Voici quelques semaines, la Une d'un quotidien national paraissant à Casablanca, a défrayé la chronique. Le titre accroche qu'elle arborait demandait purement et simplement au Premier Ministre Driss Jettou, de partir, faute de résultats et de majorité. A la même période, un ténor de monde de la finance et des médias, en l'occurrence Othmane Benjelloun faisait l'objet d'une houleuse compagne médiatique de la part de certains journaux de la place. Une première remarque s'impose : au on ne s'ennuie guère dans une certaine partie de la presse marocaine. On est loin du paysage d'une presse paraissant dans d'autres contrée s du monde arabe où l'inodore et l'incolore le disputent à l'insipidité du propos. Second enseignement : Driss Jettou, majorité ou pas, pas ou peu de résultats, est toujours aux commandes du gouvernement. Le groupe Othmane Benjelloun, arbore une santé inégalée. On est dès lors en droit de s'interroger sur l'aptitude du journaliste à faire et défaire les gouvernements, à les bénir ou à les maudire, à pousser tel décideur ou tel autre à l'abdication.... ? Quels nouveaux rôles seraient ceux des journalistes dans la société marocaine aujourd'hui en pleine mutation ! Troisième enseignement : le cas Driss Basri se trouve ravivé par un tel évènement. Un constat est toutefois inévitable : dans ce cas précis, la presse s'est rebiffée en masse à la suite de la décision royale de démettre l'ancien ministre de l'intérieur de ses fonctions. La démarche dans le cas Jettou et Benjelloun est totalement différente : Sont pris à partie, un chef de gouvernement en exercice et bénéficiant du crédit des différents pouvoirs en place, et un magnat de la presse et de la finance au summum de sa gloire. Autant le cas Driss Basri recueillait l'unanimité ou presque de la presse, autant dans les cas précités, seuls quelques récalcitrants ont déclenché l'offensive. La seule prétention, diront certains journalistes adeptes de telles croisades, serait d'éclairer honnêtement et librement l'opinion publique marocaine ( c'est à dire nous autres !). Hors l'attitude de ces journalistes face au devenir et au positionnement de Driss Jettou et de Othmane Benjelloun a été jugée cavalière et largement décriée par leurs collègues opérant dans d'autres supports. Des éditorialistes se sont dits outrés par cette cabale/ complot perpétrée par d'autres journalistes à l'encontre d'hommes publics d'envergure. Les faiseurs de la presse ne seraient donc d'accord sur la teneur et les limites du rôle du journaliste dans la société. D'aucuns s'interrogeraient même si cela ne relevait pas de l'auto flagellation. Tirs croisés, informations inquiétantes, atmosphère de rumeurs, désinformation ...Les superlatifs n'ont pas manqué pour qualifier les journalistes/pourfendeurs de nos décideurs. Ces derniers ont déployé tous les instruments de « la communication de crise » pour gérer les sorties médiatiques qui leurs étaient hostiles. Eclairer l'opinion publique ( nous autres encore une fois ! ) a été dira-t-on, l'objectif principal des réactions en cascade des intéressées : point de presse, dîner de presse... Les représentants de la presse nationale et internationale ont été conviés à des démonstrations pour remettre leurs pendules à l'heure, discréditer la rumeur, battre en brèche les contres-vérités, les erreurs d'analyse et de vision. Se doter d'une meilleure visibilité, passe immanquablement par le truchement du monde de la presse. Les journalistes souffleraient-ils le chaud et le froid ? ne seraient-ils pas tout simplement à la merci d'un déficit d'information et de communication qui leur feraient surexploiter le gisement de la rumeur aux potentiels indéfinis et à l'effet amplificateur incontrôlable. Certains de nos décideurs pêcheraient en effet par défaut d'anticipation sur un étalage médiatique qui leur est défavorable. Dircoms et autres conseillers en relation presse continueraient à agir par copinage et par rafistolage au lieu de mettre en place de véritables stratégies de relations presse basées sur vraie mission de veille qui fait du journaliste un véritable partenaire dans l'élaboration de la stratégie de notoriété et d'image et non une simple courroie de transmission mobilisable à souhait. Le quatrième pouvoir dans certains se diraient détenteurs, biaiserait - il le rôle du journaliste informateur, formateur, vulgarisateur, éclaireur, la conscience des siens, la mémoire de son peuple, l'historien de l'instant présent ...?