- Des études et des analyses stratégiques sont en cours pour identifier les entreprises publiques pouvant enrichir le potentiel des privatisables. - La transformation d'un EEP marchand en SA peut constituer une étape cruciale dans la préparation à l'ouverture de son capital. - La tutelle nous en dit plus.
Le gouvernement s'apprête-t-il à lancer une nouvelle vague de privatisations ? Il a suffi d'une sortie la semaine dernière du ministre des Finances, Mohamed Boussaid, devant la Commission des finances au Parlement, au sujet de la performance des entreprises publiques, pour que la question resurgisse au sein d'une partie de la presse et des observateurs de la chose économique. Le ministre des Finances nous a assuré qu'aucune privatisation n'est prévue …«pour le moment». Il n'en demeure pas moins que la réflexion au sein de ses équipes paraît bien avancée sur le sujet, rejoignant ainsi l'avis de la Cour des comptes qui avait préconisé, dans son retentissant rapport 2016 sur les établissements et entreprises publiques (EEP), de redynamiser les privatisations, à l'arrêt depuis 2008.
Les «privatisables» ne manquent pas
«Des études et des analyses d'ordre stratégique sont en cours pour identifier parmi les entreprises et établissements publics (EEP) des entités pouvant enrichir le potentiel des privatisables», nous dit-t-on du côté du ministère des Finances. Il faut dire que le portefeuille public de l'Etat ne manque pas de candidats à la privatisation. Ce dernier compte pas moins de 209 EEP (dont 19 à caractère marchand) et 43 sociétés à participation directe de l'Etat qui détiennent à leur tour quelque 472 filiales publiques. «Ce qui constitue un potentiel intéressant pour d'éventuelles opérations de privatisation», confie la tutelle. «Par ailleurs, et tel qu'il ressort du rapport de la Cour des comptes, il y a lieu de rappeler qu'une dizaine d'entreprises et de participations publiques sont toujours inscrites sur la liste légale des sociétés à privatiser, dont Marsa Maroc, Maroc Telecom, Sonacos, Bipoharma, etc.», nous rappelle-t-on. De même, et en cas de besoin, des EEP à caractère marchand peuvent faire l'objet de transformation en sociétés anonymes (SA), en vue notamment d'ouvrir leur capital à des partenaires privés, à l'instar de ce qui a été fait pour Maroc Telecom, la Régie des Tabacs ou encore Marsa Maroc. Le ministère cite en exemple le cas de l'Office national des chemins de fer (ONCF), à travers la relecture de la loi sectorielle n° 52-03, ou encore la préparation d'un projet de transformation en SA de l'Office national des aéroports.
La transformation en SA, une étape décisive
Le ministère souligne à ce propos que la transformation d'un EEP marchand en SA, outre ses effets bénéfiques sur la gouvernance et le principe de reddition des comptes, «peut constituer une étape cruciale dans la préparation de la SA nouvellement créée à l'ouverture de son capital, à travers notamment l'introduction en Bourse ou l'entrée dans son tour de table de partenaires privés capables de consolider son mode de gouvernance et de la faire bénéficier de l'expertise du secteur privé». Enfin, pour ce qui est des participations minoritaires ne revêtant pas un caractère stratégique, «la réflexion est en cours pour juger de l'opportunité de désengagement de l'Etat de ces participations ainsi que des modalités idoines de les gérer», nous explique-t-on. Bref, le portefeuille public fera l'objet d'un profond remodelage, dont la privatisation n'est qu'un aspect parmi d'autres.
Les critères
Le ministère des Finances nous précise que la privatisation s'inscrit «dans une vision globale de gestion active du portefeuille». Dans le cadre de cette nouvelle vision, le choix des entreprises à privatiser obéit à une série de critères. Parmi ceux-ci, le département de Boussaid cite le caractère stratégique ou non de l'entité et son rôle dans l'accomplissement des missions de service public. Autre critère pris en compte : le niveau de maturité du secteur d'activité de l'entité ciblée en termes d'opportunité de croissance, de capacité de conquête de nouveaux marchés et de degré d'ouverture du secteur à la concurrence. A ce titre, le ministère rappelle qu'au-delà de leur dimension financière, les opérations de privatisation ont permis la libéralisation de certains secteurs, tels que les télécommunications ou les tabacs, favorisant ainsi «un courant d'investissements privés d'envergure, avec des retombées positives sur l'emploi et la productivité». Dernier critère et non des moindres : «l'entité concernée doit présenter également des caractéristiques offrant une situation financière saine et pérenne, un minimum de rentabilité et un potentiel de développement, sur la base des nouvelles capacités financières et d'innovations pouvant être apportées par l'acquéreur potentiel». Au final, la transformation en SA des EEP marchands, et partant leur privatisation, n'est que l'aboutissement logique d'un long processus, dont l'objectif central est «le désengagement de l'Etat de la vie économique, la libéralisation sectorielle et la réduction de son périmètre d'intervention». ■
1993-2008 : Retour sur 15 années de privatisation Depuis la première opération de privatisation réalisée en 1993, ce sont au total 51 sociétés et 26 établissements hôteliers qui ont été, totalement ou partiellement, transférés au secteur privé à travers 120 opérations. Les recettes totales de ces opérations de privatisation se sont élevées à près de 103 milliards de DH. Il convient de préciser à ce titre que ces recettes sont depuis 2011 versées en totalité, et à parts égales, au Fonds Hassan II pour le développement économique et social et au Fonds de développement industriel et des investissements. La vague de privatisations qui a caractérisé les années 2000, a été à l'origine du dernier budget excédentaire de l'Etat. C'était en 2008.