Xavier Reille, Directeur Maghreb de SFI explique comment l'entité qu'il dirige et le groupe Banque Mondiale vont collaborer pour mettre en oeuvre les orientations royales. Lesdites orientations se reflètent dans les axes prioritaires du nouveau cadre de partenariat. Ecoactu : Quels sont les principaux enseignements tirés par la SFI de la stratégie 2014-2017 et comment avez-vous envisagé de les prendre en considération dans le présent cadre de partenariat 2019-2024 ? Xavier Reille : Le premier enseignement est que nous devons travailler plus étroitement avec la Banque Mondiale et coordonner nos instruments. En effet, nous pouvons avoir plus d'impact si la Banque Mondiale accompagne le programme de réformes du gouvernement et la SFI soutienne le secteur privé avec de l'investissement et des services de conseil. Si nous arrivons à conjuguer et coordonner les efforts, les résultats seront plus probants. Le deuxième enseignement est qu'il faut mieux se concentrer et se focaliser parce que nous ne pouvons pas avoir des objectifs étalés sur trop de domaines et secteurs. Nous allons nous concentrer sur les domaines où nous pouvons aider le plus en matière d'emploi, d'inclusion sociale et de développement territorial qui sont d'ailleurs les grandes priorités du Maroc. Le but étant d'adapter notre programme aux orientations royales du Maroc. Justement en matière d'inclusion sociale, quels sont les leviers qui seront actionnés pour assurer une croissance économique qui profite aux différents pans de la société ? Je pense que le plus important aujourd'hui est de déclencher une dynamique entrepreneuriale et de relancer les exportations. Si nous souhaitons avoir un taux de croissance de plus de 5%, qui est l'objectif escompté, il faut quatre moteurs : la demande interne, l'investissement public, une dynamique entrepreneuriale forte avec plus de création d'entreprises et des PME qui évoluent et s'intègrent dans les chaines de valeur mondiales. Un secteur privé dynamique pourra créer des emplois sur tout le pays. Dans le nouveau cadre de partenariat, nous allons aussi agir sur le capital humain et le développement régional pour obtenir une croissance plus inclusive. En ce qui concerne le volet PME-TPE, on remarque que l'Etat accorde de plus en plus d'importance à cette frange du tissu économique et plusieurs dispositifs y sont déployés. Comment s'est inscrite la SFI dans cette dynamique ? Dans un premier temps, nous avons commencé à travailler avec la Banque Mondiale sur les écosystèmes de création d'entreprises à travers le programme Innov Invest pour les fonds d'amorçage et l'assistance aux incubateurs pour accompagner les start-up. Sur le volet TPE, nous travaillons à la fois avec les institutions de microfinance (IMF) et les banques. Concernant les IMF, nous estimons que la hausse du plafond de prêt de 50.000 DH à 150.000 DH est une très bonne mesure. Il faut reconnaître que les IMF marocaines sont fortes et jouissent d'une bonne réputation. L'idée pour la SFI est de les accompagner pour leur permettre de développer des produits qui répondent aux besoins des TPE. A cet effet, la SFI offre des financements et un programme d'assistance technique à des associations comme Attawfiq ou Al Amana. Grâce à la digitalisation en cours, l'information des crédit bureau et les avancées sur les sécurités mobilières, les TPEs vont pouvoir bénéficier de plus de financements. Le déficit commercial persistant de la balance commerciale se résume plus à un problème de compétitivité. D'après-vous comment les entreprises marocaines peuvent-elles surpasser un tel handicap ? Effectivement, il est impératif de travailler sur la compétitivité et de relancer les exportations. Les entreprises marocaines ont des atouts importants. Certaines peuvent accéder à des marchés africains ou européens et devenir des champions régionaux. A la SFI, nous voulons aider à créer des champions régionaux. Comment ? En sélectionnant des PME marocaines qui ont du potentiel et en les aidant à se développer, à exporter et s'implanter en Afrique ou en Europe ... et sortir de leurs frontières. C'est ce que la SFI a fait avec le groupe Saham dans les assurances, avec la BCP devenu un champion bancaire africain ou avec HEM dans l'éducation. La SFI apporte son expertise, son financement et sa connaissance des marchés africains. Nous voulons aussi aider les PME à mieux se développer et intégrer les chaines de valeurs des métiers mondiaux du Maroc. Le grand boulet que traîne le Maroc est celui de l'éducation. Comment la SFI compte-t-elle aider le Maroc à améliorer son système éducatif et surtout remédier à l'épineuse problématique de l'inadéquation formation-emploi ? Notre programme est basé sur les résultats des enquêtes d'entreprises. La question qui revient le plus souvent est l'accès au financement dont nous venons de parler. Les entreprises insistent également sur la qualité de la main d'œuvre. Celles-ci n'arrivent pas à trouver les profils adéquats qui répondent à leurs besoins. C'est une caractéristique propre au Maghreb par rapport au reste des pays arabes. Au Maroc, nous avons un taux de 43% des jeunes sans emploi dans le milieu urbain. Le pays souffre d'un vrai problème d'employabilité, notamment des jeunes. Il faut absolument aider à former des compétences qui répondent aux besoins des entreprises. Je pense que les orientations royales en ce qui concerne la réforme de l'OFPPT sont très importantes. Le secteur privé a un rôle important à jouer pour améliorer l'employabilité des jeunes. La SFI souhaite notamment apporter des modèles innovants notamment sur des formations courtes (2 ans). La part de marché du secteur privé dans l'éducation supérieure n'est aujourd'hui que de 5% et il y a beaucoup à faire dans ce domaine. Comment les 5 Mds de dollars du groupe Banque Mondiale seront-ils répartis pendant les trois premières années ? C'est un effort important. Les 5 Mds de dollars d'engagement pendant les trois premières années concernent à la fois la Banque Mondiale, la SFI et la MIGA (organisme accordant des garanties). Mais le montant exact de ces engagements dépendra aussi de la réalisation des réformes prévues par le gouvernement. Lire également : Cadre de partenariat Maroc-Banque Mondiale : 5 Mds de dollars débloqués dans les trois premières années