En 2016, la croissance organique a été le maître-mot. Seul le Groupe Attijariwafa bank a annoncé deux opérations stratégiques au Rwanda et en Egypte. La Banque centrale a-t-elle freiné certaines ardeurs ? Visiblement, l'on n'est plus dans cette période où les banques marocaines occupaient constamment l'actualité africaine, à travers notamment la multiplication des implantations et des acquisitions sur le continent. Cette stratégie agressive, menée tambour battant il y a quelques années et orchestrée par les principaux acteurs que sont les groupes Attijariwafa bank, Banque Centrale Populaire et BMCE Bank of Africa, a cédé la place.... à plus de modération. Après une phase d'investissements massifs, ils semblent être maintenant dans une étape de consolidation des acquis et de renforcement dans leurs pays de présence. «Cette accalmie est une étape nécessaire dans tout processus de développement, surtout que les banques marocaines ont consenti d'énormes efforts financiers ces dernières années», souligne un patron d'une société de Bourse de la place, non sans rappeler qu'«elles ont aujourd'hui une assisse confortable en Afrique, à travers un maillage solide qui leur permet d'être présentes, chacune en ce qui la concerne, dans plusieurs pays du continent». «Il faut cependant avoir une lecture beaucoup plus large de l'action du secteur bancaire marocain en Afrique, d'autant qu'il continue toujours de s'impliquer dans le développement économique de leurs pays de présence, à travers notamment des investissements dans divers secteurs autres que le domaine financier et l'accompagnement des opérateurs économiques, qu'ils soient marocains ou étrangers», ajoute notre source. Cela a pu, en effet, se constater à l'occasion des différentes tournées royales, lors desquelles les banques jouent souvent les premiers rôles. Pause stratégique ? Cette phase de pause dans la stratégie d'expansion des banques marocaines en Afrique s'accompagne cependant de la poursuite de leur croissance organique grâce à l'extension de leurs réseaux afin de conquérir de nouveaux clients et/ou du renforcement de leurs participations dans certaines filiales. C'est le cas notamment du Groupe BMCE Bank of Africa qui, durant le premier semestre 2016, s'est renforcé dans La Congolaise de Banque, en portant sa participation à 37% contre 25% auparavant. Dans la même optique, sa participation dans Bank of Africa a également évolué, passant de 73,5 à 75% entre fin juin 2015 et fin juin 2016. Tout autant, dans son plan quinquennal, l'une des priorités définies par la banque est l'extension de son réseau et l'ouverture d'une centaine d'agences au Maroc et en Afrique subsaharienne. Pour sa part, le Groupe BCP a pu, au premier semestre 2016, étendre sa présence à l'ensemble des pays de la zone UEMOA (Union économique et monétaire ouest-africaine) grâce notamment à l'ouverture d'une première succursale de la Banque Atlantique en Guinée Bissau. En cela, que l'on sache, seul le Groupe Attijariwafa bank devrait voir évoluer son périmètre de consolidation. En effet, à l'occasion de la visite du Souverain au Rwanda en octobre dernier, le groupe bancaire a signé un protocole d'accord portant sur l'acquisition d'une participation majoritaire dans Cogebanque. Cette banque, dont le siège est à Kigali, a enregistré en 2015 un produit net bancaire de 166,1 MDH et un résultat net de 34,3 MDH. Elle dispose d'un effectif de 292 employés et d'un réseau de 23 agences. Toujours en octobre 2016, Attijariwafa bank s'est offert 100% du capital de Barclays Bank Egypt détenu auparavant par Barclays Bank PLC. Une grosse acquisition qui permet au groupe présidé par Mohamed El Kettani de faire une entrée remarquée sur ce marché, d'autant que Barclays Bank Egypt, avec ses 1.500 employés et son réseau de 56 agences, est présente dans 18 villes égyptiennes. L'ombre de Bank Al-Maghrib Faut-il voir dans ce ralentissement du déploiement des banques marocaines en Afrique la main invisible de la Banque centrale, laquelle aurait préconisé une pause dans la politique d'expansion africaine des trois grandes banques marocaines pour limiter les risques transfrontaliers ? «Pas forcément. Certes, la Banque centrale a eu raison d'attirer l'attention sur les risques qui peuvent subvenir notamment au niveau des filiales en Afrique subsaharienne, mais il faut savoir que l'expansion des banques répond à une logique de marché qui tient compte de plusieurs paramètres comme les risques politiques, la structure et les potentialités du marché cible ou encore les contraintes géopolitiques. Mais, surtout, il faut qu'il y ait des opportunités qui se présentent. Et c'est ce qui s'est passé avec Attijariwafa bank en Egypte», conclut notre interlocuteur. Par D. William Des ambitions intactes Malgré cette accalmie, il faut croire que le maillage du continent africain par les banques marocaines va continuer. Cela, en se détournant des zones de confort pour cibler davantage les pays anglophones où elles sont peu ou pas du tout présentes. BMCE Bank Of Africa a, en tout cas, clairement affiché son ambition : être présent dans l'ensemble des pays africains. Une ambition qui trouve toute sa légitimité dans le taux de bancarisation en Afrique qui reste le plus faible au monde.