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Réforme de l'administration : Benchaâboun face aux titans
Publié dans EcoActu le 30 - 11 - 2020

Il y a des choix qui s'imposent sous l'effet de la Covid-19. La réforme de l'administration et du secteur public est l'un de ces impératifs, tant retardés, dont le Maroc ne peut plus faire l'économie. Et il incombe à Mohamed Benchaâboun, déjà au four et au moulin, de faire aboutir ce chantier identifié comme levier de relance à partir de 2021. Et autant dire que ce sera David contre Goliath !
Cela fait 65 ans, depuis l'indépendance du Maroc, que le dossier de la réforme de l'administration revient de manière récurrente. Bref, depuis toutes ces décennies, la mise à niveau du secteur public et de l'administration a été une patate chaude que se passaient allègrement les différents gouvernements. Même la crise économique mondiale de 2008 et les fameux enseignements tirés n'y ont rien fait.
Des mesures par ci, des décisions par-là, ou encore des chantiers comme le e-gov, la digitalisation. Aussi, la constitution 2011 a-t-elle consacré le principe de transparence et de la reddition des comptes pour l'ensemble des entreprises et établissements publics et des collectivités territoriales.
Le cadre réglementaire a été renforcé, mais censé être un élément de compétitivité du pays, l'administration publique s'est vite transformée en boulet.
Mais aujourd'hui, les choses ont changé, pour la volonté politique du changement on verra, mais le fait est que face à la rareté des deniers de l'Etat, l'administration publique étant particulièrement budgétivore, et la montée en puissance des besoins aussi bien des citoyens que des entreprises, le tout dans un contexte de crise sanitaire et crise économique systémique, la réforme administrative est une fois de plus posée sur la table.
Elle est même identifiée comme un levier de relance devant être enclenchée (ou plutôt réenclenchée) en 2021.
En effet, le Roi n'a eu de cesse de rappeler l'importance de l'efficience de l'administration publique et son impact sur le développement aussi bien social qu'économique du Royaume.
Dans ce sens, le PLF 2021 vient répondre aux orientations royales contenues dans le discours du Trône du 29 juillet 2020, à savoir la relance de la croissance, l'exemplarité de l'Etat et l'optimisation du fonctionnement du secteur public et la prise en charge de la question sociale.
Ainsi, comme l'a rappelé Mohamed Benchaâboun, le ministre de l'Economie, des Finances et de la Réforme de l'administration, « La sphère publique connaitra dès 2021 l'amorce d'une dynamique de réformes et de restructurations au profit d'une meilleure contribution à la croissance ».
Dans ce sens, deux textes de loi sont en cours de finalisation dont celui relatif à la création de l'agence nationale des participations stratégiques de l'Etat et celui portant réforme globale des EEP.
Il est judicieux de rappeler que le portefeuille public est composé de 225 établissements publics et 43 administrations publiques à participation directe du Trésor. Ces organismes détiennent 492 filiales ou participations publiques indirectes (pour une population de plus d'un demi million de fonctionnaires civils). C'est dire l'immensité de ce chantier bien complexe et à plusieurs égards.
L'ONEE, un cas d'école
Qu'en sera-t-il sur le terrain de ce chantier ? Le ministre avait annoncé en août 2020, les mesures immédiates qui seront prises pour opérationnaliser les Hautes Orientations Royales notamment en matière de réforme du secteur public.
Pour les EEP Non Marchands et Sociaux, il sera procédé d'un côté à la réintégration aux ministères concernés de certaines missions après liquidation/dissolution des EEP dont le maintien n'est plus nécessaire ; et de l'autre au regroupement de certains EEP dont le maintien serait justifié. En troisième lieu, il sera procédé à la liquidation / dissolution des EEP dont la mission n'est plus avérée.
Pour les EEP Marchands et Financiers, l'une des premières mesures énoncées consiste en le renforcement de la pérennité du modèle à travers la réduction de la dépendance envers le budget général de l'Etat (BGE) (capitaux, garantie.), une meilleure contribution au BGE (dividendes et redevances...), une valorisation du patrimoine, le PPP...
