Le Partenariat de Collaboration pour les Forêts Méditerranéennes (PCFM) réunit à ce jour 15 organisations membres. L'objectif principal du PCFM est d'améliorer le cadre politique de la gestion durable des forêts et de leurs biens et services dans six pays : Algérie, Liban, Maroc, Syrie, Tunisie et Turquie. Avec pour finalité de faire reconnaître le rôle essentiel de la forêt méditerranéenne pour le développement durable des territoires méditerranéens. Ludwig Liagre, conseiller de la Coopération allemande au développement, GIZ/ Regional Project Silva Mediterranea – CPMF, revient sur les actions entreprises par le Maroc dans ce cadre. • Finances News Hebdo : Concernant l'événement parallèle organisé dernièrement dans le cadre de la Conférence Rio+20, quel en est l'ultime objectif ? • Ludwig Liagre : L'événement parallèle, organisé par les administrations forestières de l'Algérie, du Liban, du Maroc, de la Tunisie et de la Turquie, intitulé : Les Forêts Méditerranéennes pour le Développement : Une clé pour adapter les politiques, les territoires et les sociétés au changement climatique dans la région Moyen Orient / Afrique du Nord, vise à faire reconnaître le rôle essentiel de la forêt méditerranéenne pour le développement durable des territoires méditerranéens. Il est l'occasion de présenter sur la scène internationale quelques unes des initiatives innovantes qui permettent aux forêts méditerranéennes (parmi lesquelles les forêts marocaines) d'être un élément crucial des stratégies pour une économie verte. Cet événement parallèle est aussi l'occasion de présenter à la communauté internationale le Partenariat de Collaboration pour les Forêts Méditerranéennes (PCFM). • F. N. H. : Qu'est-ce que le Partenariat de Collaboration pour les Forêts Méditerranéennes exactement ? • L. L. : Afin de renforcer la coopération régionale et traiter conjointement les défis communs à plusieurs pays de la région Moyen Orient / Afrique du Nord, tels que le maintien des nombreux biens et services socio-économiques et écologiques des forêts méditerranéennes dans un contexte de changement climatique, plusieurs organisations opérant dans la région associent leurs efforts dans le cadre du Partenariat de Collaboration pour les Forêts Méditerranéennes. Il s'agit d'un accord signé en septembre 2010, comptant 15 organisations membres en 2012. Celles-ci proviennent du secteur étatique, non-gouvernemental et de la recherche. Le secrétariat du comité sur les questions forestières méditerranéennes Silva Mediterranea, sous l'égide de la FAO, est en charge de la coordination de ce partenariat. L'objectif principal du PCFM est d'améliorer le cadre politique de la gestion durable des forêts et de leurs biens et services dans les six pays : Algérie, Liban, Maroc, Syrie, Tunisie et Turquie, en profitant des synergies entre les institutions et organisations partenaires. Le PCFM comprend quatre composantes d'action : 1) le renforcement des capacités des administrations forestières ; 2) l'intensification de la coordination intersectorielle ; 3) l'amélioration des capacités de communication, de l'information et des connaissances sur l'importance d'une gestion durable des forêts et de leurs biens et services dans un contexte de changement climatique ; 4) la mobilisation de soutiens externes et de partenariats. • F. N. H. : Au Maroc, quelles actions sont entreprises pour sauvegarder la forêt ? Et est-ce que cette problématique est suffisamment prise en considération dans la stratégie marocaine de l'économie verte ? • L. L. : Au Maroc, le Haut-Commissariat aux Eaux et Forêts et à la Lutte contre la Désertification (HCEFLCD) a une politique très ambitieuse de protection, conservation et valorisation des espaces naturels et forestiers. De nombreuses initiatives très innovantes doivent être soulignées, comme le travail sur le mécanisme de compensation pour mise en défens au profit des usagers des espaces forestiers, ou le travail avec les coopératives forestières. Le développement des cartes de risques dynamiques pour la prévention et l'amélioration des interventions dans