C'est une conférence de presse semestrielle qui ne sacrifie pas, ou plus, au style traditionnel auquel nous avait habitués jusque-là Abdeslam Ahizoune, président du Directoire de Maroc Telecom. Au Forum de la Tour du groupe, les invités de la presse nationale et internationale ont écouté un autre langage, celui du parler vrai, éloigné de toute langue de bois, direct pour ainsi dire et qui sonnait comme un tocsin : «Nous sommes d'accord avec le dégroupage, avec le partage, nous ne demandons pas mieux» ! Lancinant, récurrent, le propos a été réitéré au moins une dizaine de fois par un président à l'aise dans son rôle, affichant sourire et volubilité, communicateur hors pair. On comprendra qu'il avait, «a priori», à coeur de rétablir certaines vérités et de balayer d'un revers de main les atermoiements sur le fameux partage qui fait depuis trois à quatre ans maintenant l'objet d'un débat sulfureux chez les opérateurs concurrents et d'une méprise chez le régulateur, l'ANRT. Il a répété que «Maroc Telecom a investi en termes d'infrastructures et d'équipements et il est aujourd'hui pénalisé, au prétexte qu'il s'opposerait au dégroupage» ! Ce qui conduirait, selon lui, à penser que «l'investisseur risque de désinvestir s'il n'est pas reconnu en tant que tel et que justice ne lui est pas rendue» ! Et d'ajouter encore une fois, le ton définitif : «il faut partager, mais équitablement, non seulement nous sommes d'accord pour le partage, mais nous l'exigeons, de manière équitable... Nous sommes même demandeurs, car nous sommes convaincus que ce mécanisme est de nature à participer à la formation de conditions objectives d'une concurrence saine» ! Il ne s'agit pas, selon lui, de se voir pénalisé par une sanction émanant de l'autorité de régulation (ANRT), au détriment d'une décision de justice. Il s'est interrogé dans la foulée sur les prérogatives et cet ahurissant renforcement des pouvoirs de l'ARNT eu égard à celui de la justice. La décision de dégroupage a été prise en 2008 et les opérateurs invités à s'y conformer, mais déjà à l'époque, les concurrents de Maroc Telecom rechignaient à tout projet d'investir dans les infrastructures, et même à adhérer à la proposition que ce dernier leur avait soumise. «Les concurrents ne sont pas intéressés par le fixe et l'ADSL, alors que nous continuons à investir pour moderniser le réseau fixe et Internet, sachant qu'il n'y a aucun retour ni perspective de rentabilité dans l'immédiat, on investit dans un quartier ou une ville sans jamais savoir si c'est rentable, les clients viendront après !», a répété le président de Maroc Telecom. Clôturant ce débat réglementaire qui s'est apparenté depuis quelques mois à une sorte de polémique «inéquitable», Abdeslam Ahizoune s'est dit convaincu que la concertation prévaudra. Non sans s'interroger, voire se plaindre qu'un refus catégorique soit maintenu par l'ANRT à la mise en oeuvre de la 4G au Maroc, car une telle technologie a de graves conséquences à la fois en termes de chiffres d'affaires et de modernisation des télécommunications. «La 4G sera introduite et activée au Gabon, tant pis pour nous...» ! Au chapitre des bonnes nouvelles, ce sont les axes essentiels de la croissance qui ont été mis en exergue, notamment à l'international, en Afrique en particulier. Ensuite la nouvelle vision du groupe, suite à la finalisation le 14 mai dernier du rachat par Etisalat des 53% des parts détenues par le groupe Vivendi. Cette finalisation de rachat est elle-même liée – il le soulignera avec force – à l'acquisition par Maroc Telecom des 6 filiales africaines du groupe émirati. Il s'agit des actifs du Bénin, de Côte d'Ivoire, du Gabon, du Niger, de Centre-Afrique et du Togo, ainsi que du fournisseur des produits IT aux filiales d'Etisalat. Parlant des ces deux opérations, de cession d'un côté et de cession de l'autre, il dira que «l'une n'a pas été rendue possible sans l'autre» ! A une question sur un éventuel changement de management, il a rétorqué que jusqu'à nouvel ordre, les cadres et dirigeants de Maroc Telecom représentent pas moins de 98%...écartant là aussi toute velléité de rumeurs. Enfin, le développement réaffirmé de l'ADSL avec la FTTH, cette miraculeuse fibre optique portée de manière globale jusqu'à nos domiciles et que Maroc Telecom s'est vu purement et simplement interdire de commercialiser de manière formelle par l'ANRT, jusqu'à ce lundi 21 juillet, une heure avant la conférence de presse... suite à «un coup de téléphone que le directeur général de l'ANRT m'a donné tout à l'heure avant de vous rejoindre», dira Abdeslam Ahizoune aux représentants de la presse. Au Maroc, la croissance des activités du fixe et de l'Internet que le groupe maintient contre vents et marées, se confirme avec des résultats en hausse de 5,5% à 3.912 MDH. La FTTH (fiber to the home, fibre optique jusqu'à domicile) étant désormais autorisée à être commercialisée, le groupe Maroc Telecom entend en faire un vecteur de ses ventes, elle facilitera la navigation et offrira aux citoyens, aux internautes notamment aux jeunes marocains et à la presse de nouvelles possibilités de navigation avec un haut débit. Il faut souligner à cet égard que le groupe détient 99,96% des parts de marché de l'ADSL et de l'Internet, en hausse de 9%, et que le prix de facturation est le moins cher du monde arabe... Le président de Maroc Telecom qui, par ailleurs, n'hésite pas à mettre en exergue la RSE de son groupe, a affirmé que l'ADSL avec la FTTH pourra rendre service à des secteurs importants de la société, comme la santé, l'éducation, la culture et l'ouverture sur l'extérieur. Le succès se confirmant, le président de Maroc Telecom a affirmé que les investissements du groupe sont aujourd'hui «à des niveaux élevés, avec plus de 50% des investissements du groupe liés aux grands projets de modernisation des réseaux fixe (MSAN et fibre optique) et mobile (programme single RAN)» ! L'optimisme reste de mise.