* La grève a dévoilé les défaillances du système du transport routier. * Le Code de la route n'est qu'une partie des points noirs. * L'option pour d'autres moyens de transports urbains est nécessaire. Cest juste une trêve pour laisser place aux négociations. L'asphyxie de l'économie a été évitée de justesse. En l'absence de statistiques officielles, les dégâts semblent énormes, surtout pour certains secteurs comme l'agriculture, le BTP ou autre. Il aura fallu l'intervention du Premier ministre pour débloquer la situation. Driss Jettou a annoncé, à l'issue du Conseil de gouvernement tenu jeudi dernier, qu'il a pris note des revendications et des propositions des transporteurs et qu'il invite tout le monde à opter pour la voie des négociations. Le même scénario avec les dockers et les steevedores est répété, mais cette fois avec une grande ampleur. Karim Ghellab s'est trouvé dépassé par les événements et c'est la Primature qui prendra en charge le dossier. Le ministre de l'Equipement et du Transport a pu convaincre certains syndicats et représentants d'associations professionnelles de transporteurs du bien-fondé du nouveau Code de la circulation, mais une bonne partie des syndicalistes a exigé le retrait pur et simple de cette nouvelle réglementation avant toute démarche de dialogue. Mohamed Kabbaj, Wali de Casablanca, est resté jusqu'à une heure tardive pour convaincre les taximen casablancais de reprendre leur travail. Abdelhadi Samad, Président de l'Union générale des professionnels de taxis : «Nous avons accepté la proposition du Wali pour donner une chance au dialogue. Le Code de la route relève du ministère du Transport et non de celui de l'Intérieur. Le ministère de tutelle nous ignore. Ghellab négocie uniquement avec des syndicats qui lui sont dociles». Pour sa part, Abdallah Dahbi, du syndicat national des taxis, a indiqué que «si le gouvernement ne trouve pas de solution dans les délais annoncés, la prochaine grève sera illimitée». Le projet de Code de la route est calqué sur le modèle français, surtout pour les amendes. Nous n'avons au Maroc ni les moyens ni le pouvoir d'achat des Français et ni l'intégrité des agents verbalisateurs. Le ministère du Transport n'a fait aucun effort pour présenter un texte réaliste plus proche de la réalité marocaine. Tous les chauffeurs de taxi sont contre les accidents de la circulation. Le volet juridique n'est qu'une partie de l'ensemble des problèmes à résoudre». En effet, la crise qu'a connue le secteur du transport a montré ses défaillances sur tous les plans. L'offre de transport public est insuffisante et de mauvaise qualité. A Casablanca, il y a une moyenne de 400 autobus pour un million d'habitants, alors qu'à Tunis il y a plus de 510 autobus et à Téhéran 744. Le niveau est de plus de 1.000 autobus en Amérique latine. Manque de compétences Le Premier ministre a reporté une visite officielle en Pologne et en Roumanie les 10 et 11 avril pour trouver une solution, ou du moins un compromis. Une étude relative à la préparation d'une stratégie nationale du transport, ordonnée par le département de tutelle, a révélé que le secteur du transport urbain est impacté par le manque de compétences techniques à tous les niveaux. Les chauffeurs et autres employés sont formés sur le tas. Ils ne possèdent aucune formation et n'ont bénéficié d'aucun stage aussi bien sur la sécurité que sur la conduite. La même étude a révélé que le nombre de personnes affectées aux déplacements urbains et aux services est insuffisant. Peu d'échanges d'expériences, pas de capitalisation des études, des bases de données, donc pas de diffusion de savoir-faire. Si le taxi est un luxe dans certaines métropoles de pays développés, dans certaines villes marocaines il est le premier moyen de transport. La part des taxis dans le transport public est de 30% à Casablanca, alors que celle des autobus n'est que de 20%. D'autres moyens de transport, comme les deux-roues et les voitures, se partagent ce qui reste. A Téhéran, la part des taxis est de 15%, à Mexico elle est de 5%. La même étude a révélé que «les taxis sont de gros consommateurs de carburants et qu'ils sont auteurs d'une médiocre utilisation de l'espace». Le document précise également que «les conditions de sécurité offertes par les grands taxis ne sont pas bonnes et les contrôles routiers peu efficaces». Le département de tutelle veut pallier ces défaillances à travers une restructuration des centres de visite technique. En l'absence d'autres moyens de transport comme le tramway, le RER ou le métro, le transport routier reste dominant. Le réseau ferroviaire ne couvre qu'une partie du territoire et se trouve incapable de desservir tous les axes de circulation. Avec le développement démographique, le parc et le nombre de déplacement sont appelés à augmenter. Il est question de trouver une solution dans les temps à venir. Le système des agréments est dénoncé à plus d'un titre. Certains chauffeurs n'ont pas pu avoir, depuis plus de trente ans, leur propre agrément malgré leur demande incessante. La création de sociétés de gestion des agréments, aussi bien pour les taxis que pour les autocars, s'avère salutaire à plus d'un titre. Ces entreprises devraient fonctionner selon un cahier des charges bien précis. Elles pourraient également être un interlocuteur fiable pour les autorités. L'une des raisons qui ont enclenché la grève est que le ministre Ghellab s'est trouvé face à plusieurs syndicats et des milliers de représentants d'associations professionnelles. A Casablanca, il y a 27 syndicats pour les taxis.