Dans l'optique de rationaliser la création des SEGMA et de renforcer l'intégration de la décision budgétaire, ces entités devront couvrir au moins 50% de leurs charges par des recettes propres. Or, il se trouve que certaines d'entre elles ne compensent qu'un tiers de leurs dépenses. Le débat particulièrement nourri sur le niveau des dépenses publiques et celui du déficit budgétaire (6% du PIB en 2013 d'après le HCP), peut conduire à s'interroger sur la méthodologie adoptée par le gouvernement pour rationnaliser les dépenses publiques. La réforme de la Loi organique des Finances (LOF) s'inscrirait dans une trajectoire amenant l'Etat à assainir ses finances. C'est dans cette mouvance que le rapport relatif aux Services de l'Etat gérés de manière autonome (SEGMA) accompagnant la LF 2014, dresse l'état des lieux de la gestion (administrative et financière) de ces entités. Dans le même temps, celui-ci suggère des pistes de réforme étant à même de résoudre une équation complexe, celle conciliant la rationalisation des dépenses publiques et l'amélioration de la qualité des prestations fournies aux citoyens par les SEGMA. En effet, ces structures sont affranchies des contraintes liées à l'orthodoxie de la comptabilité publique. Elles disposent d'une autonomie financière et comptable. De ce fait, seule une partie de leur budget est constituée de subventions de l'Etat (un peu plus de 3 Mds de DH en 2013). Le reste doit provenir de leurs ressources propres découlant de la rémunération des services rendus. Cela dit, tout l'enjeu se situe au niveau de leur capacité à développer des ressources propres afin de faire face à leurs charges. Les nouvelles conditions d'éligibilité (à la création) qui se profilent dans le sillage de la refonte de la LOF 2014, deviennent de plus en plus ardues puisque ces entités devront couvrir au moins 50% de leurs charges par des recettes propres. Des conditionnalités qui se corsent Nul doute que cette barre de 50% des charges que les SEGMA devront couvrir par leurs ressources propres permettra à l'Etat de réduire les subventions accordées à ces établissements. En 2012, les dotations au titre du budget de l'Etat allouées aux SEGMA ont été estimées à plus de 893 MDH (en progression par rapport à 2011). Partant, il est clair que l'objectif affiché dans le cadre de cette réforme est d'abord de réduire les dépenses publiques. Faudrait-il aussi garder à l'esprit que le développement des ressources propres permettra à ces structures d'être moins dépendantes aux subventions publiques qui peuvent subir des coupes au gré de la conjoncture économique. Cela leur permet aussi d'avoir une situation financière plus confortable, ce qui facilitera l'amélioration de la qualité de leurs prestations. Pour autant, il est assez paradoxal de constater que dans un contexte appelant au renforcement des ressources propres des SEGMA, les dernières données disponibles sur le sujet font état d'un recul du taux de couverture des dépenses par les recettes propres. Celui-ci est passé de 106% en 2011 à 84% en 2012. Par ailleurs, le montant global des recettes des SEGMA a atteint 6 Mds de DH à la même période, dont 1,8 Md de DH de ressources propres. Le reste provient pour une part considérable des excédents reportés et dans une moindre mesure des subventions. L'autre fait marquant est que les SEGMA œuvrant dans le domaine de l'enseignement et de la formation professionnelle génèrent des ressources propres qui ne couvrent qu'un tiers de leurs dépenses. En revanche, ceux qui interviennent dans la santé ont pu au fil du temps satisfaire une grande partie de leurs dépenses par des ressources propres (supérieur à 50%). Un benchmark permet de constater que certains secteurs dans lesquels les SEGMA interviennent (infrastructures, économie, transport), demeurent plus rentables que d'autres (éducation, formation professionnelle). Partant, la propension d'augmenter les ressources propres des structures évoluant dans les secteurs précités est plus grande que pour les autres. Situation par domaine d'intervention En 2013, le nombre de SEGMA créés n'a pas évolué (205). L'impact positif de ces établissements sur les finances publiques reste certain, du fait que ces derniers par l'entremise de leurs ressources propres, arrivent à prendre en charge une partie de leurs dépenses que l'Etat devrait financer s'ils étaient de simples établissements publics dépourvus d'autonomie financière. Les entités autonomes intervenant dans le domaine de la santé (au nombre de 90) ont affiché des résultats de gestion prometteurs. Ce qui est corroboré par la réduction significative des subventions étatiques allouées à ces établissements. Celles-ci sont passées de 182 MDH en 2007 à seulement 52 MDH en 2011. Leur taux de couverture des dépenses par les recettes a atteint 106% à la même période. En revanche, les performances affichées par les SEGMA évoluant dans le domaine de la formation sont moins reluisantes à certains égards. Le taux de couverture de leurs dépenses par les recettes propres a chuté pour se situer à 30% en 2011. Pour autant, cela devrait-il conduire à jeter la pierre à ces établissements qui dispensent des formations à titre gratuit? La réponse est clairement négative puisque par essence, la mission qui leur est conférée est aux antipodes des objectifs de rentabilité. Par contre, les entités œuvrant dans d'autres actions sociales (pèlerinage à la Mecque) et d'autres opérant dans le transport, les télécommunications et les infrastructures affichent des taux de couverture allant de 150 à 200%. Dans le même temps, on note que les transferts budgétaires consacrés aux SEGMA en général ont augmenté de 85% en 2012. Cela n'est-il pas une manifestation de la volonté des pouvoirs publics à résorber les déficits sociaux (santé, éducation, formation, etc.) ? Au regard de la configuration du budget 2014, une réponse affirmative serait plus appropriée puisque 53% de celui-ci est consacré au domaine social. En somme, l'action sociale est antinomique avec les objectifs de rentabilité financière. Preuve en est que les recettes propres développées par l'ensemble des SEGMA en 2012 n'ont progressé que de 0,8% par rapport à 2011. La réforme visant la rationalisation de la création des SEGMA et le renforcement de l'intégration de la décision budgétaire devrait intégrer ce paramètre pour ne pas mettre à mal les principes phares du service public dont l'objectif de rentabilité doit être distingué de celui-ci de la performance.