Même si la finance islamique demeure à l'état embryonnaire au Maroc, le pays s'est fixé comme objectif de se positionner en tant que leader en Afrique. Si pour cela il faut avoir un cadre réglementaire propice, la formation de ressources qualifiées en la matière reste un facteur majeur. Dr Ali Alami Idrissi, Directeur général d'Optima finance consulting et Directeur du master finance islamique de l'Université Internationale de Rabat, est confiant que la finance islamique deviendra un compartiment important du paysage financier marocain. Finances News Hebdo : L'UIR est la première à proposer un master en finance islamique. Comment a été accueillie cette formation dans un contexte où la FI est à ses balbutiements au Maroc ? Et quel est le profil des inscrits ? Dr Ali Alami Idrissi : Effectivement, la finance islamique est encore à un état embryonnaire. Mais le Maroc a récemment marqué une volonté de s'inscrire dans le développement de cette industrie, et s'est fixé comme objectif de se positionner en tant que leader en Afrique, et plus particulièrement au Maghreb. Le cadre légal est en cours de révision et les chantiers à venir sont très nombreux. L'un des plus importants pour la réussite de ce challenge est celui de la formation des ressources humaines qualifiées dans le domaine. Dès l'obtention de l'autorisation du ministère de l'Enseignement supérieur, de la recherche scientifique et de la formation des cadres, et l'annonce du lancement de notre master en finance islamique, nous avons été assaillis de demandes d'inscriptions. Les candidats avaient principalement un background financier, notamment ceux issus des écoles de commerce ou d'ingénieurs. Et nombre d'entre eux justifiaient d'une expérience professionnelle. F. N. H. : Quels sont les objectifs phares de cette formation et comment est-elle organisée, notamment pour les inscrits déjà en activité ? A. A. I. : Notre master en finance islamique est le premier du genre au Maroc et dans la région. La formation se déroule sur deux années et traite des différents compartiments de la finance conventionnelle et de la finance islamique. Elle est assurée par un corps professoral composé de professeurs universitaires de renom et de professionnels du monde de la finance et de l'assurance islamiques. La formation se place dans une optique d'excellence, et nous sommes convaincus que notre master sera considéré comme «le master» de référence en FI dans la région. Aussi, nous sommes en cours de finalisation de partenariats avec des universités prestigieuses dans le domaine. Notre principal objectif est de former les futurs responsables et hauts cadres de l'industrie financière islamique au Maroc -banques, compagnies d'assurance/Takaful, sociétés de gestion, fonds d'investissement... Pour cela, nous dispensons à nos participants une formation leur permettant de maîtriser les contrats, produits et services financiers tels que pratiqués par les établissements financiers islamiques. F. N. H. : Quelle est la difficulté d'assurer une pareille formation de l'industrie des services financiers islamiques alors que le pays ne dispose pas encore d'un cadre réglementaire précis, la nouvelle loi bancaire n'ayant pas encore été adoptée ? A. A. I. : Ce n'est pas une difficulté mais une opportunité. L'amendement de la loi bancaire, qui intègre un chapitre dédié aux banques islamiques «participatives», sera très certainement soumis au Parlement lors de la session du printemps. Il s'agit donc d'une échéance imminente, et la formation tombe donc à point nommé. Le temps que la loi soit adoptée et que les circulaires de Bank Al-Maghrib diffusées, nos lauréats seront prêts pour animer ce nouveau compartiment du système financier marocain. Le timing pour lancer notre formation n'est pas fortuit. Nous avons souhaité être les accompagnateurs, en termes de formation de « hauts cadres», du développement de la finance islamique au Maroc en assurant une formation d'excellence intégrant les différents compartiments (bancaire, assurantiel/Takaful, gestion de fonds, ....). Nous contribuons à notre niveau à la réussite de ce projet de développement du système financier national. F. N. H. : Nous avons constaté que nombre de personnes issues du monde bancaire et de conseil suivent ce master. Quelles sont leurs principales appréhensions et demandes ? A. A. I. : Effectivement, nombre d'inscrits à notre master sont issus des secteurs bancaire et financier. Ceci montre l'intérêt de la profession pour ce type de formation. Comme rappelé précédemment, la finance islamique représentera à terme un compartiment important du paysage financier marocain, et le besoin en hauts-cadres qualifiés dans le domaine n'en sera que plus important. Raison pour laquelle nos participants ont choisi d'anticiper ce besoin et de se positionner sur un secteur à la fois prometteur et qui répond parfaitement à leur conviction et à leurs aspirations. L'appréhension que certains pourraient avoir est qu'une fois que l'amendement de la loi bancaire adopté et les circulaires de Bank Al-Maghrib mises en circulation, quelques acteurs tardent à se lancer dans le domaine. Cependant, compte tenu de la volonté politique et vu que la plupart des banques ont déjà commencé à se préparer, nous sommes convaincus que les différents opérateurs économiques ne ménageront pas leurs efforts pour assurer la réussite du lancement au Maroc de l'industrie financière islamique.