Le renforcement de l'usage du gaz s'impose dans le mix énergétique mondial et au Maroc également. Compte tenu des réserves découvertes, estimées à 250 ans de consommation, l'AIE prévoit que le gaz jouera un rôle central au cours des 25 prochaines années. Pour Moulay Abdellah Alaoui, le président de la Fédération de l'Energie et membre du Conseil Economique et Social, le futur terminal méthanier permettra au Maroc de bénéficier pleinement de nouveaux flux mondiaux de GNL. • Finances News Hebdo : Aujourd'hui, sur le plan mondial, quelle est la situation du marché de l'énergie ? • Moulay Abdellah Alaoui : Sous l'effet de la croissance démographique et de la croissance économique, quatre grands pays émergents, qui constituent les BRIC (Brésil, Russie Inde et Chine), mais aussi ceux du Moyen-Orient, «feront» les marchés de l'énergie et les prix. Si les réserves mondiales d'énergies fossiles apparaissent abondantes au regard des besoins futurs, les conditions de leur accès sont de plus en plus difficiles : les investissements en infrastructures nécessaires pour l'utilisation des ressources sont massifs et le contexte géopolitique est par nature incertain. • F. N. H. : Pourquoi le gaz et pourquoi est-ce maintenant qu'on évoque cette question ? • M. A. A. : La croissance des besoins soulève la question de la sécurité de l'approvisionnement, le changement climatique, celle de la durabilité du système énergétique, l'ensemble devant être appréhendé en tenant compte des enjeux économiques et notamment de compétitivité que les choix énergétiques impactent directement. Le domaine de l'énergie relève par ailleurs du temps long : ses infrastructures ont des durées de vie dépassant souvent le demi-siècle, comme c'est le cas des moyens de production et de transport de l'électricité. Par conséquent, il ne peut y avoir de changement brutal du mix énergétique mondial. Ainsi, les choix faits hier et aujourd'hui, définissent le mix énergétique de demain. Compte tenu des découvertes récentes de gaz non conventionnel, l'AIE prévoit que le gaz jouera un rôle central au cours des 25 prochaines années, favorisé par un prix modéré. La demande de gaz sera tirée en particulier par la consommation au Moyen-Orient, en Inde et en Chine. • F. N. H. : Comparativement au pétrole, dispose-t-on d'assez de réserves de gaz ? • M. A. A. : Les réserves de gaz ont fortement augmenté avec l'exploitation des gaz non conventionnels : l'AIE les estiment à 250 ans de consommation, soit bien plus que les réserves en pétrole ; concilier impératif environnemental et satisfaction de la demande énergétique implique de repenser les politiques énergétiques passées et présentes. Dans cette perspective, l'AIE promeut la suppression complète des subventions aux combustibles fossiles et analyse l'impact négatif des subventions. Ces mesures incitent au gaspillage, à la contrebande de carburants et sont une concurrence déloyale au développement des énergies renouvelables et du gaz naturel. • F. N. H. : Comment s'opérera la transition vers un usage plus intense du gaz ? • M. A. A. : Les mutations globales du contexte économique dans lequel s'inscrit le marché devraient de façon graduelle impacter le secteur tout entier. Premièrement, l'offre abondante en gaz consécutive à une augmentation des volumes du gaz liquéfié (GNL) suite à l'exploitation des gisements de gaz non conventionnel aux Etats-Unis d'Amérique. Puis, l'augmentation de la consommation du gaz naturel lors de la prochaine décennie serait rendue possible grâce au développement de la production de l'électricité à partir de gaz naturel, soutenu par la multiplicité des projets de centrales électriques. • F. N. H. : Quels avantages peut-on tirer de cette mutation ? • M. A. A. : Les analystes s'accordent à dire que la production d'électricité va être l'usage qui aura le plus d'influence sur l'évolution de la demande énergétique mondiale dans les prochaines décennies. Le gaz possède de nombreux avantages pour répondre aux besoins en matière de production d'électricité. La substitution du charbon par le gaz permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Les centrales au gaz cohabitent parfaitement avec l'intermittence des énergies renouvelables. • F. N. H. : Au Maroc, comment peut-on tirer profit de cette tendance vers l'usage plus intense du gaz ? • M. A. A. : La grande façade atlantique du Maroc, devant abriter un terminal méthanier, constitue un atout tant pour répondre aux besoins de diversification énergétiques que pour bénéficier pleinement de nouveaux flux mondiaux de GNL. Cela permet aussi de multiplier les points d'entrée afin de recevoir dans les meilleures conditions de sureté et de sécurité les unités de transport comme les méthaniers. Dossier répalisé par I. B. & S. E.