Ce scénario d'une reprise en U peut nécessiter une période de résilience durant laquelle les fondamentaux économiques doivent pour autant demeurer solides. La découverte du vaccin a apporté du baume au cœur des analystes économiques et l'on commence d'ores et déjà à élaborer les scénarios de la reprise. Chacun y va de sa propre lecture. La situation n'est pas propre au Maroc mais un peu partout dans le monde essentiellement les pays qui ont été foudroyés par la crise sanitaire liée à la Covid19. Au Maroc, le manque de visibilité trop criard chez nombre d'opérateurs économiques plane toujours. Il suffit de décortiquer les enquêtes mensuelles du HCP ou de la Banque centrale pour s'en apercevoir. Autrement dit, chez nous comme un peu partout d'ailleurs, il existe une grande incertitude quant au moment et à la manière dont la reprise économique aura lieu. D'après les analystes de Policy Center For The New South (PCTNS), la forme de la reprise dépendra, notamment, de la résilience du système de santé, des effets des politiques économiques visant à soutenir les ménages et les entreprises, ainsi que de la disponibilité d'un vaccin efficace. « Par rapport à ce dernier point, il est évident que l'acquisition par le Maroc d'un vaccin contre la Covid-19, les préparatifs actuels pour le lancement de la campagne nationale de vaccination, ainsi que la décision royale en faveur de la gratuité du vaccin constituent une nouvelle qui porte à l'optimisme sur les plans sanitaire et économique », tiennent-ils à préciser. Dans ces conditions, un profil de reprise graduelle en U pourrait être, selon eux, le scénario le plus probable pour le Maroc. Cela peut nécessiter une période de résilience durant laquelle les fondamentaux économiques doivent demeurer solides. Comment ? Lors de cette période de transition, il est déterminant de préserver les capacités productives de l'économie marocaine, et de saisir l'ensemble des opportunités susceptibles de faire booster la productivité des facteurs. Mais pas seulement. Les analystes recommandent que parallèlement, les mesures de santé publique doivent être davantage renforcées, et les pouvoirs publics doivent continuer d'activer les leviers budgétaires et monétaires dont ils disposent. La reprise se ferait graduellement à un rythme déterminé par la résolution de la pandémie, à travers une vaccination généralisée, qui permet d'agir favorablement sur l'offre de travail et la productivité, ainsi que par la normalisation des conditions mondiales, en particulier chez nos principaux pays partenaires. Gare aux effets négatifs ! Cependant, certains facteurs risquent d'influencer négativement les perspectives de croissance. Tout d'abord, la dégradation de la situation bilancielle des agents économiques privés lors de l'impact de la Covid-19. Nous pouvons citer également la baisse des revenus, la détérioration des fonds propres et de la trésorerie, la hausse de l'endettement, les arriérées… Autant de facteurs à même de déclencher ce que l'économiste américano-taïwanais Richard Koo appelle « une récession des bilans ». Une situation qui, d'après les analystes de Policy Center, pousse les ménages et les entreprises, pendant la phase Post-Covid-19, à se soucier essentiellement de la reconstitution de l'épargne et du remboursement de la dette au détriment de la consommation et de l'accumulation du capital, entraînant ainsi un ralentissement de la demande intérieure privée et un essoufflement de la croissance économique. Ensuite, il y a la dette publique qui poursuit sa tendance haussière, en raison essentiellement de l'assouplissement de la politique budgétaire. « Il est clair que la dette publique a un rôle important à jouer dans le lissage des cycles économiques, la réponse aux crises de tous genres, en l'occurrence la crise sanitaire, ainsi que dans le financement des investissements publics et d'infrastructure », rassurent les analystes. Cependant, et bien que le Maroc n'ait jusqu'à présent pas atteint un seuil critique de la dette publique, cette dernière demeure soumise aux risques de taux de change et de maturité. Si le ratio dette publique sur produit intérieur brut continue sur sa tendance haussière et atteint un niveau critique dans le futur, le Maroc pourrait bien manquer d'espace budgétaire et ne pas être en mesure de déployer des ressources publiques nécessaires pour contrer tout autre choc négatif. En outre, la « fuite vers la qualité » sur les marchés financiers pourrait bien signifier que pour certains pays à revenu intermédiaire, comme le Maroc, il sera plus difficile d'emprunter pour couvrir leur déficit budgétaire (Hausmann, 2020). La montée de l'aversion au risque pourrait également durcir les conditions d'accès au financement extérieur et limiter les ressources nécessaires pour faire face aux chocs de la balance des paiements.