Sonasid a gagné près de 24% en un mois, alors que Samir s'est appréciée de 29%, et cela sur fond de volumes importants. Les deux ont atteint des niveaux de cours dits «psychologiques» et qui délimitent la frontière entre mouvements spéculatifs et mouvements de fond. Comme pour maintenir le suspense, des prises de bénéfices se sont enclenchées sur ces deux actions en ce début de mois de septembre. U n engouement quasi simultané a été porté sur Samir et Sonasid pendant le mois d'août, deux actions à l'ADN boursier similaire, avec un avantage certain pour Sonasid qui négocie sereinement la sortie du virage de la crise. Samir est au contraire confrontée à une crise de rentabilité et, surtout, de profit. La société perd de l'argent année après année, et si des mesures ont été prises fin 2013 pour sauver les meubles, rien n'a encore été prouvé sur leur viabilité. Regardons dans le détail le comportement de ces deux entreprises qui ont signé les meilleures performances du marché cet été. Sonasid, une tendance haussière crédible D'un point de vue financier, opérationnel et stratégique, Sonasid a sorti la tête de l'eau il y a deux ans consécutivement à l'arrivée d'un management concentré sur la performance opérationnelle. Un management qui semble, lors des exercices de communication, séduire les bailleurs de fonds : disparition des dettes (transformées en redevances grâce à des renégociations de contrats), distribution d'un dividende dans la foulée de résultats positifs et, surtout, une performance opérationnelle croissante grâce aux efforts commerciaux, notamment en adaptant l'offre aux clients, même les plus petits. Chez «Sonasid distribution», il est possible de s'approvisionner en petite quantité, remplir un simple tripoteur ou cinq remorques d'affilée. Tout le monde est traité de la même manière, et c'est du concret. Cependant, les maux du secteur sont plus profonds et ce serait naïf de croire que la croissance reviendra en ajustant deux ou trois composantes du compte de résultat. Ce marché a souffert, en plus d'une concurrence déloyale de l'international et d'une situation de surproduction à partir de 2008 au niveau mondial, d'une baisse de la consommation au niveau local. En effet, la consommation nationale d'acier a évolué d'une manière exceptionnelle durant la période 2000-2007, en affichant un TCAM (taux de croissance annuel moyen) de 11,3%, dû principalement à une politique budgétaire ambitieuse touchant l'infrastructure et l'habitat social. Durant la même période, les dépenses d'investissements publiques affichaient un TCAM de 10%. «A partir de 2008, les contraintes budgétaires ne favorisaient pas le maintien d'un niveau de croissance soutenue des investissements. Ces derniers affichaient une quasi stagnation quand les ventes de ciment affichaient un TCAM de 3%. Durant cette période, l'évolution de la consommation d'acier était rétablie à des niveaux plus normatifs, soit 3,2%», expliquaient les analystes d'Attijari Intermédiation dans une note sur le secteur parue en 2013. En somme, passer d'une croissance de 11,3% à 3,2% en l'espace de quelques années a laissé des traces profondes dans les comptes de l'opérateur. D'ailleurs, la politique d'investissement public détaillée dans la Loi des Finances 2015 donnera un signal d'investissement ou, au contraire, d'allégement sur les valeurs de BTP, dont Sonasid. Cela dit, vu la très bonne performance financière réalisée l'an dernier à cette période, il sera difficile pour le sidérurgiste d'exploser le compteur. Donc, il sera plutôt question de consolidation des acquis. En Bourse, les chartistes constatent une tendance haussière solide dont chaque nouveau pic de cours est accompagné par des volumes importants, dénotant du caractère peu spéculatif du mouvement. Pendant le mois d'août, ce sont 296 MDH d'actions Sonasid qui ont changé de main, soit quasiment 8% du capital. Samir, accumulation à contre tendance Des coûts d'approvisionnement qui explosent, des distributeurs qui préfèrent importer et une demande locale qui stagne sont autant de contraintes qui pèsent sur l'activité de la Samir. L'unique raffineur du pays se trouve en situation de surproduction, un peu comme l'est Sonasid, et traîne une perte sèche de plus de 300 MDH et des dettes de financement de 9,5 Mds de dirhams. Toujours comme Sonasid, Samir a été un peu délaissée par la consommation locale. Les distributeurs ont augmenté leurs achats à l'international de 20% en 2013. Autant de quantités que la Samir ne distribue pas et qu'elle doit gérer dans ses stocks. Ensuite, il y a le problème de la consommation industrielle. Cette dernière est peu demandeuse de fuel et de bitume. Enfin, et de manière plus générale, la demande intérieure en provenance des consommateurs finaux stagne. Cette demande a permis d'écouler quelque 11 millions de tonnes en 2013 et, à cause de la décompensation, on voit mal comment cette consommation devrait se mettre à progresser rapidement à moyen terme. Ce que Sonasid vivait il y a quelques années, Samir le vit aujourd'hui et, puisque les mêmes causes produisent généralement les mêmes effets, Samir a lancé à son tour son concept de distribution de produits pétroliers pour conserver ses marges. Si en avril le management déclarait à la presse lors de la présentation des résultats de la société que cette mesure donne déjà des effets positifs, nous ne dissocierons les effets d'annonce des incidences réelles qu'après quelques trimestres, voire des semestres. Malgré ces contraintes, le titre en Bourse n'a pas marqué de nouveaux plus bas depuis un an. «Pendant plus d'un an, le titre a évolué dans un range (ndlr: une zone plate de congestion) entre les niveaux à 233 DH et 312 DH», explique Aziz Zejli du cabinet Day By Day. Une configuration qui témoignait de l'attentisme des investisseurs suite à plusieurs années de baisse où le consensus était baissier. Il a fallu attendre le mois d'août 2014 pour voir l'action s'extirper étonnamment par le haut de cette zone de congestion sur fond de volumes importants (354 MDH de volumes en un mois, soit le volume mensuel le plus important de la cote). Le marché était-il en train d'accumuler pendant la période ? En tout cas, le niveau psychologique des 310/312 DH a été enfin évincé après plusieurs échecs. Selon Aziz Zejli de Day By Day, pour les deux actions, nous sommes dans des tendances haussières bien installées. Les prises de bénéfices actuelles - tant qu'elles ne dépassent pas certains niveaux de prix pour chacune de ses actions - ne remettent pas en cause la solidité de ses tendances, avec néanmoins une nuance : la Samir est dans une configuration explosive, alors que Sonasid est plus calme dans son ascension.