Une Loi de Finances bâclée, sans profondeur et choisissant la facilité, selon l'Alliance. L'opposition la juge anticonstitutionnelle. L'Alliance des Indépendants (ADI) a tenu dernièrement la deuxième édition de son forum mensuel «Les Mardis de l'ADI ». Il s'agissait cette fois de discuter des enjeux de la Loi de Finances 2013 et de dresser un bilan d'étape de l'action du gouvernement sur le volet économique. Cet évènement a vu la participation de Abdelkader Boukhriss, président de la Commission fiscalité à la CGEM pour porter la voix du patronat, Amal Amri, de l'UMT, en sa qualité de syndicaliste, Moncif Belkhayate en sa qualité de membre du RNI, parti d'opposition, ainsi qu'un ensemble de membres actifs de l'Alliance opérant dans plusieurs domaines d'activité et pour la plupart des entrepreneurs. Patronat, syndicats et partis d'opposition s'accordent pour dresser le même constat : «le gouvernement n'a pas répondu aux attentes des partenaires économiques», déclare Amal Amri. Elle ajoute que «le gouvernement donne l'impression de ne pas avoir pris le temps d'étudier la situation économique avant d'établir cette Loi de Finances qui n'est qu'une reconduction de l'existant avec une pseudo note sociale». La CGEM reproche au gouvernement Benkirane de ne pas avoir élargi l'assiette fiscale pour s'attaquer aux niches fiscales et réduire la pression sur les entreprises et leurs salariés qui se déclarent déjà. Le gouvernement aurait choisi la facilité en supprimant le taux d'IS réduit de 15% appliqué aux PME et en augmentant l'impôt sur les hauts salaires. Selon Amal Amri, cet impôt ne serait pas efficace. Son but est plus symbolique. Pour sa part, Abdelkader Boukhris a déclaré dans ce sens que «l'accès à l'information auprès du Fisc est impossible pour pouvoir évaluer correctement l'assiette de ce nouvel impôt sur le revenu et juger de son efficacité. Pour discuter convenablement avec le gouvernement, nous devons avoir accès aux mêmes informations». Sur le volet fiscal, le patronat aurait souhaité également l'introduction d'un impôt sur les sociétés qui soit progressif et qui tienne compte des spécificités de chaque activité. Un expert-comptable, membre de l'ADI, signalait que le chiffre d'affaires d'une société de négoce contient moins de valeur ajoutée qu'une société de conseil. Considérer le chiffre d'affaires comme unique critère pour qualifier une PME serait, dans cet exemple, plus contraignant pour l'entreprise de négoce qui dégage moins de marge sur son chiffre d'affaires. Aussi, pour éviter l'évasion fiscale, certaines sociétés s'éclatent en plusieurs S.A.R.L à faible chiffre d'affaires; une analyse de la répartition du capital en plus de la nature d'activité permettrait de mieux cerner les PME qui ont réellement besoin d'un soulagement fiscal. L'Alliance des Indépendants regrette également que la refonte de la TVA ne soit pas proposée cette année, alors que cet impôt, supposé être neutre, crée en réalité une distorsion dans la trésorerie des entreprises. Mouncif Belkhayate, quant à lui, estime que cette Loi de Finances est un véritable retrait vis-à-vis des avancées qu'a connues le Maroc durant cette décennie. «Nous rejetons en bloc cette Loi de Finances qui est anticonstitutionnelle», déclare t-il. Selon lui, les opérateurs économiques ont perdu confiance dans l'économie à cause de la discontinuité des réformes, ce qui freine l'investissement privé.