Mine de rien, avec une belle sûreté de touche, John Fante se livre à une analyse spectrale d'une famille d'émigrés italiens ardemment croyante, se constituant d'une flopée d'enfants, une mama charismatique et un papa - difficile - qu'on ne voit jamais beaucoup. De là, le romancier parvient à nous rendre attentifs et compatissants à ses personnages. De Chacun d'eux il tire, non pas une vérité, mais des fragments révélateurs d'authenticité. Arturo, bambino parmi les bambini, n'a qu'un leitmotiv : quitter le Colorado pour devenir un écrivain reconnu. Car il sait écrire. Il est l'intellectuel de la famille. Quittant le foyer familial pour Los Angeles, il débarque dans une chambre d'hôtel miteuse, prêt à saisir la vie à bras-le-corps. Sitôt, vénérant les femmes ainsi que la littérature, il parvient à se faire éditer une petite nouvelle. L'égo en l'air et les espérances gonflés à bloc, Mister Bandini - c'est ainsi qu'on le nommera à présent - fait croire à tout le monde qu'il a de l'argent ou qu'il est en passe d'avoir une pluie de dollars d'autant que les éditeurs s'arrachent ses écrits. John Fante dans un style tonique nous livre ce parcours de misère - qui nous fait toucher du doigt - dans la Californie de la fin des années trente. Un roman largement imbibé des expériences et du vécu propres de l'auteur. Fante sait, avec son style comique, cynique, presque grossier parfois, transcrire ces souffrances, ces déceptions avec toujours ce vague espoir derrière. Développant ainsi, un récit extraordinairement lucide, profond, prémonitoire et remarquablement bien écrit. («Demande à la poussière», un roman semi-autobiographique américain de John Fante, publié en 1939.)