Rusés comme ils sont, certains affiliés des caisses dassurance recourent à la fraude des frais de médication. Avec la complicité de certains praticiens, la fraude dans ce secteur est devenue une pratique tellement courante que, même sans la demander, les novices sont servis. Les branches les plus touchées sont les soins médicaux et les examens optiques. Eclaircissements. Tout commence par une consultation médicale chez un dermatologue de la place. En plus dun traitement pour des tâches brunes, une jeune patiente se voit prescrire un traitement pour son acné et un nettoyage de peau non couvert par lassurance maladie. Bien évidemment, avant de prescrire un traitement pour lacné, qui peut être très éprouvant pour le foie de la patiente, le médecin lui demande de faire des analyses. Jusque là, tout peut sembler normal. Mais, une fois lassistante du médecin entre en scène, le spectre de la fraude commence à planer. En effet, cette dernière, moyennant un billet de 20 DH propose à notre patiente de se diriger vers un labo du coin où lon gonfle les factures pour sassurer un remboursement total des frais engagés. Lassistante propose bien plus que cela. Ainsi, elle explique à la chère patiente que pour le nettoyage, qui coûte 400 DH non remboursables, elle peut indiquer sur la mutuelle quil sagit dun soin remboursable. Bien évidemment, la patiente naurait plus quà débourser 50 DH, tout au plus, à lassistante en guise de contrepartie de ce petit service. Bien sûr, le médecin, lui, est censé ne pas être au courant de tout ce qui se trame dans son cabinet, mais en est quelque peu responsable puisquil laisse, à son assistante, le soin de remplir une fiche de mutuelle. En labsence de son contrôle, le médecin encourage ainsi à falsifier les frais médicaux. Le lendemain, notre chère patiente se dirige vers le laboratoire où elle rencontre une employée. Une amie de lassistante du dermato. Elle lui tend un billet de 20 DH inséré dans la fiche à remplir. Comme convenu, la facture est gonflée pour que le taux remboursable par la mutuelle corresponde aux frais engagés par la patiente. Selon un dermato de la place, cette pratique est très courante. La raison en est simple: «les malades, pour qui les frais de médication demeurant chers surtout les soins de beauté non remboursables, préfèrent se soigner avec lidée de se voir rembourser la totalité des frais engagés. Pour les praticiens, ces facilités sont la garantie davoir toujours des patients», confirme ce dermato. Une fois lexamen fait et le traitement prescrit, notre patiente, prenant goût à la chose, sattend à des facilités de la part même de la pharmacie. La déception est au rendez-vous. Vraisemblablement, les pharmaciens ne sont pas tentés par cette pratique. Mais, rien nest moins sûr ! Des lunettes à moitié prix ! Autres lieux, mêmes murs. Cette fois-ci, on est chez un ophtalmologue. La salle est bondée de patients et même si on a pris rendez-vous à 10h, il faut faire la queue. Alors, pour gagner du temps, un billet de 20 DH est suffisamment convaincant pour ne pas attendre. Ici, il ny a aucun moyen ni façon de grignoter sur les frais de la visite pour être «bien remboursé» par la mutuelle. Mais, ne perdons pas espoir. Ce quon ne peut avoir chez lophtalmologue, on finit par le récupérer chez lopticien; nimporte quel opticien! Plusieurs personnes ayant fait leurs lunettes chez des opticiens de catégories différentes, affirment que les procédés sont les mêmes. Si lon prend lexemple dun salarié bien rémunéré, il ne sera remboursé quà hauteur de 300 DH sur le prix de la monture. Par contre, quel que soit le prix des verres, ce salarié en sera remboursé à hauteur de 80 %. Cet état de fait a donné la possibilité aux affiliés de reporter la différence du prix de la monture sur le prix des verres pour être sûrs dun remboursement maximum des frais. Ceci étant, et malgré cette facilité que peuvent proposer les opticiens à leurs clients, les prix diffèrent dun endroit à lautre. Ainsi, faire ses lunettes chez un opticien ayant pignon sur rue engendre des frais élevés puisque la monture ainsi que les verres coûtent cher. Par contre, si lon fait ses lunettes à Derb Ghallef, la différence des prix est de taille. La fraude reste la même mais avec un petit plus. Si une monture coûte 800 DH chez un opticien du centre ville, le même modèle est de seulement 400 à 500 DH à Derb Ghallef. Idem pour les verres. Alors pour débourser une somme moindre, de plus en plus de gens se dirigent vers Derb Ghallef. Si cette pratique permet aux affiliés de se payer des lunettes à moindre prix, cela ne garantit pas que lassurance est épargnée. Bien au contraire ! A Derb Ghallef comme au centre ville, la facture sera la même. Du coup, laffilié qui se dirige vers Derb Ghallef est non seulement remboursé en totalité, mais cest lassurance qui lui verse un plus. Les gens qui remplissent les fiches nont aucun état dâme. «Laffilié passe toute sa vie à cotiser, bon gré mal gré, alors que peuvent changer quelques centaines de DH de plus pour une assurance ?», avoue un assuré. Ce quon semble ignorer ici cest que, pour connaître les pertes exactes que subissent les assurances, ces quelques centaines de DH sont à multiplier par des milliers. Pour les soins dentaires, cest un peu la même chose. La facture, ou lestimation des soins généraux, est ramenée à un tel seuil que lassuré est sûr quant au remboursement entier des frais engagés. (suite page 36)