Les métiers de la logistique représentent plus de 30% de la consommation de l'énergie du pays. Saïd Mouline, Directeur général de l'Agence Nationale pour le Développement des Energies Renouvelables et de l'Efficacité Energétique (ADEREE), nous dévoile les enjeux majeurs de l'aspect environnemental. - Finances News Hebdo : Que pensez-vous de la thématique de cette édition du Medlog ? - Saïd Mouline : Globalement, le secteur du transport routier, maritime, aérien ou ferroviaire représente au Maroc 30% de la consommation de l'énergie, tandis qu'en Europe il est de 25%. Nous sommes dans un schéma où il faudrait faire beaucoup d'économie, d'où l'importance de cette thématique exceptionnelle «Port vert, logistique verte». Ce qui nous a été présenté aujourd'hui par les différents intervenants est de voir comment les autres ports ont réussi à réduire leur consommation d'énergie grâce à certaines actions autorisant 25% jusqu'à 50% d'économie. Dans un autre volet, nous avons vu aussi comment les bateaux eux-mêmes font de l'économie d'énergie. Sur certaines routes, l'aspect carburant représente parfois jusqu'à 70% du coût. Une énergie qui coûte de plus en plus cher. Les transporteurs se doivent d'envisager toutes les technologies, ainsi que les comportements à changer pour que cette économie n'ait pas seulement un impact environnemental, mais aussi économique. Du coup, on se trouve dans un schéma où tout le monde peut être gagnant en respectant l'environnement, sans oublier l'aspect réglementaire qui se met en place. - F.N.H. : Quelles réponses peut apporter ce forum à la problématique environnementale au Maroc, notamment dans les activités maritimes et portuaires très consommatrices d'énergie et génératrices de pollution ? - S.M. : Le Medlog est une plate-forme d'échange entre les professionnels de ce domaine qui, pour la même problématique, ont exposé les solutions qui ont été adoptées pour l'économie d'énergie, la protection de l'environnement et le développement durable. C'est le cas des organismes portuaires des Etats-Unies et d'Europe qui ont présenté les actions qu'ils ont menées dans ce domaine. Un échange fructueux pour le Maroc dont les résultats de ces expériences peuvent être adaptés à notre contexte. Parmi les actions menées, on a pu voir comment un port peut produire sa propre énergie, à savoir la production de l'électricité par les éoliennes. Une carte à jouer pour les ports marocains qui se trouvent dans des régions à fort courant éolien. - F.N.H. : Quel est le rôle de l'ADEREE pour promouvoir cette production d'énergie et notamment l'installation des éoliennes sur les sites des grandes structures, à savoir les ports ? - S.M. : Notre principale mission est d'utiliser au maximum les ressources nationales et d'économiser le maximum d'énergie. Aujourd'hui, nous sommes dans l'économie d'énergie dans différents secteurs : l'industrie, le transport et le bâtiment. L'objectif est d'utiliser les énergies renouvelables lorsque c'est possible et ne plus gaspiller, vu que notre pays est très dépendant dans une conjoncture où la facture énergétique est très lourde. Le rôle de l'ADEREE est d'accompagner et de trouver les formules pour remédier au gaspillage d'énergie. À ce titre, nous avons mis en place un projet dans le secteur du bâtiment qui consiste à subventionner le surcoût lié à l'économie d'énergie pour des projets qui vont être soumis d'ici fin juin à l'ADEREE. Un projet ouvert aussi bien aux établissements privés et publics qu'aux particuliers, écoles, hôpitaux… Tout bâtiment qui se construit doit intégrer sérieusement l'aspect économie d'énergie. A titre d'exemple, l'isolation, le double vitrage… Nous avons établi un zonage climatique pour cibler les mesures à prendre pour chaque région afin d'identifier les différents aspects d'économie d'énergie à respecter. Cette subvention peut varier entre 50% et 100% du surcoût du bâtiment à construire. Une aide qui va sûrement encourager les promoteurs, qui auront jusqu'à fin juin 2011 pour répondre à cet appel à projet, pour se mettre à l'économie d'énergie. Une campagne a été lancée à travers les médiats pour faire connaître ce projet dans tout le Royaume et nous allons également organiser des sessions de formations pour la presse sur le thème des énergies renouvelables et l'économie d'énergie qui restent un sujet technique. - F.N.H. : Le Maroc a lancé plusieurs projets dans le volet de l'économie de l'énergie. Les entreprises marocaines sont-elles assez sensibilisées aux enjeux majeurs du développement durable et l'économie d'énergie ? - S.M. : Tout le monde est concerné quand il y a un coût et, bien sûr, une facture énergétique à payer. L'économie d'énergie permet de baisser cette facture; ainsi l'entreprise est gagnante à tous les coups. Sur le plan financier, l'aspect environnemental n'est pas toujours au premier plan vu les investissements qu'il faut faire. Certes, les investissements peuvent êtres lourds, mais ils sont très rentables à moyen et long termes. Nous devons préserver les ressources de notre pays avec une sensibilisation à tous les niveaux des enjeux majeurs de l'économie de l'énergie et du développement durable dans les grands projets. Il faut dire qu'aujourd'hui, non seulement l'aspect économique prime, mais également l'aspect environnemental et social qu'il faut intégrer. Et c'est ce qu'on remarque dans tous les grands projets lancés dans le Royaume, notamment le tourisme, le secteur halieutique, l'agriculture, l'industrie et l'énergie qui ont tenu compte de l'aspect du développement durable. - F.N.H. : Quels sont les projets de l'agence ? - S.M. : Nous intervenons dans différents secteurs, notamment le bâtiment, l'industrie et le transport. Nous avons lancé dans le secteur industriel 60 audits énergétiques dans les grandes entreprises, étalés sur tous le territoire, ce qui permet d'établir un bilan et de voir si l'entreprise est en dessous des normes quant à sa consommation. Ces audits feront place à des actions à mener pour économiser l'énergie. Des actions qui feront l'objet d'investissements au sein de l'entreprise. Pour ce faire, l'ADEERE instituera un fonds pour accompagner les entreprises à financer les actions et les investissements qui seront bien évidemment rentabilisés. Sur le volet des transports routiers, le Maroc a mis en place un projet logistique qui permettra de réaliser, à terme, une économie assez importante de 35 %. Une économie qui va se répercuter aussi bien sur le volet économique que sur le volet environnemental. - F.N.H. : Où en sommes-nous pour ce qui est des normes environnementales au Maroc ? - S.M. : Aujourd'hui, les entreprises marocaines doivent se mettre aux normes nationales et internationales et particulièrement celles qui exportent. Le Maroc est dans un schéma d'établissement et d'installation des normes environnementales avec la loi sur l'eau qui entrera en application au mois de juin. Il y a également une loi en préparation sur l'efficacité énergétique et qui soumettra les grands consommateurs d'énergie à un audit annuel. Dossier réalisé par Lamiae Boumahrou