Le ministre annonce par ailleurs la création de groupes/holdings sectoriels homogènes répondant à des impératifs de taille critique, d'optimisation de la gestion (flux, trésorerie, coûts...), d'attrait pour le marché financier et de concrétisation des nouvelles opportunités offertes par l'intelligence artificielle, la digitalisation, l'économie circulaire...
L'objectif de ces mesures est de corriger les dysfonctionnements structurels des EEP, garantir une complémentarité et une cohérence optimales entre leurs missions respectives et, in fine, rehausser leur efficience économique et sociale.
Benchaâboun donne même un exemple concret : Le cas du secteur d'Infrastructures (Transports et Logistique) dont la réforme devra se concrétiser par le regroupement de ADM, ONCF, SNTL, CFR et AMDL et la création d'une entité chargée de la réalisation des infrastructures routières, autoroutières et ferroviaires ainsi que des services du transport.
Plus facile à dire qu'à faire. Le ministre doit en effet tirer des enseignements de la fusion en 2011 de deux entreprises publiques que sont l'ONE et l'ONEP (Résolument l'eau et l'électricité ne font pas bon ménage). La fusion mise en stand-by en 2015 est revenue à l'ordre du jour en 2019 avec la nomination d'Abderrahim Hafidi à la tête de l'Office. Il doit s'atteler à réorganiser les activités, instaurer gouvernance et synergie, mutualiser et surtout implémenter un nouvel esprit d'appartenance à une seule et même structure.
Valeur aujourd'hui, même les œuvres sociales de l'ONE et de l'ONEP sont séparées.
Qu'est ce qui fera que les fusions marcheront mieux cette fois-ci ? Benchaâboun avance ainsi dans un terrain miné qu'il gagnerait à bien étudier.
Il faut motiver les troupes !
La réforme ne doit pas concerner uniquement les structures puisqu'elle devra concerner plus d'un demi-million de fonctionnaires civils. Et l'élément humain ne doit pas être négligé car in fine, c'est lui qui portera (ou pas) le changement escompté.
Dans ce sens, il y a lieu de souligner un boulet de taille. Le Statut Général de la Fonction Publique (SGFP) qui régit les ressources humaines de l'Etat (564 000 fonctionnaires civils en 2019) a été adopté en février 1958 !
A ce sujet, dans son livre blanc, l'Association marocaine des anciens élèves de l'Ecole nationale d'administration (AMEENA) souligne que le SGPF constitue le cadre institutionnel principal qui définit les règles juridiques relatives à la gestion du parcours professionnel de ces ressources. Depuis son adoption, ce statut ainsi que ses textes d'application, n'ont pas évolué de manière significative, à l'exception de certains amendements limités qui n'ont pas impacté le système de la fonction publique, basé jusqu'à présent sur la notion de « carrière ».
« En fait, ce texte ne parvient plus à accompagner l'évolution que connaît l'environnement de l'administration et ses métiers. Etant basé sur le duo grade/ancienneté au lieu de celui emploi/performance, il ne permet pas, dans son état actuel, de promouvoir la performance, la motivation, l'équité, la méritocratie et l'égalité des chances. En outre, il prône un système de « notation » des ressources humaines inopérant et caduque, non corrélé à la qualité du service public rendu ».
Pour ce qui est du système de rémunération qui en découle, il est jugé rigide, incohérent, inéquitable et ne récompense pas la performance qu'elle soit d'ailleurs individuelle, collective ou organisationnelle.
