Quel est le rôle exact d'un dépositaire central et quels sont les risques liés à son activité ? Nous avons posé la question à Fathia Bennis, PDG de Maroclear, qui nous explique entre autres les enjeux de l'activité prêt/emprunt de titres au Maroc. Finances News Hebdo : Le dépositaire central a un rôle important dans le bon fonctionnement d'un marché financier. Pourtant, nombreux sont les investisseurs particuliers qui ne comprennent pas ce rôle. Pouvez-vous, à ce titre, nous éclairer sur vos principales missions et les outils mis en œuvre pour les accomplir ? Fathia Bennis : Le rôle fondamental d'un dépositaire central est de donner à l'investisseur une preuve de la détention de ses titres ou droits du moment où ils revêtent une forme dématérialisée. Il met en œuvre un certain nombre de garde-fous permettant de sécuriser la garde ou encore l'exercice des droits. En effet, le développement des volumes échangés sur les marchés boursiers avec des échanges en milliers -si ce n'est des millions- rend quasi impossible une livraison physique des actifs, à chaque fois qu'il s'agit d'achat ou de vente, qui au demeurant peuvent être détruits, volés ou encore perdus. La dématérialisation permet d'échanger ses titres par virement électronique de compte à compte. Ces comptes sont ouverts auprès de banques de la place, dites intermédiaires financiers habilités. Il est à signaler que bon nombre d'investisseurs, notamment institutionnels, préfèrent dématérialiser l'ensemble de leurs titres, évitant ainsi une gestion d'actifs en formats papiers et permettant, au travers de relevés de titres reçus de leurs banques, d'avoir une vision globale sur leur patrimoine. F. N. H. : Quels sont les principaux risques liés à votre activité ? F. B. : Maroclear a, depuis plusieurs années, mis en place un cadre intégré permettant une gestion proactive des risques. En effet, l'importance systémique que revêt l'activité de Maroclear rend nécessaire la mise en place d'un certain nombre de dispositifs, notamment en termes de continuité d'activité, permettant de répondre à un certain nombre de scénario de sinistre. L'essentiel de nos investissements sur les dernières années sont quasi exclusivement réservés à l'amélioration de la résilience de nos plateformes. Bien que le savoir-faire technologique soit la clé de voûte de nos systèmes, nous sommes intimement convaincus que c'est le savoir-faire accumulé depuis plusieurs années, par nos équipes, qui est important. Dans ce cadre, nous avons initié un plan intégré de gestion des ressources humaines qui est en cours de mise en place et ce afin de fidéliser nos talents et d'en attirer d'autres. F. N. H. : Existe-il un risque d'erreur de dénouement ? Est-il fréquent ? F. B. : Bien entendu, il existe toujours des risques d'erreur, que cela puisse concerner le dénouement ou autre. L'essentiel est que des dispositifs de maîtrise, que ce soit en termes de contrôle ou de contrôle intégrés à nos plateformes soient adéquats. Nous avons, depuis quelques années, renforcé nos dispositifs de contrôle, au travers d'un déploiement progressif d'une fonction de contrôle interne et d'audit interne afin de raffermir les dispositifs de contrôles existants, avec bien entendu une responsabilisation de chacun des acteurs de la chaîne de traitement. F. N. H. : Il y a quelques mois, vous avez fait un cadeau aux investisseurs en baissant vos commissions de moitié. Est-ce que cela a eu des répercussions jusqu'à présent ? F. B. : Il ne s'agit pas d'un cadeau, il s'agit plutôt d'une volonté d'accompagner; d'être acteur du développement de la place. Les infrastructures de marchés sont appelées à baisser leur coût à chaque fois que les conditions de développement du marché, soit en termes de volume ou d'évolution constante des encours, sont là. Nous avons fait le pari de baisser nos commissions, même si ces conditions ne sont pas complètement réunies, puisque nous croyons dans le potentiel de développement de la place et dans la capacité des acteurs à dépasser les éventuelles difficultés. F. N. H. : Le démarrage de l'activité prêt/emprunt des titres a t-il influencé votre organisation ? De quelle manière ? Êtes-vous aujourd'hui complètement outillés pour gérer ces opérations ? F. B. : Nous croyons fermement que le développement du marché du prêt/ emprunt de titres passe par le développement d'une offre complémentaire à l'offre de prêt-emprunt bilatérale. Il s'agit d'une offre de Pool réservée uniquement aux acteurs institutionnels de la place, qui viendrait en support à l'offre bilatérale tout en intégrant des investisseurs disposant de positions très longues dans le développement de leurs valeurs. Nous avons, dans ce cadre, œuvré pour disposer d'une infrastructure à même d'offrir ce type de services, en collaboration avec les intervenants de la place. Nous le rappelons, Maroclear n'a pas vocation à s'adresser directement aux investisseurs et aujourd'hui nous avons déjà noté, chez certains intervenants de la place, un certain intérêt pour la question. F. N. H. : Enfin, est-ce que Maroclear distribue des dividendes à ses actionnaires ? Si oui, peut-on avoir un ordre d'idée sur leurs montants ? F. B. : Nous sommes une infrastructure de marché à vocation de service public; il est bien entendu que l'objectif de nos actionnaires est non pas une distribution de dividendes, mais un meilleur service rendu à la communauté financière et une résilience éprouvée de nos infrastructures. Il est à noter que Maroclear a, depuis son démarrage, autofinancé l'ensemble des projets qu'elle a pu mener, tout en gardant des équilibres financiers sains, gage d'un développement en phase avec les ambitions de la place de Casablanca de devenir un hub financier régional.