Le CDVM vient de prolonger le délai de consultation relatif au projet de la codification de ses circulaires jusqu'au 7 juin 2011. Pour rappel, l'initiative du gendarme du marché vise à regrouper lesdites circulaires «en un seul texte cohérent, structuré et présenté de manière didactique, par métier». Cet assemblage est aussi «l'occasion de procéder à une mise à jour tendant à la simplification et à la clarification des règles et à la prise en considération des avancées, en termes de pratiques et de technologie». L'occasion m'a été également donné de revisiter quelques articles de ces circulaires. Et deux, en particulier, ont retenu mon attention. Le premier concerne les règles applicables à la publication d'analyses financières, notamment par les sociétés de Bourse. L'article 1.4.37 précise, à ce titre, que «l'analyse financière doit être intègre, précise et claire et être formulée et présentée de manière à ne pas induire le public en erreur sur la situation ou les perspectives de l'émetteur (…) Les notes d'analyse doivent avoir pour objectif exclusif l'intérêt de ses destinataires». A ce niveau, une question se pose avec acuité : aujourd'hui, quelle crédibilité faut-il donner aux études publiées par les sociétés de Bourse ? Ce ne sont évidemment pas les compétences des analystes qui sont mises en cause; loin de là. Ce qui est plutôt décrié, c'est la situation de conflit d'intérêts permanent dans laquelle ils se trouvent dans le cadre de l'exercice de leur fonction. En effet, comment rester objectif quand l'étude concerne un émetteur client de la banque d'affaires qui vous emploie ? Cette situation n'est malheureusement pas spécifique au marché marocain. C'est une pratique que l'on trouve dans tous les marchés financiers internationaux. Une pratique qui prend en otage les investisseurs, lesquels ont légitimement foi en toutes ces études censées les orienter dans leur politique d'investissement. Bien évidemment, les sociétés de Bourse se défendent bec et ongles de faire du clientélisme. Mais l'histoire récente du marché boursier marocain témoigne en leur défaveur. Surtout lorsqu'on se rappelle qu'à une certaine époque deux sociétés de Bourse de renom de la place étaient, par études interposées, en conflit ouvert, suscitant une polémique monstre : deux études sur le même émetteur (client de l'une des sociétés de Bourse), faites à la même période, avec des recommandations foncièrement différentes. Toutefois, on ne peut pas toujours jeter l'opprobre sur les sociétés de Bourse car, dans leurs analyses, leur objectivité peut parfois rencontrer une certaine mauvaise foi des émetteurs. Il y a quelques mois, la Sonasid s'est ainsi désolidarisée des analystes d'Attijari Intermédiation (www.financenews.press.ma) qui avaient prévu une croissance à «deux chiffres des résultats» et recommandé le titre à l'achat. A l'arrivée, le chiffre d'affaires du sidérurgiste au titre du premier semestre 2010 s'est déprécié de 32%, au moment où le résultat net enregistrait un recul substantiel de 58%. A la lecture de ces prévisions optimistes parues mi-juillet, date à laquelle elle avait suffisamment de visibilité sur ses résultats, la société n'a pourtant pas réagi, laissant la note de recherche faire son effet auprès des investisseurs. C'est dire, pour clore ce sujet, que puisque le CDVM a l'occasion de «mettre à jour» ses circulaires, il faudrait peut-être songer à mieux encadrer les notes de recherche, mais aussi les relations entre émetteurs et banques d'affaires. Mais, surtout, sanctionner de manière plus ferme en cas de manquements. Des sanctions qui seront à la hauteur des préjudices financiers subis par les épargnants. L'autre article qui m'a interpellé est celui consacré à l'information du public. L'article 111.2.3 stipule, en effet, que «les publications dans les journaux d'annonces légales doivent être présentées en caractères clairs et lisibles». Depuis le temps que cette circulaire existe, il est peut-être temps de la faire évoluer en imposant une certaine charte graphique commune (police, taille…) afin que les comptes publiés soient effectivement «clairs et lisibles». Car, malheureusement, ce n'est souvent pas le cas. Si certains émetteurs font des efforts en terme de communication financière, la plupart se contentent non seulement du minimum légal, mais ils semblent le faire avec une certaine désobligeance qui contraint souvent à user d'une loupe, voire d'un microscope (sic !) pour pouvoir déchiffrer leurs comptes. La balle est donc dans le camp du gendarme du marché.