Mohamed benchaâboun, ministre de l'économie et des Finances, lors de la conférence de presse de présentation du PLF 2019. Photo : Sohaib Zefri/FNH Le Maroc va sortir sur le marché international de la dette début 2019. Les professionnels partagés sur le sort des taux.
Analystes et gérants de portefeuilles sont partagés sur l'orientation du marché des taux : certains y voient une stagnation prolongée proche des niveaux bas actuels, quand d'autres craignent des tensions sur les deux derniers mois de l'année 2018 et début 2019. Certes, les levées nettes du Trésor ont fortement reculé, passant de 19 Mds à 5 Mds de dirhams sur les premiers mois de l'année, donnant raison aux premiers. Mais c'est sans compter sur les pressions qui proviendront, comme l'explique la recherche de CDG Capital dans une note récente, de l'accélération du rythme d'exécution budgétaire et de l'importance des tombées prévues au deuxième semestre, dont le montant s'élève à environ 41,6 Mds de dirhams sur la deuxième moitié de l'année contre 32 Mds l'an dernier à la même période. Les regards avisés ont d'ailleurs remarqué une accélération des levées du Trésor depuis juillet. Par ailleurs, le déficit de liquidité bancaire se creuse, ce qui conforte ce raisonnement. Le PLF 2019 présenté, avec une dépense publique additionnelle de 27 Mds de dirhams pour son volet social, est aussi de nature à pousser les taux vers le haut.
Eléments de langage Pour les professionnels de la gestion, les éléments de langage utilisés par le ministre des Finances devant le Parlement et face à la presse ont été choisis pour donner un message cohérent et pour expliquer les orientations budgétaires au grand public, mais aussi pour détendre le marché des taux ou, du moins, éviter qu'il ne s'enflamme. Ex-banquier, Mohamed Benchâboun connait les conséquences fâcheuses d'une éventuelle remontée des taux sur l'économie, surtout que sur le plan macroéconomique, les indicateurs ne sont pas au beau fixe. Ceci peut freiner une croissance déjà au ralenti. La sortie sur le marché international de la dette est d'ailleurs le principal message adressé au marché des taux. Il montre la volonté du Trésor et de l'Etat de ne pas peser sur la capacité de financement de l'économie. Les privatisations et les remboursements des crédits TVA, dont une partie (les crédits TVA) devrait revenir, selon nos informations, sous forme de dépôts auprès de la Trésorerie générale du Royaume, devraient aussi maintenir le marché dans son accalmie actuelle, bien que les remboursements de TVA puissent peser sur la liquidité bancaire. D'ailleurs, le mécanisme d'affacturage mis en place entre l'Etat et les banques pour rembourser les crédits TVA permet de reclasser les dettes de l'Etat dans le système bancaire et améliorer la signature du Maroc, en vue par exemple d'une sortie à l'international. Enfin, l'exposé des mécanismes de partenariats public/public ou privé/privé pour financer quelque 12 Mds de DH de dépenses d'investissement est également de nature à tempérer les éventuelles ardeurs sur les taux. Le département des Finances réussira-t-il son pari de relance budgétaire sans pression sur les taux ? En tout cas, l'exercice d'équilibriste est bel et bien lancé. ■