En dépit d'une conjoncture économique difficile, caractérisée par l'aggravation de la sinistralité dans le secteur bancaire, les indicateurs économiques et financiers au titre de l'année 2014 du groupe Attijariwafa bank clignotent presque tous au vert. ‘‘‘Il n'y a jamais eu de crise de liquidité au Maroc. Mais il y a eu par contre une décélération de la demande de crédits». Les propos émanent du Président du Groupe Attijariwafa bank, Mohamed El Kettani, qui commentait les résultats 2014 de la banque lors d'une récente rencontre avec les journalistes et les analystes de la place. Dans ce contexte précis, la filiale bancaire du holding SNI parvient tout de même à sortir son épingle du jeu et améliorer son ratio de liquidité. En effet, le taux de transformation des dépôts en crédits est passé de 108% à 103% entre 2013 et 2014 (le Maroc demeure encore loin des niveaux enregistrés dans les économies avancées caractérisées par un développement avancé de leurs marchés de dettes). Au moment où le coût du risque continue à peser sur les résultats des banques marocaines (le taux de sinistralité affichant 7% à fin 2014 contre seulement 4,99% en 2012), Attijariwafa bank a pu maîtriser son taux de contentialité à 5%, un niveau acceptable pour reprendre les termes de son top management, et ce grâce à une politique exigeante en matière de gestion des risques. La banque est dotée, poursuit-on, d'un système de veille qui émet des signaux d'alarme et l'incite à mobiliser des provisions un an, voire deux ans avant que ne se déclenchent les critères mis en place par la Banque centrale. Néanmoins, insiste le Président du groupe bancaire, une gestion rigoureuse du risque ne signifie pas une frilosité dans l'octroi des crédits. Preuve en sont les 10 milliards de DH mobilisés en 2014 pour financer les PME, ainsi que 5 autres milliards de DH destinés à accompagner 20.000 TPE. Promesse tenue, puisque le bilan annoncé il y a une dizaine de jours fait état d'un total crédit de 10,7 milliards de DH en faveur des PME et environ 4,7 milliards de DH bénéficiant à 16.500 TPE. «Nous sommes le premier groupe bancaire qui finance les PME et TPE au Maroc», affirme Mohamed El Kettani, non sans fierté. La même dynamique est perceptible du côté des dépôts, quoiqu'au sein du groupe Attijariwafa bank, on préfère raisonner en termes d'épargne au lieu de dépôts. En effet, armé du réseau de distribution le plus dense en Afrique (3.331 agences, dont 2.636 agences au Maroc, dépassant même le réseau de la Poste), l'épargne totale collectée par le groupe (dépôts, OPCVM, bancassurance) s'élève à 356,8 milliards de DH à fin décembre 2014, en hausse de 13% en glissement annuel. À elle seule, l'activité «Maroc» y a contribué à hauteur de 82%, contre 18% à l'international, notamment en Afrique subsaharienne (pour les résultats complets, voir notre précédent article sur www.financenews.press.ma). Notons enfin que le groupe Attijariwafa bank s'apprête à démarrer sous peu officiellement ses activités au Bénin, complétant par la même occasion son processus d'implantation en Afrique de l'Ouest. Le groupe, qui a acquis jusqu'ici 13 banques dans 13 pays, entame cette année la deuxième étape de sa feuille de route avec, cette fois-ci, en ligne de mire, l'Afrique subsaharienne lusophone et anglophone. Trois questions à Ismaïl Douiri, Directeur général d'Attijariwafa bank «Nous restons optimistes» Finances News Hebdo : Le secteur de l'immobilier est en pleine récession. Comment avez-vous abordé la situation ? Ismaïl Douiri : Nous continuons à soutenir ce secteur important pour l'économie et pour les emplois. Nous sommes rigoureux dans la sélection des dossiers, dans l'intérêt des promoteurs immobiliers. Nous avons suffisamment d'informations issues de plusieurs sources qui nous permettent de savoir quel genre de logements va se vendre, à quel prix, dans quel quartier... Nous jouons notre rôle de conseiller des promoteurs pour assurer un bon développement immobilier et éviter de créer des suroffres ou des bulles. Nous le faisons aussi au niveau des crédits acquéreurs en soutenant l'accès au logement pour l'ensemble des Marocains, aussi bien directement à travers Attijariwafa bank, qu'indirectement au niveau notre filiale spécialisée Wafa Immobilier qui offre du crédit à tout acquéreur, qu'il soit ou non client de la banque. Donc, nous continuons à jouer notre rôle de conseiller pour accompagner les acquéreurs et les promoteurs à un moment où la demande ralentit, mais sans qu'il y ait de crise particulière. F.N.H. : Quelle lecture faites-vous de la montée de la sinistralité ? I. D. : L'évolution des créances en souffrance concerne l'ensemble du secteur. S'agissant d'Attijariwafa bank, il est difficile de décrire une origine particulière. C'est essentiellement à la croissance du PIB non agricole, limitée à un niveau inférieur à 3% dès 2013, alors que l'économie marocaine est taillée pour croître entre 4 et 5% en termes de PIB non agricole. En revanche, il y a lieu de noter que nous sommes en phase d'accélération de la croissance depuis quelques mois, d'où notre optimisme quant à l'amélioration future de la conjoncture économique. Nous avons aussi une culture extrêmement rigoureuse en matière de gestion des risques en provisionnant le plus tôt possible pour que nos actionnaires ne soient pas surpris par un choc ultérieur. Donc, il faut y voir une anticipation d'une situation qui s'est dégradée sous l'effet d'une croissance faible, en lien aussi avec la situation en Europe qui tarde à reprendre le chemin de la croissance. F.N.H. : Comment voyez-vous les perspectives de 2015 ? I. D. : Certains phénomènes ne se reproduiront probablement pas avec la même ampleur, notamment en ce qui concerne les activités de marché, puisque nous avons bénéficié de conditions relativement exceptionnelles en 2014. En revanche, il y aura une reprise de la croissance au niveau des commissions. Il y a un point d'interrogation sur la demande de crédit qui continue à être relativement faible. Nous essayons de favoriser l'investissement des entreprises. La confiance des particuliers est en train de revenir. Nous avons constaté des signes d'amélioration au niveau de la demande des crédits chez les particuliers au cours du deuxième semestre 2014. Enfin, il devrait y avoir une amélioration du coût du risque, mais dans ce domaine, il faut toujours attendre pour y voir plus clair. Nous restons globalement optimistes, mais très engagés pour accompagner la reprise, d'autant plus que 2015 sera une bonne année en matière de croissance économique.