Les hypothèses retenues dans le PLF 2011 restent irréalisables pour les analystes du Centre Marocain de Conjoncture pour des raisons liées au financement des dépenses. A l'instar des budgets précédents, l'élaboration de celui de 2011 reste marquée par une approche comptable et classique. Les effets de la crise internationale sont omniprésents et il serait souhaitable de parler davantage d'une politique de «stop and go» que de croissance. A quelques jours de l'adoption du projet de Loi de Finances 2011, les hypothèses retenues, à savoir un taux de croissance de 5%, une hausse des prix d'environ 2% et un déficit budgétaire qui ne dépasserait pas 3,5% du PIB, sèment le doute chez bon nombre de professionnels. Ils demeurent quelque peu sceptiques quant aux réalisations projetées. A noter que la Loi de Finances est un acteur majeur de toute politique économique dans la mesure où, dans ce document, les pouvoirs publics spécifient les voies et les moyens à mobiliser dans l'espoir d'atteindre les objectifs escomptés dans une perspective annuelle. Tout ceci sans omettre que cette Loi de Finances baigne dans un environnement élargi qui n'est pas exempt d'incidences. Et donc, par la force des choses, le budget subit le contrecoup de l'environnement ambiant. D'après les institutions de prévisions telles que le FMI ou l'OCDE, la croissance attendue pour 2011 dans les pays développés se situerait dans la fourchette de 0,8% à 1,5%. La tendance serait également à la décélération dans les pays émergents. Ceci laisse donc prédire que la croissance ne serait pas au rendez-vous en 2011. La question que se posent donc les analystes du Centre Marocain de Conjoncture est la suivante : cet environnement peu porteur va-t-il marquer l'économie générale du projet de budget pour 2011 ? D'après eux, la croissance de 5% projetée pour 2011 suscite plusieurs réserves. Ils citent en premier lieu la décélération de la demande étrangère adressée au Maroc en liaison avec les incertitudes qui pèsent sur l'environnement international. Les plans de rigueur, voire d'austérité, adoptés par certains pays partenaires du Maroc n'amélioreraient certainement pas les choses. Et, donc, nombreux sont les organismes qui remettent en cause le bien-fondé des projections du PLF 2011. Ainsi, aussi bien le HCP que le CMC ne tablent que sur une progression de 4%, soit un point de moins. «La croissance économique reste façonnée par les aléas climatiques et l'autonomie dont on parle est loin d'être confirmée par les évolutions récentes», constatent les conjoncturistes. Entre contraintes et objectifs Les analystes du CMC fondent leurs estimations sur les hypothèses selon lesquelles la comparaison des dépenses de compensations, dans le PLF 2011 par rapport à 2010, fait ressortir que le niveau de compensation est beaucoup plus important en réalité. Autrement dit, la croissance limitée des dépenses ordinaire est imputable en grande partie à une sous-estimation de l'enveloppe allouée à la compensation. «Toutes choses étant égales par ailleurs, la charge de la compensation devrait au moins être égale à celle actualisée pour l'année 2010, puisqu'il s'agit pratiquement des mêmes hypothèses de travail», apprend-on au niveau du CMC. Auquel cas, le déficit s'aggraverait de 8 Mds de DH, soit l'équivalent de 1 point de PIB. Aussi, concernant les dépenses d'investissement, leur niveau varie selon le mode de présentation dans le PLF 2011. Mais tout indique une augmentation des investissements de 17 Mds de DH par rapport à 2010. A été également pointé du doigt le Fonds spécial pour le développement de l'investissement, surtout en ce qui concerne son financement. On relève qu'il existe un flou au niveau de son organisation par rapport au Fonds Hassan II. Pour ce qui est des recettes, on remarque que les impôts indirects compensent le recul de la fiscalité directe. Après les hausses spectaculaires de 2006 et 2007, les impôts directs ne progresseraient que d'une manière limitée. Toutes ces hypothèses laissent prédire que l'exécution du budget 2011 risquerait de connaître des difficultés sur le plan du financement. Et donc cette politique volontariste tant affichée pourrait être contrariée par la disponibilité des moyens. Le PLF 2011 prévoit un besoin de financement de l'ordre de 35 Mds de DH et il est donc fort probable que L'Etat recoure à un emprunt international comme ce fut le cas en 2010. Il aurait donc été souhaitable de prendre en considération les soubresauts de la crise mondiale et de parler plutôt d'une politique de stabilisation que de croissance. Une chose est cependant sûre : l'élaboration du budget n'arrive pas à se démarquer de l'approche classique, ou plus exactement une fixation des dépenses en fonction des recettes. Ce qu'ont décrié plusieurs partis politiques. Le budget de Mezouar ne parvient pas encore à satisfaire tout le monde.