Après quelques jours de vacances, la rentrée s'annonce chaude, très chaude même pour l'équipe aux manettes à un mois de la période électorale, notamment pour mener à bon port quelques chantiers ouverts. A priori, le temps semble réduit pour les parachever. D'aucuns restent très sceptiques quant à leur finalisation, et pour cause, la COP22 qui pointe du nez, mobilise quasiment toutes les forces motrices de la nation. Après un bilan économique des plus mitigés, force est d'admettre que le grand bémol de Benkirane, à l'instar de ses prédécesseurs, est un taux de croissance fragile, souffrant d'irrégularité et fortement dépendant des aléas climatiques. Donc, si chantier prioritaire il y a, c'est justement d'aboutir à un taux de croissance continu, indépendamment de la clémence du Ciel et qui profite à toutes les catégories sociales. Valeur aujourd'hui, les performances économiques ne contribuent que modestement à l'inclusion sociale qui reste le parent pauvre de toutes les politiques économiques. Et pourtant, le Maroc ne manque pas d'atouts à ce sujet. Les progrès accomplis au cours des dix dernières années au niveau des infrastructures, de la réglementation et du climat des affaires sont de nature à améliorer le climat social. Au risque de nous répéter, l'un des importants chantiers sur lequel devrait s'atteler le prochain gouvernement est l'abolition des inégalités sociales trop criardes. Au fur et à mesure que les années passent, nous nous rendons compte que l'avenir ne peut se résumer uniquement au PIB ou à son rythme d'évolution, mais plus à l'amélioration des conditions de vie à travers une approche plus inclusive. Un constat unanimement partagé à l'échelle mondiale. Dire que le gouvernement peut améliorer et l'emploi et l'éducation à un mois de la fin de son mandat, est un vrai leurre. La réforme de la retraite est également l'un des principaux chantiers favorisant l'équité sociale. C'est d'ailleurs un des points forts de l'actuel gouvernement, et ce malgré les péripéties ayant entaché son processus. «Dès le mois d'octobre, la contribution des fonctionnaires à la CMR augmentera d'un point», annonce un quotidien de la place. Le même support souligne que les taux de cotisation passeront de 10% à 11% dans un premier temps, avant d'atteindre, en 2019, les 14%. Aussi, l'Etat mettra-t-il la main à la poche dans la mesure où les cotisations vont croître de quatre points sur quatre ans. Concrètement, cette mesure devrait retarder l'épuisement des réserves du régime des pensions civiles gérées par la CMR et réduire les déficits cumulés de 19% à l'horizon de 2061. Croissance : haro sur l'irrégularité ! S'agissant des autres défis, le profil de croissance, tel qu'il se présente, ne parvient pas encore à induire un développement suffisant des marchés d'exportation à même d'assurer un équilibre plus soutenable des équilibres extérieurs. D'après le dernier rapport de l'Office des changes, le taux de couverture des importations de marchandises par les exportations se situe à 55,8% au lieu de 56,9% à fin juillet 2016. Mais il ne faut pas perdre de vue la forte baisse des prix de l'énergie qui a fortement contribué à la stabilisation du taux de couverture. Les dernières initiatives de rapprochement aux pays de l'Afrique de l'Ouest devraient contribuer à élargir les horizons économiques du Maroc pour intégrer de nouvelles régions promises à une croissance plus soutenue. D'autres actions plus intenses doivent suivre pour équilibrer la balance commerciale. Encore faut-il ne pas se voiler la face. Le principal challenge qu'affrontera outre mesure le pays dans les années à venir pour réussir son positionnement entre deux espaces économiques majeurs, l'Europe d'un côté et l'Afrique de l'autre, est celui de la compétitivité. Là encore, le Maroc ne manque pas de potentialités. La valorisation du capital humain, la recherche-développement et l'innovation, des ingrédients qui, bien mixés, pourraient contribuer à la fois à l'amélioration de la productivité totale des facteurs, à l'employabilité et, surtout, à l'atténuation des tensions sociales. Autre variable déterminante : la pression fiscale qui grève la compétitivité des produits nationaux par rapport à ceux étrangers (voir P 33). Paradoxalement, cette pression fiscale qui grève la compétitivité n'améliore pas, comme il se doit, les ressources publiques. Comme l'a si bien expliqué Rachid Hasnaoui, professeur des finances publiques et de fiscalité dans un extrait récent, «les recettes publiques qui proviennent en partie de la fiscalité sont condamnées par un système fiscal boiteux parce qu'il appréhende, à chaque occasion, la notion de la réforme à une réduction du nombre de taux, inéquitable car concentré sur quelques types de contribuables et dérogatoire puisqu'il accorde des incitations parfois injustifiées pour bon nombre de secteurs». Parallèlement à une hausse des dépenses publiques, l'équilibre budgétaire ne peut être réalisé. Face à cette situation, l'appel à des ressources externes, notamment les emprunts, reste une solution normale choisie par le gouvernement. Toutefois, la dette publique a atteint des proportions inquiétantes et pèse lourdement sur le Budget général de l'Etat (82,2% du PIB en 2015). Dans pareil contexte, il sera difficile de la plier. Dans l'objectif de réduire le déficit budgétaire structurel, le prochain gouvernement devra procéder par de véritables réformes touchant la fiscalité, le système de compensation et la bonne gouvernance des finances publiques.