Le paiement électronique au Maroc n'a pas encore atteint sa vitesse de croisière. Et pourtant ses avantages sont multiples. Le point avec Sami Romdhan, Country Manager de Visa Maroc et Mauritanie sur pourquoi le paiement électronique n'arrive pas encore à décoller. EcoActu.ma : Dans quel cadre s'inscrit votre participation à la conférence Euromoney qui se tient pour la première fois au Maroc ? Sami Romdhan : Nous sommes partenaires de cette première conférence d'Euromoney au Maroc en tant que sponsor mais également en tant qu'expert dans le domaine des paiements électroniques. D'ailleurs notre Directeur Senior de Visa School of Public Policy à Dubaï Majeed Hujair, a participé à un panel sur le thème : « Le Maroc de l'avenir : stratégie économique et perspectives du marché ». Présents depuis plusieurs années au Maroc, quel regard portez-vous sur l'évolution du paiement électronique qui malgré les efforts déployés par le secteur bancaire et le gouvernement, sa part reste encore très infime ? Y-a-t-il une concordance entre cette évolution et le taux de bancarisation ? Concernant le taux de bancarisation au Maroc, Bank Al-Maghreb a décidé de retenir des critères assez objectifs pour son calcul et qui se sont soldés par un taux de 58% qui reste relativement élevé dans la région. Quant aux paiements électroniques, d'après une étude faite en 2018 par le cabinet Robine Fodmap sur les avantages du paiement électronique par ville, il ressort que la généralisation du paiement électronique au niveau de Casablanca générerait une augmentation du PIB de la ville de 930 millions de dollars, ce qui représente 3,75% d'augmentation du PIB de la capitale économique du Royaume. Les 930 millions de dollars seraient répartis comme suit : 600 millions de dollars seront en faveur des entreprises, 300 millions de dollars au gouvernement (collecte de taxes) et 30 millions de dollars pour les citoyens. A noter, qu'au Maroc il y a deux ratios. Le premier concerne les transactions par carte. Ce dernier de 10% est relatif aux opérations de paiement contre 90 % des opérations de retrait. Le deuxième, sur le total des dépenses des ménages au Maroc, les paiements électroniques par carte et autres ne représentent que 8% contre 92% de paiement par cash. Il y a encore un potentiel de développement énorme à saisir. Qu'est-ce qui explique justement cet état de fait ? Est-ce que c'est une question de culture, d'infrastructures, d'incitations... ? D'après les chiffres du ministère du Commerce, sur 1,4 million de commerçants, on retrouve seulement 50.000 terminaux de paiement électronique (TPE). Un taux qui reste très faible. Pour y remédier, il va falloir juste mettre en place un outil adapté qui répond à un réel besoin. Je donne l'exemple des téléphones mobiles, aujourd'hui il y a des gens qui utilisent les réseaux sociaux (plus compliqués techniquement) alors qu'ils ne savent même pas utiliser une carte bancaire. Cela dit pour inciter les commerçants à adopter ce mode de paiement, il faut fournir le bon support et offrir toutes les solutions de paiement (paiement sans contact, paiement mobile...). L'informel qui représente 20% du PIB marocain n'est-il pas en soi un frein à l'émergence du paiement électronique au Maroc ? Au niveau macroéconomique, l'informel cause plusieurs problèmes aussi bien en ce qui concerne la collecte de taxe que la traçabilité des opérations. Notre devoir à tous (opérateurs, secteur bancaire, régulateur, gouvernement...) est de lutter contre l'informel. Y a-t-il une coopération entre Visa et la banque centrale sur les différents volets notamment en ce qui concerne l'augmentation du taux de bancarisation, de paiement mobile, de lutte contre la fraude... ? Visa est présente au Maroc depuis les années 70. Ce qui nous a permis de nouer des partenariats avec tous les acteurs de la place notamment avec Bank Al-Maghreb en tant qu'acteur principal dans le paysage des paiements au Maroc. Certes nous n'avons pas un partenariat bien ficelé avec BAM, toutefois nous travaillons ensemble pour accompagner cette institution dans son agenda de digitalisation et l'inclusion financière.