Directeur général de Scandinavian Auto Maroc, l'importateur exclusif de Volvo, Mourad Belgnaoui s'est forgé une personnalité et un style de management outre-Atlantique. Diplômé d'une prestigieuse université américaine, il a bien roulé sa bosse et n'hésiterait pas une seconde à repartir à zéro. Un enfant heureux, dynamique, curieux, studieux…?Mourad Belgnaoui se rappelle avoir eu une très belle enfance grâce à ses parents, son père cadre à la RAM, et sa mère fonctionnaire de l'Administration publique. «Ils ont fait d'énormes efforts pour nous assurer cette belle enfance. D'ailleurs, je suis parti en colonie de vacances un peu partout dans le monde et nous avons eu, ma sœur et mon frère, plein d'activités sportives et de divertissements grâce à mes parents». Né à Casablanca, Mourad passe le primaire à l'école Jeanne d'Arc avant de rejoindre l'école Ibn Tofaïl, puis le Lycée Moulay Driss. Elève brillant et passionné des maths, Mourad opte cependant pour un Bac en sciences expérimentales. «J'aime les maths parce que je me retrouve dans la logique … Mais, plus tard, dans mes études, quand j'ai découvert les vraies maths, j'ai pensé qu'au Maroc on devrait enseigner les maths, dans la pratique, pour que les étudiants sachent à quoi sert une intégrale dans la résolution d'un problème réel de la vie». Après le Bac, Mourad était prédisposé à aller faire un Deug A ou B à Bordeaux et avait même obtenu une bourse. Et à la dernière minute, il décide de partir aux Etats-Unis. «Je n'arrive toujours pas à expliquer ce qui m'a poussé à partir vers une contrée où je n'avais personne si ce n'est un ami». Il part sans inscription, sans être parfait anglophone. «Je pense que mon père a accepté mon départ en se disant que j'allais y passer quelques mois et revenir en courant». Son père était loin de se douter que Mourad allait vivre une expérience de 17 ans outre-Atlantique. Puis, il y a eu un intervalle marocain, avant de repartir une deuxième fois aux USA… Et retour au Maroc en 2005. Débarqué jeune dans le nouveau Continent, à Boston plus précisément, avec son Bac en poche, Mourad va d'abord s'inscrire en cours de langue et découvrir un pays qu'il va vite adorer. À Boston, après les cours d'anglais, il démarre des études en génie électrique et puis, comme il avait changé de cap en optant pour les USA au lieu de la France, Mourad Belgnaoui va encore virer de bord. «Je ne sentais pas cette formation, je ne m'y retrouvais pas …». En attendant d'y voir plus clair, Mourad va prendre une année sabbatique avant de switcher vers la finance. «J'ai adoré la finance !». Surtout qu'il a fréquenté une très bonne école, la Northeastern University où la recherche fait partie intégrante des études. Mourad Belgnaoui a été d'ailleurs recruté dès sa troisième année, d'autant que beaucoup de compagnies avaient des incubateurs sur place. Il est ainsi repéré par le deuxième courtier en assurance dans le monde, AON. Mourad démarre ainsi sa carrière chez Aon Boston en tant que Data analyste en 93-94. À l'époque, l'assurance n'était pas totalement informatisée et comme les nouvelles recrues maîtrisaient l'informatique, Mourad s'épanouit en numérisant le travail. Il apprend beaucoup sur l'assurance et, 5 ans plus tard, il est promu chef des analystes Data. Il entra ensuite dans le vrai business de l'assurance puisqu'il est nommé assistant du manager gros comptes. «Nous avions commencé à faire la modélisation, puisque certaines compagnies, ayant un chiffre d'affaires élevé, pouvaient s'auto-assurer… Et comme tout doit être assuré, notre travail consistait à identifier les points à risque …». C'était une mission qui passionnait Mourad puisqu'à partir de statistiques, il fallait prédire l'avenir. «Comme dit l'adage, le futur est l'histoire qu'on ne connaît pas». La carrière de Mourad est