Nomination de commissions de suivi et d'évaluation, Cour des comptes et polémique… Le compte à rebours commence déjà pour la cession de deux entités publiques au secteur privé. Une opération qui risque d'être un peu plus différente et verrouillée en comparaison avec le passé. Et pour cause. Ces derniers jours ont été marqués par la publication au Bulletin officiel d'un dahir sur la nomination des membres des instances chargées de la privatisation. Le texte prévoit ainsi la création de deux entités, à savoir la «commission des transferts» et un «organisme d'évaluation». D'aucuns voient dans l'activation de cette annonce l'orientation vers un schéma plus collégial dans le processus de cession des organismes publics pour des acteurs privés avec l'implication d'acteurs indépendants et «étrangers» à la tutelle dans ce genre de dossier. L'activation de cette mesure intervient surtout sur une vive recommandation de la Cour des comptes au sujet des privatisations. La Cour présidé par l'ancien Premier ministre Driss Jettou, avait recommandé un changement dans l'implication desdites instances. «Afin de rendre plus dynamique le processus en matière de privatisation, il serait opportun de revoir le dispositif institué par la loi n° 39.89 dans le sens d'une implication plus engagée de la commission des transferts et de l'organisme d'évaluation qui seraient alors appelés à devenir une force de proposition pour suivre et orienter ce processus en permanence», préconisait la Cour des comptes. Ce ne fut d'ailleurs pas la seule recommandation émanant de la Cour des comptes mise en œuvre. Cette dernière avait, pour rappel, préconisé «de revoir les mécanismes de fixation de la liste des entreprises privatisables. Les propositions d'EEP à privatiser pourraient être préparées annuellement à l'occasion des projets de loi de Finances. Cette annualité permettrait d'asseoir une gestion souple et dynamique du portefeuille public adaptée aux contraintes de l'environnement». Pour rappel, l'annonce du retour des opérations de privatisation avait été dévoilée à l'occasion du débat sur la loi de Finances 2019 au Parlement. Par ailleurs, le nouveau schéma mis en place permettra d'éviter le déclenchement de polémique à l'issue d'opération de privatisation ou de cessions d'actifs de l'Etat au privé. La dernière polémique remonte à 2016 à l'occasion de la cession des parts de l'Etat chez un opérateur portuaire. En effet, l'Etat avait cédé l'été de cette année-là pas moins de 40% du capital de Marsa Maroc en Bourse. L'opération avait permis alors de rapporter 1,9 milliard de dirhams, soit 65 dirhams l'action. Sauf qu'à peine quelque temps après l'opération, le prix de l'action bondit en Bourse et une polémique sur une perte potentielle pour l'Etat est tout de suite déclenchée dans les milieux des affaires et des finances avant de gagner la scène politique et le Parlement. Un tel scénario pourrait être évite avec la mise en place de la commission d'évaluation qui va fixer le prix d'offre de la participation ou de l'établissement, avec la possibilité d'ordonner toute expertise et exiger des documents ou études pour l'accomplissement de sa mission. Privatisations Le gouvernement prévoit des recettes de privatisations de l'ordre de 5 milliards de dirhams dans le projet de loi de Finances 2019. Il y a quelques mois, le Parlement avait adopté le projet de loi 91.18, qui modifie et complète la loi 39.89 prévoyant la privatisation de plusieurs sociétés détenues en majorité ou totalement par l'Etat. La Mamounia et la Centrale électrique de Tahaddart sont les deux premières entreprises qui feront l'objet de la procédure de privatisation après l'entrée en vigueur de la loi 91.18. Une entrée en vigueur qui va signifier par la même occasion le retrait de plusieurs sociétés publiques de la liste des privatisables. Il s'agit notamment de la société de textile de Fès (Cotef), de CIH Bank, de la Société commerciale de charbon et bois (Sococharbo). À celles-ci s'ajoutent l'usine de fabrication des briques et des tuiles (BTNA), la Société chérifienne des sels (SCS) ainsi que deux hôtels, à savoir «Asmae» et «Ibn Toumert».