Les richesses patrimoniales, si elles sont bien comprises, sont porteuses de développement. Pourtant, à El Jadida, du fait de la négligence, de l'inconscience, de la pression économique, des monuments historiques et des chefs- d'œuvre sont menacés de disparition ou de défiguration. El Jadida, la Deauville marocaine, avec ses longues côtes ruisselantes de lumières et d'écumes, son ouverture sur l'Atlantique et sa position privilégiée, demeure toujours une ville touristique. Ses charmants sites, dont la bonté divine l'a dotée, font d'elle une toute autre. En plus, elle se donne l'oscar des centres balnéaires du Maroc et ce, malgré son industrialisation et ses potentialités dans le domaine agricole. La Deauville marocaine n'est pas réputée seulement pour ses plages sublimes. Partout où l'on passe, on découvre les traces d'une histoire riche et variée. Ainsi, la Deauville marocaine dispose de tous les atouts qui peuvent enchanter et intéresser le touriste national et étranger. Eljadida recèle aussi de magnifiques monuments historiques qui sont considérés comme de véritables œuvres d'art, des joyaux architecturaux uniques, à l'image du théâtre municipal, la banque du Maroc, l'ex-bureau arabe, la poste principale, la cité portugaise, le château rouge et l'immeuble El Cohen pour ne citer que ceux-là. Néanmoins, bon nombre de ces édifices sont délaissés. Ainsi, les superbes et magnifiques édifices et monuments de la Deauville marocaine, qui fascinaient et charmaient par leur beauté exquise, ne donnent plus cette allure majestueuse qu'ils avaient. Chaque jour, ils vivent sous l'emprise du spectre de la déchéance totale sans aucun souci de la part des responsables et décideurs de la ville. Plus rien ne réconforte et personne ne réagit pour dire au moins " quelle mouche a piqué ces gens " même si ces chefs- d'œuvre ont atteint un seuil alarmant et effrayant. Le délabrement, la détérioration et l'effritement semblent être leur destinée. Des exemples ? Allez voir le phare Sidi Bouafi, l'hôtel Marhaba, l'ancienne municipalité (actuel 2e arrondissement urbain), l'immeuble El Cohen, la citerne portugaise, l'église de l'Assomption, etc. Tous ces véritables chefs- d'œuvre se sont délabrés à cause d'un laisser-aller criard de la part des responsables et décideurs de la ville et au su et au vu de tout le monde. Que dire du mutisme choquant de la société civile? Mais en fait, pourquoi tant de promesses n'ont pas été tenues même par les responsables et les services concernés ? Peut-être qu'on attend l'arrivée de Godot! Bref, ne soyez point surpris si on vous dira que la cité portugaise, patrimoine mondial de l'humanité, a été déclassé par l'UNESCO à cause du non-respect du cahier des charges et chaque jour un édifice s'écroule sans parler des bâtisses et maisons délabrées qui ne tiennent qu'à un fil, risquant ainsi la vie d'innocents citoyens surtout avec cette période de pluie. Pis encore, plusieurs œuvres de maîtres qui ornaient l'ex-bureau arabe et les murs de l'Hôtel de ville ou de la Chambre de commerce et d'industrie ont disparu. Ont-elles été volées, prêtées ou se sont-elles tout simplement dégradées ou volatilisées? Comment expliquer aujourd'hui la soi-disant « panne » du mécanique de l'horloge de l'ex-bureau arabe et la disparition de plusieurs toiles qui étaient pourtant bel et bien consignées dans l'inventaire communal ? Autant de questions auxquelles il faudra un jour répondre. Une évidence cependant : la richesse dont disposait Eljadida a subi, des années durant, une grave hémorragie encouragée par la passivité et le silence complice de l'ensemble des élus et des responsables qui ne cessent de répéter « Mais où sont Ouled Labled ? ». Un autre exemple édifiant et qui donne l'image d'un désastre est celui des sculptures du parc Mohammed V qui sont extrêmement variées et qui ont été réalisées en l'an 2000 avec des contributions d'Ahlam Lemseffer, R. Jacquier, El Aadi… Or, plusieurs sculptures n'ont pu résister à l'usure du temps tandis que d'autres cèdent à l'implacable œuvre du temps et croulent. Et, ceux qui restent continuent de subir les affres de l'ignorance, du laisser-aller et de l'abandon. Il semblerait donc qu'on ne pense ni à remettre vraiment en valeur le patrimoine de cette ville ensorcelante ni à hisser sérieusement la ville au niveau qui lui sied sous prétexte que Mazagan n'a aucune histoire glorieuse et n'a enfanté que du « jarra », du « chalini » et non de grands hommes. Qui sauvera donc les monuments historiques et les chefs- d'œuvre de la Deauville marocaine qui sont vraiment en péril? Toutefois, ce ne sont pas seulement ces chefs-d'œuvre de la Deauville marocaine qui sont en voie de disparition, mais c'est l'âme, l'histoire et le patrimoine de cette pauvre ville qui sont en voie de dégradation au cas où on continuerait d'appliquer la politique " pas de budgets spéciaux, attendons faraje Allah". Que l'on mette la main dans la main pour sauver les sites historiques et les vestiges archéologiques car une ville, où on livre son patrimoine au bourreau de la mort, ressemble plutôt à une ville sans âme. Et si les aïeuls ont légué à leurs descendants un trésor inestimable, il est inacceptable de le dilapider sataniquement car se sera un crime contre toute l'humanité. En plus, ceux qui auront appliqué la politique du laisser- aller priveront ainsi même leurs descendants de la beauté exquise des monuments historiques de la Deauville marocaine. Ces dits descendants n'auront donc que de voir ces chefs-d'œuvre architecturaux sur d'anciennes cartes postales tout en maudissant tous ceux qui ont commis l'atrocité de livrer le patrimoine de Mazagan à l'ogre de l'effritement et du délabrement. Musée régional relégué aux oubliettes Les gérants de la ville doivent créer dans les jours à venir un musée régional, et ce afin de préserver au mieux le patrimoine existant. Eljadida, aujourd'hui, a réellement besoin d'un musée aux normes internationales qui lui permette de mettre à l'abri les richesses locales. Pourtant, dans les années 80, le conseil municipal a bel et bien voulu qu'Eljadida dispose d'un véritable musée. Mais petit à petit, le projet de création d'un musée régional a été relégué aux oubliettes.