La Banque centrale a brillé, ces dernières années, par son succès en matière de politique de stabilité des prix et du système financier. En revanche, elle essuie un bon nombre de critiques concernant la dynamique qu'elle pourrait insuffler à l'activité économique. Cela l'a-t-il induit à changer son fusil d'épaule ? Il serait difficile de nier que la politique budgétaire émaillée par ses déficits a propulsé la politique monétaire au devant de la scène. Celle-ci s'est constituée comme une pièce maîtresse de la politique économique du pays. Dans ce contexte, certains observateurs estiment que Bank Al-Maghrib (BAM) mène une politique monétaire empreinte d'une dose expansionniste, voire accommodante. En revanche, il convient de tempérer cette assertion car cette politique dite accommodante, ne le serait que partiellement. Le professeur Mohammed Akaaboune préfère plutôt parler d'une politique monétaire souple (voir entretien). Pour d'autres, le maintien par BAM du taux directeur à 3%, en juin dernier, corrobore l'idée selon laquelle celle-ci s'ankylose toujours dans une politique monétaire restrictive. Cela dit, il est clair que BAM fait montre d'un dynamisme dans le domaine de résorption du manque de liquidité bancaire. Rien qu'en juillet 2013, la Banque centrale avait injecté plus de 66 Mds de DH afin d'endiguer la raréfaction du cash au niveau des banques. A ce stade, l'unique interrogation à se poser est de savoir si cette intervention a les effets escomptés. Pour le professeur Akaaboune, ces injections de liquidités n'arrangent guère le manque de liquidité structurel des banques, du fait que celles-ci sont dans l'obligation de rembourser ces prêts majorés d'un taux d'intérêt. Au regard de ce qui précède, si les résultats de la politique monétaire demeurent mitigés, en revanche un certain assouplissement de celle-ci semble se profiler. Inflexion de la politique monétaire ! Ces dernières années, en raison de la conjoncture économique défavorable, la politique monétaire de l'institution dirigée par Abdellatif Jouhari a fait l'objet de plusieurs critiques. La lutte acharnée contre l'inflation, parfois au détriment de la croissance, lui a valu des remontrances venant d'un bon nombre d'experts, et même des institutions les plus réputées (HCP, CMC). Aujourd'hui, une certaine inflexion de la politique monétaire s'amorce afin d'insuffler une nouvelle dynamique à la croissance. Cela peut être illustré par la révision du taux de réserve monétaire des banques. Celui–ci est passé de 16,5% en 2008 à 4% aujourd'hui. En 2012, cette baisse avait permis de libérer plus de 7 Mds de DH qui sont venus, tant soit peu, desserrer l'étau sur les contraintes de liquidité interbancaire. Le nouveau virage abordé par BAM pour le renouveau de la politique monétaire ciblant l'accélération de la dynamique économique, est perceptible à travers d'autres exemples. Il convient de citer les nouveaux dispositifs relatifs au financement de la PME et de la TPE, mis en place lors du dernier conseil de BAM. Ce plan est doté de 8 Mds de DH et a, entre autres, pour objectif de financer les entreprises exportatrices et industrielles. Pour l'heure, le maintien du taux directeur à 3% serait le reflet d'une politique monétaire restrictive. Toujours est-il qu'il n'existe pas un lien systématique entre la baisse du taux directeur et la hausse des crédits bancaires. On se rappelle de la baisse de celui-ci, qui était passé de 3,25% à 3% en 2012. Et pourtant, cette baisse n'avait guère eu d'impact positif sur le taux d'accroissement des crédits bancaires. Les raisons découlent parfois du tassement des demandes de crédits d'investissement, provoqué par un climat général des affaires délétère. Tout cela prouve toute la complexité de la politique monétaire, car l'utilisation de certains instruments financiers peut ne pas avoir d'effet immédiat sur l'économie réelle. Au final, rien ne garantit avec certitude l'embellie de l'économie, si BAM mettait en place une politique monétaire accommodante.