« Représentant l'une des masses salariales les plus élevées des pays émergents comparables, les salaires des fonctionnaires au Maroc représentent 9.69 % PIB (2019). En fait, au cours de la période 2010-2020, les dépenses de personnel, hors cotisations de l'Etat au titre de la retraite et de la prévoyance sociale, ont enregistré une évolution annuelle moyenne avoisinant les 4%. Cette évolution est principalement liée aux régulations au titre des avancements de grade et d'échelon. Lesquels s'opèrent essentiellement sur la base de l'ancienneté décorrélés de la notion de performance. De ce fait, le coût de fonctionnement de la fonction publique s'avère être élevé par rapport à la qualité des services rendus », souligne-t-on.
Par ailleurs, le projet de généralisation de la Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences (GPEEC) au niveau de l'ensemble des départements a été lancé.
Et bien que celui-ci soit présent dans les programmes de la majorité des ministères, AMEENA note l'absence d'une vision d'ensemble et sa réduction à l'élaboration des référentiels des emplois et des compétences (REC) outil technique qui par la force des choses se retrouve caduc avec le temps.
En effet, la mise en place de la GPEEC s'est heurtée à des contraintes liées à la rigidité du SGFP. Il s'agit notamment de l'absence de concordance entre l'emploi et le grade et de la complexité du système de rémunération.
De plus, la multiplicité des corps et des cadres a constitué une entrave à sa mise en œuvre et à la flexibilité managériale. La réforme devient urgente et indispensable pour asseoir une fonction publique performante.
Il s'agit de trouver la bonne combinaison entre l'approche « métiers » (gestion des emplois et des compétences) et l'approche « carrières » (dimension statutaire, gestion des corps et des grades) car la fonction publique notamment les fonctions d'encadrement doivent pouvoir compter sur une ossature forte et de qualité, préconise l'AMEENA.
Ce livre blanc est à consulter à juste titre car, vous imaginez bien que la réforme de l'administration implique la fiscalité, la régionalisation, la formation, la gestion des ressources humaines, la commande publique, inter-opérabilité...
Ne pas confondre administration et gouvernement
Portant l'exécution des politiques publiques, l'administration publique est souvent au milieu de tirs nourris entre différentes formations politiques. Elle est d'ailleurs un enjeu de taille dans cette guéguerre qui se traduit souvent, par la nomination aux postes de responsabilité de candidats « politiques » souvent à des années lumières de l'activité même de tel ou tel organe.
Des candidats dont la couleur politique ne peut camoufler une absence de connaissance de l'administration, de la gouvernance publique et des enjeux de chaque administration.
Ce phénomène est observé à l'arrivée d'un nouvel exécutif aux commandes qui va vite placer ses pions.
Ce qui instaure depuis des décennies, un seuil de verre qui empêche les cadres les plus méritants d'arriver aux commandes et qui par ricochet entame la volonté et le moral des fonctionnaires qui voient atterrir à leur tête des « boss étrangers » à la maison.
La question de la gestion de carrière au sein de l'administration publique, développée plus haut, revêt une importance cruciale puisqu'elle devrait résoudre cette problématique : le plus méritant doit évoluer jusqu'à arriver aux commandes !
Autre phénomène qui peut être d'une extrême gravité est celui de promettre la création de postes budgétaires comme argument de campagne électorale ou céder aux manifestations sociales des diplômés en ouvrant les vannes de recrutement.
L'expérience marocaine a montré l'échec de cette tendance puisqu'il n'y a aucune corrélation entre le nombre de recrutement (objectif quantitatif) avec une amélioration de l'efficience de l'administration (objectif qualitatif), sans oublier que cela augmente de manière insoutenable la charge salariale de l'Etat (et ses charges sociales). Et pourquoi pas un CDD dans l'administration publique ? Il n'est nullement écrit que travailler dans l'administration publique est un sacrement de mariage à la catholique (jusqu'à ce que la mort nous sépare !).
C'est une énième problématique que Benchaâboun doit se coltiner pour séparer l'action politique de l'action publique en plus de l'épineuse question du contrôle et l'évaluation de l'efficience de l'action publique.
En tout état de cause, quelques semaines nous séparent de 2021 pour voir comment le ministre de l'Administration s'attaquera à ce casse-tête chinois bien Marocain !


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