Dans la mouvance de la bataille des chiffres qui prévaut actuellement sur la scène nationale, le HCP a voulu tirer au clair le quiproquo l'opposant au gouvernement. A ce titre, son écart moyen sur 6 ans entre les prévisions et les réalisations concernant la croissance n'est que de 0,8. Il fallait évidemment donner un coup d'arrêt à ce qui défraye la chronique depuis des semaines. Il s'agit bien entendu de la guerre des chiffres afférents aux prévisions macroéconomiques qui oppose le HCP au gouvernement. Il est de bonne guerre d'avoir des institutions étant à même de produire des chiffres prévisionnels reflétant la dynamique économique du pays. Mais pourvu que l'écart ne symbolise pas un cratère. Au risque de nous répéter, quelle crédibilité accorder à ce foisonnement de chiffres émanant d'entités différentes et qui convergent très peu ? Le professeur Najib Akesbi reste ferme à ce sujet. «Il existe une véritable anarchie concernant les prévisions économiques au Maroc», clamait-il récemment devant le cercle des économistes à Rabat. Plus alarmant encore, ce qui pourrait davantage horripiler le citoyen est que cette guéguerre des prévisions se politise de plus en plus. Cela dit, au vu de la teneur des journées «portes ouvertes» récemment organisées par le HCP, il en faudrait bien plus aux pourfendeurs pour décrédibiliser les prévisions économiques de l'entité dirigée par Ahmed Lahlimi Alami. Ce dernier a tenu à laver l'affront quant aux allégations visant à entamer sa probité et son intégrité. La fiabilité des méthodes utilisées «Je suis issu des rangs de l'USFP et j'en suis fier. Je dois être jugé sur la base des travaux que le HCP fournit et non sur mon ancienne appartenance politique», rétorque-t-il. Aussitôt, il s'empressa d'ajouter : «je n'ai aucun problème ni avec le gouvernement, ni avec le PJD pour leur mettre des bâtons dans les roues. Au-delà de ces quiproquos au relent politique, il est question de l'avenir de notre pays». Ces assertions montrent à l'évidence que les portes ouvertes étaient une mise au point cinglante pour faire taire les mauvaises langues et freiner les esprits calomnieux se prêtant à l'exercice de jeter le discrédit sur les prévisions du HCP, et ce, pour des velléités politiques. A en croire le Haut commissaire, la rigueur et l'exhaustivité des méthodes utilisées pour établir les prévisions macroéconomiques donneront beaucoup de fil à retordre à ceux qui livrent en pâture les chiffres de son département. A cela, s'ajoute que l'écart moyen entre les prévisions de croissance et les réalisations sur six ans (2007 à 2012) reste raisonnable en se référant à celui du FMI qui est de 0,8 de même que celui du HCP. De ce point de vue, il est clair qu'il subsiste une certaine convergence qui accorde plus de crédit aux prévisions émanant du HCP. Au-delà de cette approche comparative, il était question lors des portes ouvertes de faire de la pédagogie afin d'expliquer la démarche suivie et la méthodologie adoptée par l'entité dirigée par Lahlimi pour établir ses prévisions. A l'évidence, le HCP n'est pas sans savoir que de la pédagogie, il faut en avoir pour véhiculer son message et lever les équivoques surtout quand certains de nos confrères confondent le pourcentage de la dette publique globale reporté au PIB et celui du déficit budgétaire. Cela dit, les estimations du Haut commissariat se basent sur ce qui est communément appelé budget économique dont la première version est exploratoire (publiée au mois de juin) et la seconde prévisionnelle (diffusée au mois de janvier). L'intérêt de cette démarche est qu'elle est exhaustive pour circonscrire tous les indicateurs macroéconomiques. D'après les experts du Plan, celle-ci ne se limite guère aux uniques prévisions de croissance comme le feraient d'autres institutions. De plus, la valeur ajoutée du budget économique est qu'elle apporte un éclairage aux politiques économiques avant la préparation de la L.F. Afin de garantir l'hétérogénéité de la source des données, la collecte de statistiques et d'informations se fait entre autres, auprès de différents ministères et institutions internationales. Pour sa part, le budget exploratoire reste purement estimatif. Il présente (au mois de juin de chaque année) les perspectives de l'économie nationale pour l'année suivante à la veille de la préparation de la LF. Celui-ci se fonde essentiellement sur une production céréalière moyenne et la reconduction de la politique budgétaire de l'Etat. Bien évidemment, cette démarche exploratoire est corrigée par le budget économique prévisionnel qui vient chaque mois de janvier pour actualiser les perspectives économiques présentées en juin. Il se fonde entre autres, sur l'estimation de la production céréalière et les nouvelles perspectives de l'économie. Au-delà de ce descriptif, les ingénieurs du HCP restent persuadés que la cohérence macroéconomique globale qui dicte leurs travaux renforce la fiabilité de leurs prévisions. A ce titre, il est opportun de rappeler que l'écart concernant les prévisions et les réalisations de la croissance de l'INSEE France (sur six ans) a été de 0,5 (contre 0,8 pour le HCP). Cela a amené Lahlimi à affirmer que: «Les travaux du HCP sont au même niveau que ceux des pays l'OCDE». Au final, c'est au citoyen de trancher et de désigner le vainqueur de cette bataille des chiffres. Mais pour cela, le gouvernement devrait emboîter le pas au HCP pour mesurer l'écart moyen entre ses prévisions et les réalisations concernant la croissance sur une période allant de 5 à 10 ans!