* Le Maroc dispose depuis 1996 d'un PUN qui subit tous les deux ans une évaluation de son efficacité lors de Simulex réalisés sur les côtes marocaines. * Le dernier en date, à Agadir en juin dernier, s'est déroulé avec grand professionnalisme, malgré une insuffisance de matériels. Depuis qu'il a été institué par décret en 1996, le Plan d'Urgence National (PUN) de lutte contre la pollution marine par les hydrocarbures, a été complété par son arrêté d'application en 2003. Le PUN, mis en place pour faire face aux accidents des pétroliers au large des côtes marocaines, a démontré une bonne coordination entre les départements concernés. C'est ce qui se dégage de l'intervention de Hfid El Oualja, du service Stratégie d'orientation au sein du ministère de l'Environnement. Présent lors de la session technique organisée conjointement par la SAMIR et MOIG ( Mediterranean Oil Industry Group), El Oualja a passé en revue les trois exercices de simulation, Simulex, qui visaient à évaluer la mise en uvre du PUN en cas de vraie crise environnementale. Une chose est sûre, les autorités compétentes respectent parfaitement la périodicité de ces « Simulex ». Ainsi, depuis 2002, un Simulex est organisé tous les deux ans et c'est sur les côtes de Mohammedia que le PUN a été mis à l'épreuve il y a 4 ans. Un Simulex a été réalisé en 2004 à Nador, et un dernier en juin 2006 à Agadir. L'objectif étant de renforcer la coordination interdépartementale, entraîner des équipes d'intervention, évaluer l'efficacité du matériel et de l'équipement de lutte ainsi que la capacité d'intervention. Le PUN implique en effet un nombre important de départements ministériels. En cas d'accident pétrolier, c'est le coordonnateur national, en général le département de l'Environnement, qui se charge de préparer la lutte. A ce niveau-là, l'Etat-Major central de la Direction de la lutte joue un rôle important puisque, selon la gravité de l'incident , c'est lui qui prend la décision de déclencher le PUN et de coordonner les actions de lutte. L'Etat-Major assure le suivi des opérations, facilite les communications entre les différents intervenants et élabore le rapport final sur l'intervention. Le coordonnateur national prend le relais en termes de coopérations internationale et régionale ; il peut également proposer au gouvernement toute mesure visant à améliorer le dispositif. Bien qu'il ne s'agisse que de simulations, tous les départements concernés par le PUN ont été mobilisés au sein de la Direction de la Protection Civile, du Ministère de l'Intérieur, au Ministère de l'Equipement et des Transports, au Ministère des Pêches Maritimes, au ministère des Affaires étrangères et de la Coopération, ministère des Finances, ministère des Télécommunications, la Défense Nationale, l'Inspection de la Marine Royale, la Gendarmerie Royale, les Forces Royales Air et l'Office d'Exploitation des Ports (ODEP). D'où toute la complexité que pose la coordination. Mais le PUN est clair là-dessus. Des postes de commandement sont mis en place. Au niveau local, un coordonnateur veille à l'exécution des décisions et directives prises au niveau central et assure la mobilisation des moyens locaux. Il est composé de l'Etat-Major provincial ou régional et de la Direction de la lutte qui confie les opérations en mer à l'Inspection de la Marine Royale et, à terre, à la Protection civile. Les équipes mobilisées doivent, entre autres, sauver les vies humaines en péril, cerner le pétrolier en avarie, cerner le déversement massif d'hydrocarbures et, surtout, éviter la dérive de la pollution qui peut menacer les côtes marocaines. Donc un entraînement en temps réel et dans des conditions d'urgence qui ont permis d'évaluer l'efficacité du PUN en cas d'accident pétrolier. Des moyens insuffisants Même si les conclusions des Simulex restent très positives, elles révèlent néanmoins une insuffisance en termes de moyens et de matériel. Ainsi, les Forces Royales Air, qui ont pour mission la reconnaissance, le guidage des aéronefs et l'évaluation de la nappe, n'ont affrété à cette mission que deux avions, le RCC Casa, l'avion Casa CN235 et un hélicoptère Puma SA330 SAR. La Gendarmerie Royale a mobilisé pour sa part deux avions Turbo-Trush et un hélicoptère Puma SA330VIP, pour assurer et l'épandage de dispersant et le transport des VIP. La Marine Royale arrive sur place juste après, déployant 3 PHM, un P32 avec à bord une équipe de plongeurs. Elle a assuré sur place la direction des opérations, en plus de l'épandage de dispersant, le transport des médias et la surveillance de la zone. Ses membres ont procédé à des prises d'échantillon. L'ODEP a pour sa part mobilisé, pour ces Simulex, deux remorqueurs pour assurer le confinement de la nappe, la récupération, le stockage et le traitement, en plus du remorquage du pétrolier. Les Pêches Maritimes ont mobilisé une vedette SAR pour identifier les zones sensibles à protéger. À terre, les équipes ont assuré le sauvetage et la prise en charge des victimes. Elles ont également procédé à la protection des zones sensibles, la récupération et la dépollution du littoral. Une analyse des échantillons a été effectuée pour un meilleur suivi d'impact et pour réclamer des indemnisations si nécessaire. Au bout de cet exercice éprouvant, le rapport final révèle une bonne coordination entre les départements concernés. Toutes les opérations de lutte ont été effectuées. La liaison a été réalisée en temps réel avec les organismes internationaux et les pays riverains, et les opérations maritimes et aériennes se sont déroulées avec une sécurité absolue. Mais le matériel disponible reste insuffisant pour mener des opérations de lutte en cas de pollution massive réelle. Le rapport final recommande ainsi de créer un Fonds national pour l'acquisition de matériel de lutte contre la pollution marine accidentelle, afin de combler le déficit existant en matière d'équipement. De même, pour une meilleure intervention, il faut élaborer une carte des zones sensibles le long du littoral et impliquer davantage les scientifiques dans le domaine de la pollution marine accidentelle à ce genre d'exercices. Il faut aussi impliquer l'industrie pétrolière et le secteur privé dans la politique générale de prévention et de lutte. L'autre recommandation sur laquelle revient ce rapport est l'importance de la mise en place d'un Centre de lutte antipollution à Tanger. La pollution marine, une menace réelle pour le Maroc Disposer d'un PUN n'est pas un luxe. Le Maroc a subi trois accidents pétroliers au niveau de ses côtes : le Khark 5 en 1989, Sea Spirit en 1990 et le Castor en 1999. Le pays avait rencontré une grande difficulté pour être dédommagé. Et les facteurs qui l'exposent encore sont toujours présents et inchangeables, notamment deux façades maritimes extrêmement sensibles (3.500 km ), un trafic maritime intense, avec chaque jour 200 navires qui traversent le Détroit de Gibraltar et 300 navires sur la côte Atlantique. D'où l'importance de repenser ce PUN et de le doter des moyens nécessaires pour protéger nos côtes contre la pollution marine.