collectivité, y compris celui qui va «perdre» son terrain ou son lotissement, va bénéficier. Cette logique administrative, qui est née en France, a fini par admettre toute une procédure d'expropriation applicable aussi au Maroc, afin de mieux garantir les droits des administrés. Mais il va falloir d'abord déterminer avec précision quels sont les critères qui permettent de dire que tel ou tel projet présente une utilité publique. Pour éviter toute confusion, la personne morale de droit public suffit pour donner à un projet déterminé un but d'intérêt général. C'est ainsi que l'utilité publique est reconnue aux espaces verts, zones industrielles, lotissements construits pour l'Etat, centres de loisir, barrages, routes la liste ne peut jamais être exhaustive. C'est pourquoi l'évolution jurisprudentielle au Maroc s'est intéressée surtout à porter une attention particulière aux dédommagements. C'est là un aspect très important de la procédure d'expropriation. Des dédommagements qui varient selon que les zones concernées par l'expropriation se situent dans un périmètre urbain, périurbain ou rural. Il faut remarquer que la déclaration d'utilité publique, qui informe le public des divers aspects du projet, peut faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir pour en obtenir l'annulation. Mais ce genre de recours est rarement bénéfique pour l'exproprié qui se voit «obligé» de demander par exemple à l'Administration de reporter sa décision ou faire un recours gracieux auprès des autorités administratives supérieures. La procédure de l'expropriation prévoit aussi la réalisation d'une enquête parcellaire pour bien déterminer l'étendue du champ de l'expropriation. C'est par le biais de cette délimitation que les terrains deviennent cessibles. Le juge chargé de suivre les étapes de l'expropriation fixe les indemnités. Le droit à indemnisation de l'exproprié s'ouvre automatiquement après «l'extinction des droits réels et personnels qui affectent le bien». Il faut dire aussi que si l'exproprié n'est pas satisfait de l'indemnité fixée au départ, il peut faire appel. Mais l'action en appel ne suspend pas le jugement rendu en première instance par le tribunal administratif. Une certaine coutume juridique s'est installée, à tort ou à raison, affirmant que les indemnités obtenues à l'amiable sont moins intéressantes que celles obtenues par voie contentieuse. D'un autre point de vue, les indemnisations sont étroitement liées à la bonne identification des terrains ; ce qui nécessite de disposer de documents graphiques et écrits. Une condition peu satisfaite et qui ne concerne que les terrains immatriculés. La sécurité foncière est également déterminante. Du moment que les documents consacrant les droits immobiliers n'ont pas une force juridique absolue lors des procès lents que les tribunaux marocains ont du mal à gérer. Il faut aussi souligner que la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique, telle qu'elle est comprise par les tribunaux et appliquée par l'Administration, peut se révéler préjudiciable aux intérêts publics. L'appropriation des sols est très coûteuse pour le Budget de l'Etat. D'autres formules peuvent en effet être imaginées afin de conclure une sorte de partenariat permettant aux propriétaires des terrains fonciers de participer aux projets. Surtout pour les terrains urbains qui sont la cible de fortes spéculations foncières.