A l'occasion de la fin de la période des résultats semestriels, nous donnons la parole à des experts pour commenter les réalisations des entreprises. Mouhamed Mariane, directeur de la société de gestion Marogest, nous livre ses commentaires. Une lecture émanant de «la salle des machines», étant donné sa forte implication dans la gestion d'actifs au quotidien. Finances News Hebdo : Comment qua-lifieriezvous le cru des résultats pour ce semestre ? Mouhamed Mariane : Vus dans leur ensemble, les résultats de ce premier semestre sont relati-vement bien orientés, avec une hausse du chiffre d'affaires consolidé des sociétés de la cote de 5,6% à 124 Mds de DH, du résultat d'exploitation de 1,2% à 24,8 Mds de DH, et du RNPG de 2,5% à 14,3 Mds de DH. Ces résultats sont d'autant plus intéressants qu'ils arrivent dans un contexte macroéconomique peu favorable aux affaires, avec notamment la baisse avérée de l'activité agricole, l'accroissement modéré des activités non-agri-coles, la baisse du rythme de croissance de la consommation, la décompensation additionnelle sur les combustibles, la hausse du SMIG, et la décélération de l'investissement, notamment sur le marché immobilier. Par ailleurs, il convient de mentionner que l'évolution globalement conve-nable des sociétés de la cote occulte de fortes dis-parités, dépendamment de la situation sectorielle de chaque société. F.N.H. : Le non courant a été déterminant pour plusieurs entreprises, notamment bancaires. Faut-il s'en inquiéter ? M. M. : Les banques de la place ont réalisé une jolie prouesse ce semestre. Leur exploit est porté essentiellement par la montée en puissance de la contribution des filiales africaines, et par la bonne performance des activités de marché. Le non courant n'a été perceptible au sein du secteur bancaire qu'au niveau du CIH, mais son impact n'a été que faiblement ressenti, étant donné le petit poids que s'accapare la société dans son secteur. Ce que l'on peut avancer globalement, c'est que l'impulsion positive des résultats tient surtout au retournement de vent dont ont profité des sociétés ayant longtemps souffert de conditions concurren-tielles difficiles (Samir, SNEP), par l'ouverture sur de nouveaux marchés (Holcim), et par l'extension des capacités de production (JLEC). Le non cou-rant, lui, a joué en faveur de certaines sociétés, comme il a joué en défaveur d'autres (CMT), sans particulièrement biaiser les résultats. F.N.H. : Peut-on dès à présent dire que l'année sera bonne ? M. M. : Bon nombre d'éléments plaident pour une poursuite du redressement de la situation de la cote courant ce deuxième semestre. Les bancaires devant tirer davantage profit de la récente révision à la baisse du taux directeur pour réduire leur coût de financement. Maroc Telecom de la progression des revenus du groupe à l'international et de la stabilisation de l'érosion de ses marges sur le mar-ché local. Et la Samir de l'élargissement du réseau de sa filiale de distribution, pour ne citer que ce panier de grandes valeurs. Ces bonnes perspec-tives devraient naturellement redonner confiance aux investisseurs pour orienter leurs épargnes vers le marché boursier, conduisant de fait à une pour-suite de la lancée positive amorcée. F.N.H. : Le MASI dépasse les 10% de per-formance depuis le premier janvier. Est-ce justifié compte tenu des dernières données fondamentales ? M. M. : L'orientation positive des résultats semes-triels et l'arbitrage en faveur du marché des actions en raison de la baisse des taux d'intérêt ont été accompagnés par une réaction rapide et à sens unique sur le marché boursier. En dépit de l'ampleur de la performance réalisée (+10% depuis le début de l'année, dont plus que la moi-tié réalisée durant le seul mois d'août), celle-ci demeure en dessous du potentiel restant à libérer. N'oublions d'ailleurs pas que le marché boursier a été depuis 2008 prisonnier d'une spirale baissière ayant valu à son indice général de perdre près de 30% de sa valeur. Maintenant que les entreprises commencent à remonter la pente, il est tout à fait raisonnable que les performances boursières se mettent à suivre. F.N.H. : Avez-vous en tête une performance cible que vous souhaiteriez partager avec les lecteurs ? M. M. : L'évolution du marché boursier d'ici la fin de l'année est tributaire de l'état d'avancement de nombreuses opérations stratégiques (acquisition par Maroc Telecom des filiales africaines d'Eti-salat, introduction en Bourse de Marsa Maroc, fusion Holcim /Lafarge...). Si elles adviennent à des conditions qui profitent à l'actionnaire, ces opérations viendront donner un coup de pouce au marché dans son ascension. A défaut de grands catalyseurs, la lassitude risquerait de vite s'ins-taller. Mais, porté par le bon cru de résultats, le marché maintiendrait en tout état de cause le cap haussier. Bien entendu, le franchissement de nouveaux paliers à la hausse serait moins rapide étant donné que les investisseurs, attendant la confirmation de l'orientation favorable des sociétés de la cote lors de la sortie des résultats annuels, sont désormais moins impulsifs dans leurs achats. F.N.H. : Enfin, si vous deviez citer un sec-teur qui vous paraît être solide en marge des résultats, ce serait lequel ? M. M. : Le secteur paraissant le plus solide est incontestablement celui des bancaires. En plus de générer des revenus en continuelle progression, et sur l'ensemble de leurs lignes de métiers, ces der-nières arrivent à maintenir des marges honorables en dépit de l'accroissement du coût de risque. A l'autre bout, le secteur ayant le plus déçu est celui des immobilières. Lesquelles ont accusé le coup de la baisse des prix des actifs immobiliers, de la chute des mises en chantier des logements sociaux (-51%), et de la hausse du taux d'impo-sition à cause d'un mix produit moins favorable, pour afficher au final un résultat en retrait et une dégradation avérée des marges.