Jawad Kerdoudi, président de l'Institut marocain des relations internationales (IMRI), expose son analyse sur les défis qui se posent à la classe moyenne au Maroc, tout en livrant quelques solutions pour l'élargissement démographique de cette catégorie sociale. Finances News Hebdo : En 2013, selon vous, quelles sont les tendances saillantes qui caractérisent la classe moyenne ? Progresse-t-elle suffisamment en ce qui concerne son élargissement ou fait-elle du surplace ? Jawad Kerdoudi : Je ne pense pas que la classe moyenne progresse au Maroc, étant donné que les salaires n'augmentent que très peu du fait de la crise économique. D'autre part, les ménages ont à faire face à des augmentations de dépenses, telles les deux augmentations du prix de l'essence opérées en 2013, ou le coût de la scolarité dans la mesure où beaucoup de familles préfèrent scolariser leurs enfants à l'école privée plutôt que publique. F. N. H. : A votre avis, avec un revenu moyen par ménage et par mois, estimé à 4.402 DH en 2007, cette classe moyenne est-elle en mesure, aujourd'hui, de faire face aux dépenses de consommation tout en épargnant ? J. K. : J'estime personnellement qu'un revenu mensuel de 4.402 Dh est très faible pour faire face aux dépenses de consommation, sans parler de l'épargne. J'avais posé cette question aux responsables du HCP qui m'avaient répondu que le Maroc étant un pays pauvre, sa classe moyenne est également pauvre. J'estime pour ma part que pour vivre moyennement au Maroc, une famille doit avoir un revenu mensuel minimum de 10.000 dh. F. N. H. : Selon vous, quelles sont les contraintes majeures qui pèsent sur la classe moyenne dans une conjoncture économique particulièrement difficile aujourd'hui ? J. K. : Les contraintes qui pèsent sur la classe moyenne sont une insuffisance de revenus et une augmentation des dépenses. On peut citer à titre d'exemple le coût élevé des loyers, des frais de transport, de la scolarité des enfants. Quant aux revenus, ils sont très faibles puisqu'il y a des salariés qui ne sont même pas payés au SMIC. F. N. H. : Enfin, quels sont les différents leviers à activer pour accroître le poids démographique de la classe moyenne dans le Maroc actuel ? J. K. : Pour augmenter le poids démographique de la classe moyenne au Maroc, la seule solution est le développement économique. Ce développement passe, de plus en plus, par le secteur privé, car le secteur public est saturé. L'Etat doit impérativement encourager la création d'entreprises et leur développement, car elles seules créent des emplois pérennes. Cela passe par l'instauration d'un climat favorable des affaires, la lutte contre la corruption et l'économie de rente, et un système fiscal équitable et incitatif.