Les privatisations ont rapporté gros à lÉtat. La dernière opération concernant les sucreries a été menée conformément aux objectifs. Il y a encore des bijoux à céder, mais pas beaucoup. Comment lEtat pourra-t-il alors faire face à ses dépenses budgétaires ? La politique budgétaire au Maroc a beaucoup souffert de la détérioration de la balance commerciale et des lourdes dépenses que supporte le budget de lÉtat. Ces dépenses ont été en quelque sorte compensées par des recettes parfois imprévisibles et limitées de la privatisation. Mais toujours est-il que ces recettes demeurent somme toute exceptionnelles et sont menacées dépuisement. À fin avril 2005, comme la souligné Abdelaziz Talbi, directeur des entreprises publiques au ministère des Finances et de la Privatisation, 66 entreprises ont totalement ou partiellement été privatisées depuis 1993. Talbi estime que ces privatisations ont rapporté 7,55 milliards deuros tout en permettant dattirer de nombreux investissements étrangers. En matière de classement, il est à noter que le Maroc occupe le premier rang parmi les pays arabes et la quatrième position au niveau du continent africain. Inutile de rappeler que limpact de la privatisation a été ressenti au niveau du dynamisme du marché financier marocain tout en permettant notamment une sensible augmentation des volumes des échanges de capitaux à la Bourse de Casablanca de 5 MDS de DH à plus de 200 milliards de DH entre 1989 et 2004. Cosumar rafle tout Aujourdhui encore le gouvernement continue sur la même lancée et vient de céder au groupe Cosumar la totalité de ses participations détenues dans le capital des sociétés sucrières Surac, Sunabel, Suta et Sucrafor, pour un montant de 1.367 MDH. Il sagit, en effet, dun processus qui a mis beaucoup de temps à se concrétiser. Par le biais de cette opération, le gouvernement a marqué sa ferme volonté de privatiser entièrement le secteur sucrier. Parmi les offres présentées, celle de Cosumar restait la plus intéressante en termes dinvestissements industriels, de valeur ajoutée dans le secteur agricole, de prix dacquisition et de valorisation des ressources humaines. En matière dinvestissement, le groupe projette dinjecter près de 1.600 MDH sur les six prochaines années et table sur une augmentation des superficies cultivées de 40% du revenu des agriculteurs sur la prochaine décennie. La DEPP en bon meneur Le rôle de la direction des établissements et de la privatisation a été important dans le bon déroulement des opérations. Depuis 1993, la DEPP a engagé 97 opérations de privatisation. Bien que le nombre des privatisations ait diminué depuis 10 ans, les recettes, elles, ont augmenté. La cession de 35% de Maroc Telecom en 2001, son entrée en Bourse en 2004 et la cession de 16% de son capital en 2005 y sont pour beaucoup. Les autres secteurs sur la liste dattente et qui sont susceptibles de rapporter beaucoup à lÉtat sont laérien et les phosphates. Néanmoins, pour lheure, aucune information ne filtre de source officielle. Le PDG de la Royal Air Maroc (RAM) ne cesse de répéter, chaque fois que loccasion se présente, que la privatisation nest pas la panacée pour un tel secteur. A loccasion dun forum sur les privatisations, le directeur de la DEPP a dévoilé le programme des privatisations. «Il reste un grand potentiel dentreprises à privatiser, mais le Maroc ne privatisera que ce qui est viable». Figurent sur la liste des privatisables pour 2005 et 2006, la Comanav, Biopharma, Drapor, de même que les 34% restant de la participation de Maroc Telecom et les 20% de celle de la Régie des Tabacs. Leur estimation nétant pas encore effectuée, lentreprise qui devrait rapporter gros est la COMANAV qui produit une valeur ajoutée de 200 MDH, mais dont les fonds propres ne se limitent quà 136 MDH en 2003. Une question demeure cependant posée : lÉtat est-il appelé à vendre tous ses bijoux pour asseoir sa politique budgétaire ? Si le Maroc a fait lessentiel des recettes exceptionnelles en se basant sur celles liées à la privatisation, quadviendra-t-il au-delà de 2006 ? Comment oeuvrer afin dassurer léquilibre dun budget pour lequel les recettes des privatisations ont pour beaucoup compté ? Les dépenses fiscales qui consistent en une évaluation des exonérations fiscales dont ont profité certains secteurs et sur lesquelles se penche actuellement le ministère des Finances et de la privatisation, seront-elles à même de compenser la baisse des recettes de privatisation ? Une autre formule au-devant de la scène Force est de constater que ces dernières années, la gestion déléguée commence à prendre du tonus. Il sagit en effet dun partenariat public-privé qui permettra aux investisseurs davoir plus de visibilité afin de sengager en matière de concession. Un projet de loi est aujourdhui conçu par la DEPP. LEtat pourrait de cette manière concéder des secteurs quil ne pourrait bien gérer et, partant, soccuper des secteurs stratégiques qui resteront sous sa responsabilité (santé, éducation...). Des sommes intéressantes seraient versées dans les caisses de lEtat, mais parviendraient-elles à compenser celles liées à la cession ? Rien nest sûr. Mais il faut dire que largentier du Royaume ne se fait pas trop de soucis. Une liste très longue de services cessibles est dores et déjà dressée par le département concerné relevant du ministère des Finances.