- Poursuite des grandes réformes et soutien aux politiques sociales sont au coeur de la lettre de cadrage. - Un budget hautement inspiré du discours du trône.
La note de cadrage relative au Projet de Loi de Finances 2019 (PLF) est tombée durant le mois d'août, quelques jours après le discours du trône où le Roi a mis l'accent sur la nécessité de relancer les grands chantiers structurants, avec pour trame de fond le pouvoir d'achat des citoyens et la mise en place des filets sociaux (avec l'INDH dans sa version 3.0 notamment). Le département du Chef de gouvernement s'en est bien entendu hautement inspiré, ne prenant pas le risque de s'éloigner ou d'apporter des compléments aux hautes orientations du Chef de l'Etat. Sans surprise, on y retrouve les éternelles fondations des chantiers durables du Royaume, qui peinent des fois à se matérialiser et à se concrétiser aux yeux des citoyens : régionalisation avancée et déconcentration administrative essentiellement. D'ailleurs, une charte de la déconcentration a été promise par le Chef du gouvernement pour la fin du mois d'octobre prochain. Un engagement salutaire qui devrait permettre aux responsables locaux la prise de décisions et l'exécution des programmes de développement économique et social de manière plus efficace.
Hypothèses de croissance : sans prise de risque
Faisant preuve de lucidité, le département de Saad Eddine El Othmani a basé ses projections budgétaires sur des hypothèses pour le moins normatives, pour ne pas dire peu ambitieuses : un taux de croissance nationale de 3,2% en 2019 et un déficit à 3%. La note de cadrage prévoit également la poursuite de la dynamique des secteurs non agricoles qui enregistreront une croissance de la valeur ajoutée de 3,7% contre 3,3% en 2018, sous l'hypothèse d'un prix du baril de pétrole à 68 dollars et d'une récolte céréalière à 70 millions de quintaux. Sur le plan financier, pour maintenir le déficit à des niveaux acceptables par les «partenaires financiers» du Royaume, tout en faisant de la relance budgétaire, le département d'El Othmani a opté pour du financement à levier. La lettre de cadrage stipule en effet que l'année 2019 connaîtra la mise en place d'un «nouveau mécanisme de financement des projets d'investissement programmés dans le cadre du budget général». Un peu plus loin, il est expliqué que ce mécanisme sera «basé sur le partenariat institutionnel, dans le cadre de la promotion du partenariat public-privé».
Politique sociale : large palette
Enseignement, santé, emploi, protection sociale... le PLF 2019 devrait mettre le paquet sur les politiques sociales. La lettre de cadrage incite d'ailleurs les départements à mettre en œuvre les hautes orientations royales relatives aux programmes visant à soutenir la scolarisation, lutter contre le décrochage scolaire, généraliser l'enseignement préscolaire et fondamental et simplifier le contenu pédagogique en l'orientant vers le renforcement des capacités des élèves en termes de réflexion, d'analyse, de recherche et d'auto-apprentissage. D'après la note, le gouvernement va veiller, à partir de l'année 2019, à remédier aux dysfonctionnements enregistrés lors de la mise en œuvre du programme d'assistance médicale Ramed, tout en revoyant drastiquement le système national de la santé à travers la mise en œuvre du plan de santé 2025 de manière à lancer, dès 2019, le programme de couverture médicale au profit des professionnels, des indépendants et des non-salariés. Le gouvernement compte également procéder à une restructuration complète et profonde des programmes et des politiques nationales de soutien et de protection sociale, tout en veillant à mettre en place rapidement le Registre social unique. Il s'agit également de lancer la troisième phase de l'Initiative nationale pour le développement humain (INDH), poursuivre la mise en œuvre du programme de réduction des disparités territoriales et d'élargissement de la couverture médicale, assurer la pérennité des ressources du Fonds d'appui à la cohésion sociale et poursuivre la simplification et l'unification des dispositions en faveur des femmes divorcées et marginalisées, ainsi que leurs enfants, afin qu'elles puissent bénéficier du soutien du Fonds d'entraide familiale. La palette de chantiers est large, et le gouvernement devra jouer aux équilibristes pour éviter les déraillements budgétaires. Une situation qu'avait connue le Maroc en 2011 et qui avait mis 5 ans à se résorber. A l'époque, le secteur privé a été mis à contribution et la politique de la carotte fiscale tournait à plein régime, avec les mécanismes d'amnisties notamment pour élargir l'assiette sans trop augmenter la pression sur les contribuables. Le gouvernement devra maintenant faire preuve de courage et s'attaquer enfin au dossier du train de vie de l'Etat. C'est tout le mal qu'on lui souhaite ! ■