Karim El Aynaoui, président du think tank OCP Policy Center Finances News Hebdo : Quels sont les enjeux de cette édition des Atlantic dialogues ? Karim El Aynaoui: Pour les pays du Sud, ce sont des enjeux de développement, de croissance et d'amélioration du niveau de vie de leurs citoyens. Pour les pays du Nord, les enjeux sont différents. Dans un contexte de croissance faible, ils ont besoin de redynamiser leur économie grâce au potentiel très important des pays du Sud et notamment des pays africains. Une bonne partie de la solution des problèmes des pays du Nord se situe dans les pays du Sud. L'idée de ces Atlantic dialogues est d'offrir une plateforme, un cadre informel qui est celui de deux think tanks, marocain et américain. Il y a presque soixante pays présents ici qui profitent de ce cadre d'échange dans lequel ils peuvent discuter et construire ensemble des solutions pour répondre aux défis des deux côtés de l'Atlantique. Ces solutions seront communes ou elles ne le seront pas, car nous vivons dans un monde interdépendant où tout est lié. Nous allons continuer à oeuvrer dans ce sens dans une démarche de long terme, pour les générations futures en impliquant les jeunes. Près de 60 jeunes représentant une trentaine de pays sont ici présents. Ils sont les relais de demain. Il est très important que les jeunes Marocains connaissent bien les jeunes Togolais, que les jeunes Togolais connaissent les jeunes Brésiliens, etc... Beaucoup de problèmes de ce monde sont des difficultés de dialogues et d'écarts de perception et de compréhension. F.N.H. : Quels sont les contraintes et les blocages aux ambitions de ces rencontres ? K. E. A. : La grande difficulté consiste à corriger les différentes perceptions des uns et des autres pour arriver à un intérêt commun. C'est l'histoire du verre à moitié plein. Il y a ceux qui vont voir les écarts de développement entre les différentes régions de l'Atlantique comme étant un problème. Et d'autres verront les mêmes écarts comme une opportunité. Personnellement je vois cela plus comme une opportunité de rattrapage. Il y a une formidable chance pour avoir des taux de croissance extrêmement élevés, du niveau chinois, notamment en Afrique, qui est la nouvelle frontière de développement de cette région. Cela est possible si on arrive ensemble à mettre en place des plateformes pour attirer le capital privé international et s'investir dans le financement des infrastructures et à densifier les réseaux. Il est par ailleurs difficile d'avoir l'attention des décideurs parce qu'ils gèrent du court terme avec des crises qui se succèdent. Le propre des think tanks est que nous pouvons nous payer le luxe d'avoir du temps et de pouvoir travailler sur le long terme. Ainsi, nous permettons aux décideurs de temps à autre de s'échapper de ce court terme pour se concentrer sur des questions de long terme pour qu'ils puissent faire la connexion. F.N.H. : Peut-on envisager que ces rencontres aboutissent sur le long terme à une forme de mécanisme institutionnel regroupant les pays du bassin atlantique ? K. E. A. : La manière dont on voit les choses consiste plus à aider à construire pour laisser faire par la suite. Je ne pense pas que l'on puisse construire un mécanisme institutionnel de type Nations Unies ou autre. Il s'agit plutôt de mettre en place un cadre qui permet aux gens de se connecter et c'est à eux aussi d'y mettre de l'énergie. L'idéal est que d'autres nous rejoignent, car cette plateforme n'appartient à personne. Elle est au service de tout le monde.