Les tensions sur le risque devraient persister en 2021 avec la montée des créances en souffrance anticipée suite à un contexte économique morose. Le niveau du coût du risque devrait probablement se maintenir à un niveau élevé comparable à celui de l'année 2020. Affectée durement par la pandémie Covid-19, l'année 2020 a vu plusieurs secteurs afficher des contreperformances. Dans le secteur bancaire, il est constaté une accélération des créances en souffrance, des tensions sur les liquidités ou encore le ralentissement de la distribution des crédits. Tous ces problèmes se sont traduits par une forte baisse des résultats du secteur bancaire due à une hausse importante du coût du risque. L'encours brut des crédits a enregistré une progression de 4,4% (+40 Mds de DH) par rapport à fin 2019 pour s'établir à 957,4 Mds de DH à fin 2020. « Cette tendance en sens opposé à l'évolution du PIB s'explique essentiellement par les différentes mesures de soutien et de relance instaurées par la banque centrale et le gouvernement (Environ 53 milliards de DH de crédits ont été distribués dans le cadre de ces programmes de financement garantis par la CCG courant 2020) », explique-t-on à CDG Capital. En effet, les crédits débiteurs et de trésorerie ont contribué à hauteur de 40% à l'augmentation de l'encours brut des crédits, suivi des créances diverses sur la clientèle qui ont contribué à 35% à cette progression (portée essentiellement par les crédits octroyés dans le cadre des opérations de pension). Retraité de cette dernière catégorie, l'encours brut des crédits enregistrait une hausse de seulement 3,4%. Du côté des ressources, le secteur a profité d'une bonne tenue des dépôts bancaires qui ont affiché une hausse de 5,6%, soit la plus forte progression courant les quatre dernières années. Les analystes de CDG Capital expliquent cette situation par une préférence des investisseurs pour le cash en cette période de crise et en l'absence de conditions favorables de placement et, dans une moindre mesure, par le changement de mode de consommation des marocains qui ont préféré épargner en ces temps difficiles. Par ailleurs, la banque centrale a réduit le taux directeur de 75 pb passant de 2,25% à 1,5% à fin 2020, entrainant une pression à la fois sur les taux débiteurs et sur le coût des ressources. Tenant compte de l'ensemble des éléments, le PNB du secteur coté affiche un repli de 2,0% à 36,1 Mds de DH à fin 2020. Montée en flèche des créances en souffrance La solvabilité des ménages et des entreprises a été durement touchée par la pandémie covid 19, entrainant une forte augmentation des créances en souffrance (passant de 53,2 Mds de DH à 59,4 Mds de DH pour le secteur coté). Ainsi, le taux d'impayés des banques cotées est passé de 7,8% en 2019 à 8,4% en 2020, soit une détérioration de 60 pb. Dans ce sens, l'encours des provisions a progressé de 9,2% à 40,5 Mds de DH, ce qui implique un taux de provisionnement de 68,2% à fin 2020. L'analyse de l'évolution de la rentabilité des banques hors effet coût du risque et les contributions au fonds Covid, incite à l'analyse du ratio RBE / total actif. Ce dernier a affiché un léger repli de 0,1% pour s'établir à 1,87% à fin 2020. Quid de 2021 ? Pour 2021, les analystes de CDG Capital annoncent que plusieurs incertitudes persistent autour des perspectives économiques suite notamment à la disponibilité de quantité suffisante du vaccin aussi bien au Maroc qu'à l'échelle internationale ainsi que la mesure dans laquelle les gouvernements et les banques centrales continuent de soutenir l'économie. Avant de se projeter en 2021, ils rappellent que l'essentiel des crédits distribués en 2020 concerne le financement des besoins en fonds de roulement. Pour ce qui est des crédits de trésorerie, leur évolution s'explique par les différentes mesures de soutien et de relance instaurées par la banque centrale et le gouvernement. Le Maroc à l'instar des autres pays a mis en place plusieurs programmes de financement, en l'occurrence « Damane Oxygène », « Relance TPE » et « Damane Relance ». Il s'agit de produits déployés par les banques et garantis par la CCG, destinés à accompagner les entreprises en ces temps de crise. Selon les derniers chiffres communiqués par la CCG, environ 53 milliards de DH de crédits ont été distribués dans le cadre de ces programmes de financement courant 2020. Les crédits bancaires devraient bénéficier d'une toile de fond assez favorable, avec la reprise de la croissance économique, la poursuite des mesures de soutien et de relance et une politique monétaire qui demeure globalement accommodante. Le plan de relance économique prévoit une injection de liquidité dans l'économie nationale estimée à 120 Mds de DH. Toutefois, la poursuite de la détérioration de la qualité des actifs devrait pousser les banques à être plus exigeantes en resserrant leurs critères de risques quant à l'octroi des crédits. Dans ce sens, le rythme d'évolution des crédits destinés au secteur non financier devrait afficher un léger ralentissement par rapport à l'année 2020, aux alentours de 3,6% selon les prévisions de la banque centrale. Les tensions sur le risque d'impayés devraient persister en 2021 La montée des créances en souffrance que nous avons constatée en 2020 devrait probablement se maintenir en 2021. En effet, les effets manifestes de la pandémie continuent de peser sur plusieurs secteurs d'activité et, par conséquent, la solvabilité des ménages et des entreprises est toujours mise à rude épreuve. Par ailleurs, les banques ont accordé à leurs clients en 2020 un report de paiement de leurs échéances sur une durée de six mois maximum, un délai de grâce qui a donc pris fin en septembre. Ceci a permis de repousser l'impact de la détérioration de la qualité des actifs et devrait à notre sens se refléter davantage au niveau des statistiques de l'année en cours. Dans ce sens, la banque centrale tablait en Août 2020 sur un taux d'impayés aux alentours de 10,8% en 2021 et 9,9%4 en 2020, soit une prévision pour l'année 2020 plus inquiétante par rapport aux réalisations. « Nous pensons que le taux d'impayés en 2021 devrait probablement augmenter par rapport à celui de 2020 mais sans pour autant atteindre le niveau de 10,8%. En révisant à la baisse la prévision de la banque centrale pour l'année 2021 avec le décalage observé en 2020, il se situerait aux alentours de 9,3%. Ce qui représente une augmentation de plus de 12 Mds de DH de l'encours des créances en souffrance au cours de la prochaine année », annonce CDG Capital. Le secteur bancaire devra bientôt entamer une nouvelle phase marquée par le retrait des différentes mesures de soutien du dispositif de garantie de la CCG et par un environnement de taux de bas. La fin du dispositif de garantie aura probablement pour effet une réévaluation de la prime de risque de crédit ainsi qu'une évolution de la lecture du risque de la part des banques et de leurs stratégies de crédit, après une année marquée par une forte évolution des crédits de trésorerie. les banques marocaines maintiendront leur aptitude à dégager une croissance des bénéfices pour l'année à venir. Aussi, une croissance positive des résultats est attendue en 2021. Les analystes restent toutefois attentifs à l'impact du niveau bas des taux sur le résultat des activités de marché et de son incidence sur les résultats. Les tensions sur le risque devraient d'après-eux persister en 2021 avec la montée des créances en souffrance anticipée suite à un contexte économique difficile.