Juriste de formation et travaillant dans le commerce, rien ne prédisposait Najat Anwar, cette mère de famille comblée, de se lancer dans le social. Et pourtant, en 2004, elle fonde l'Association «Touche pas à mon enfant», et s'attaque ainsi à l'un des grands tabous de la société : la pédophilie. Et c'est un combat de tous les jours que cette courageuse femme mène avec son équipe pour dénoncer, sensibiliser, voire porter devant la Justice tout acte relevant de la pédophilie. Un travail de longue haleine dans une société toujours marquée par le tabou et «la hchouma». Elle était inconnue du grand public. Mais c'est en 2004 que Najat Anwar brise un grand tabou, celui de la pédophilie. En effet, pour partir en guerre contre la pédophilie, elle fonde «Touche pas à mon enfant», une association à but non lucratif. Najat a été bouleversée par l'affaire d'un enfant de trois ans qui a été abusé par le gardien de la crèche, en 2003. En 2004, le Maroc est cette fois secoué par l'affaire du pédophile et tueur en série de Taroudant. Des enfants ont subi un sort atroce puisqu'ils ont été ainsi tués et enterrés sur place par le pédophile après avoir essuyé les pires sévices sexuels. Najat, en créant l'Association «Touche pas à mon enfant», va crever l'abcès en lançant plusieurs actions de sensibilisation et une large campagne médiatique pour dénoncer toutes les formes d'abus dont sont victimes les enfants et adolescents. L'Association met un point d'honneur à porter sur la place publique les crimes perpétrés contre des enfants afin de dénoncer pareils actes et de sensibiliser la société à l'ampleur du phénomène. En effet, l'Association part en guerre contre les pédophiles nationaux, mais également contre les «pédotouristes» qui viennent au Maroc, encouragés par un certain laisser-aller. «Ma colère, ma révolte face à l'abus sexuel commis sur les enfants m'a donné le courage de me dresser contre ce fléau et de mobiliser tous les gens qui étaient aussi révoltés que moi. J'ai pensé à la Justice, à celle des enfants qui n'ont pas les moyens de se défendre et de lutter pour leurs droits». Aboutir au militantisme associatif n'était pas tellement évident dans la vie de Najat. Juriste de formation, elle fait carrière dans le commerce avant de laisser s'exprimer son engagement pour la cause des enfants. «Ma carrière a connu beaucoup de rebondissements, peut-être parce que je fais plus confiance à mon cœur qu'à la raison». Une fonceuse donc puisqu'elle est de toutes les affaires qui éclatent au Maroc et dont sont victimes des enfants ou adolescents. Et en un peu plus de 7 ans, c'est un pari réussi puisque le tabou est levé et que la société dénonce de plus en plus ce genre d'agissements. «Je vais toujours jusqu'au bout, même si je sais que je peux me planter … Mais ma meilleure stratégie, c'est de travailler en équipe». Najat est animée par une forte volonté de faire bouger les choses. D'ailleurs, sa devise est de rester positive et de ne jamais lâcher prise. «Ce qui me motive dans la vie ? Ce sont mes enfants et ma mission associative». Très jeune, Najat a vécu une enfance des plus normales, avec ses hauts et ses bas comme pour tout le monde. «Mais deux choses m'ont marquée dans cette enfance : la mort trop tôt de mon père et la forte personnalité de ma mère qui a su combler le vide paternel». Et de l'affection, Najat en a pour tous les enfants. D'ailleurs, l'un de ses passe-temps favoris est de se retrouver avec les siens, jouer avec eux, leur prodiguer de l'affection … «J'aimerais être encore plus présente, mais c'est un peu difficile ; cependant, quel bonheur quand je retrouve mes enfants». D'ailleurs, la famille représente pour elle une bulle d'oxygène. «Quand je suis à bout, la solution est de replonger constamment dans la vie familiale et j'arrive à faire face en me ressourçant auprès de mes enfants». Le sport est également une échappatoire. «Ça ne m'apporte que du bien-être et de l'énergie pour ne pas craquer devant les malheurs quotidiens auxquels nous sommes confrontés, nous autres membres de l'Association «Touche pas à mon enfant». Et des horreurs, il y en a eu récemment, notamment la maltraitance envers une petite fille employée comme domestique et qui a perdu la vie suite aux sévices dont elle a été victime. Ou encore les révélations de Luc Ferry accusant un ex-ministre français de pédophilie. D'ailleurs, la réaction de l'Association ne s'est pas fait attendre, puisque deux plaintes contre X ont été déposées à Marrakech et à Paris. Malgré tant d'horreurs, Najat ne changerait rien à sa vie. «Si c'était à refaire, je referais tout ce que j'ai vécu de bon ou de mauvais, car je crois en Dieu et à notre destinée». Najat est plus que jamais déterminée à poursuivre tous les projets lancés par l'Association. «Comme toute personne qui se bat pour une cause, j'aimerais voir le bout du tunnel au moins dans mon pays. En tout cas, j'ai beaucoup de projets en faveur des enfants, et pour les réaliser, je n'hésite pas à frapper aux bonnes portes». ■ Imane Bouhrara Cette adresse email est protégée contre les robots des spammeurs, vous devez activer Javascript pour la voir.