la lutte contre les incendies place le Maroc comme précurseur en matière de lutte contre les feux de forêts dans la région méditerranéenne. Par ailleurs, les efforts pour la certification de la gestion forestière durable ou pour l'évaluation économique des biens et services fournis par les écosystèmes forestiers, témoignent d'une orientation forte de l'administration forestière marocaine pour le développement durable. Des efforts doivent être faits pour que tous les enjeux liés aux forêts soient complètement intégrés dans les stratégies pour une économie verte, mais les nombreux échanges et partenariats entre le HCEFLCD et le Département de l'Environnement du ministère de l'Energie, des Mines, de l'Eau et de l'Environnement sont très encourageants dans ce sens. • F. N. H. : Et dans le cadre de la coopération Sud-Sud entre les pays du Partenariat de Collaboration sur les Forêts Méditerranéennes, quelles sont les initiatives majeures ? • L. L. : Parmi les initiatives de coopération Sud-Sud qui sont prometteuses, nous pouvons citer par exemple le processus de coopération des pays méditerranéens sur la question de la prévention et de la lutte contre les incendies. Les pays du PCFM sont d'ailleurs actuellement dans un processus d'intégration du système EFFIS (Système Européen d'Information sur les Feux de Forêts). Ils collaborent également dans le cadre de plusieurs projets d'échanges de connaissances et de bonnes pratiques sur la gouvernance locale et la gestion durable des écosystèmes forestiers dans un contexte de changement climatique. Sont à noter également les efforts d'analyse du potentiel du mécanisme REDD (Réduction des Emissions liées à la Déforestation et à la Dégradation des Forêts), le travail sur les politiques et stratégies forestières en vue de mieux valoriser les biens et services des forêts méditerranéennes, ainsi que la collaboration active dans de nombreux événements pour la promotion des spécificités des forêts méditerranéennes. Par exemple, la 3ème Semaine Forestière Méditerranéenne, en cours de préparation, se tiendra du 17 au 21 mars 2013 à Tlemcen, en Algérie, sur le thème «Forêts Méditerranéennes pour le développement local : quelles stratégies d'atténuation et d'adaptation en réponse au changement global?». • F. N. H. : Vous qui êtes sur place à Rio, quels seront les temps forts de cette rencontre qui fait le point 20 ans après le Sommet de la Terre, tenu précisément à Rio en 1992 ? • L. L. : La conférence Rio+20 est une occasion unique de faire émerger des thématiques nouvelles et de réaffirmer l'importance de certains écosystèmes comme les forêts méditerranéennes. Dans ce sens, la «Journée de dialogue du développement durable», qui s'est tenue sur les forêts le 17 juin, a permis à des acteurs de tous horizons (décideurs, société civile, recherche, entreprises, etc) de discuter de plusieurs recommandations clés pour le devenir des forêts de la planète. Trois de ces recommandations ont particulièrement retenu mon attention face aux enjeux de la région Moyen-Orient / Afrique du Nord : • promouvoir la science, la technologie, l'innovation et le savoir-faire traditionnel pour relever le défi de la valorisation économique des forêts sans les dégrader; • soutenir l'agroforesterie comme une option pour assurer l'équilibre entre la demande alimentaire et le besoin en bois de feux, tout en réduisant les pressions sur les forêts naturelles ; • intégrer les principes d'inclusion et de transparence vis-à-vis des populations locales pour une meilleure gouvernance forestière. Le segment de haut niveau des 20, 21 et 22 juin où se retrouveront de nombreux chefs d'Etat, sera l'opportunité de prendre acte de certaines recommandations qui seront faites dans la déclaration finale de la Conférence Rio+20. Au-delà de la dimension politique de Rio+20, cette manifestation est une extraordinaire occasion de rencontrer les acteurs du développement durable et de faire émerger des idées nouvelles pour un monde plus vert dans lequel les forêts méditerranéennes doivent se faire une place. Propos recueillis par Imane Bouhrara