au beau fixe quand il décide de rentrer au Maroc. «Je n'avais jamais coupé le cordon avec le pays et j'ai décidé de venir voir les opportunités que pouvait m'offrir le marché marocain. S'il est vrai que mon caractère professionnel s'était forgé dans une autre culture, je n'avais pas de préjugés. J'avais juste hâte de découvrir la vie professionnelle dans le pays où j'étais né». Et c'est ainsi qu'il revient dans la finance, son premier amour, avec Upline Securities. Mourad est satisfait de travailler au Maroc même s'il constate que la cadence est plus lente qu'aux Etats-Unis. «J'ai remarqué également qu'au Maroc, la culture d'entreprise reste très émotionnelle et marquée par la prévalence des rapports personnels plus que professionnels». Moins d'une année plus tard, il s'associe à la création d'une société de Bourse. «Nous n'avons pas pu choisir un timing plus mauvais puisqu'on est arrivé en pleines années de vaches maigres, bien que nous ayions obtenu quelques parts de marché». En parallèle, Mourad s'inscrit pour un MBA à l'Ecole Hassania de Travaux Publics. Une occasion de rencontrer des gens en dehors du travail et de développer son réseau au Maroc. «C'était une opportunité, parce que la force d'un MBA réside dans le relationnel. Et j'avais une classe avec des gens importants et des profs hautement qualifiés aussi». Mourad va également faire un passage par le secteur bancaire puisqu'il est nommé conseiller du président du CIH. «Mohamed Laalej venait d'être nommé et j'ai rejoint son équipe à un moment crucial de l'histoire de la banque. Nous avons en effet travaillé à sa restructuration». Le jeune homme constate d'ailleurs que la banque dispose de bons cadres qui, malheureusement, ont été mis dans le même panier, alors qu'ils n'avaient rien à se reprocher. L'expérience bancaire de Mourad va tourner court, puisque certaines promesses faites n'ont pas été tenues. Et comme il n'a pas peur de tout lâcher et repartir, il décide alors de quitter le CIH et repart pour les USA. «Le marché financier était en plein boom aux Etats-Unis, notamment des subprimes. J'ai redémarré là-bas en donnant des formations aux agents de crédit». Désormais marié et père d'une petite fille, Mourad ne perd pas pour autant ses petites habitudes. En 2004, alors qu'il est en vacances au Maroc, on lui fait une belle proposition chez Dell. «C'était le genre de proposition qu'on ne peut pas refuser». Et en novembre de la même année, il rentre au bercail avec sa petite famille. «Au début, quand on m'a nommé Directeur technique du service après-vente de la région Europe, j'ai pensé que ça n'allait pas du tout, mais finalement, je me suis bien plu à ce poste». Et trois à quatre ans plus tard, il répond à une petite annonce et se retrouve à la tête de Scandinavian Auto Maroc. À l'époque, le marché marocain était 5ème marché de Volvo de la région, avant de passer deuxième, juste derrière la Turquie. «Mon rôle en tant que manager repose sur deux piliers : assurer l'opérationnel et le quotidien et aussi le stratégique et le futur». Pour Mourad, le travail se fait en équipe, comme une équipe de foot où il faut avoir la bonne personne au bon endroit avec de la formation derrière. Pour la partie stratégique qu'il entreprend, ses outils principaux sont les statistiques et les tableaux de bord. «Quand on ne mesure pas, on ne manage pas». Papa gâteau, Mourad est plutôt casanier et ses loisirs se pratiquent pour la plupart du temps à la maison comme la lecture ou bien recevoir la famille et les amis. Homme de compromis, il est aussi foncièrement anticonformiste. Ainsi, quand on lui demande si la vie était à refaire et ce qu'il aurait voulu changer, sa réponse est fidèle à son image d'homme toujours sur le départ. «J'aimerais devenir médecin, et il n'est pas trop tard pour le faire» !